Jefferies, banque d'affaires avec une forte expertise Internet, organisait ce mardi à New York sa "Second Annual Internet Conference" à laquelle j'assistais. Et oui, pendant que le milieu de la photo se réunissait à Orlando en Floride pour sa grande messe annuelle (la PMA), j'étais plus au nord (ça se sentait au niveau des températures avec du quasi -10° le matin tôt) !
Conférence passionnante, ce fut l'occasion d'écouter les présentations de plusieurs grands noms de l'e-commmerce américain présenter leur business, dont Netflix, Napster, ou notre confrère Shutterfly, n°2 américain et mondial de notre relativement petit marché.
Quelques insights sur les données et les modèles économiques de ces sociétés :
- NAPSTER a bien changé depuis 2 ans et propose maintenant un modèle payant original et différent d'Apple. Si la firme vend aussi des chansons à l'unité comme l'iTMS (au prix de 0,99$), elle se distingue avec un modèle par abonnement à 9,95$/mois pour un download illimité sur PC (et 14,95$/mois pour download illimté vers PC et Mobile). Il s'agit dans ce cas non pas d'un achat réel de musique mais d'une location : dés qu'on arrête son abonnement il n'est plus possible d'écouter la musique.
Le CEO, Chris Gorog, expliquait que la marge brute qu'il réalise sur la vente de morceaux à l'unité ne dépassait pas 10% alors qu'elle était de 30 à 40% sur les abonnements.
Il faisait remarquer que les 40 Millions d'Ipod vendus depuis l'origine n'avaient généré que 1 Milliard de chansons achetées sur l'ITMS, soit une moyenne de 25 morceaux/iPod seulement, soit encore un peu moins de 25$/client iPod. A comparer avec les 120$ annuel que paye un client Napster...
Face au tout puissant iMTS se taillant et ses 75% de PDM, Napster se concentre donc sur les clients les plus rentables qui prennent un abonnement. Après 2 ans d'exploitation de ce modèle, elle a acquis 500,000 clients et se développe bien à l'international (UK, Japon, Canada et Allemagne actuellement).
Avec sa stratégie, Napster est actuellement n°2 du marché (OK, loin derrière Apple), mais devant des géants qui s'y sont essayé comme Yahoo, AOL, Sony, Microsoft ou même Walmart.
Napster prévoit de doubler ses ventes en 2006, à pas loin de 100M$.
- NETFLIX : le "grand frère" de notre Glowria national comme l'appelait mon ami Mihai, spécialiste de la location de DVD par internet, est devenu un géant avec des ventes annuelle de 1 Milliard de $ prévu sur l'année fiscale 2006, en croissance de +45% (ce qui est beau vu la taille déja atteinte), et 4 Millions de comptes clients actuellement.
Avec 1 million d'envoi par jour, pour environ 50,000 titres différents, j'imagine que Netflix est devenu un sacré pro de la logistique !
Sur la région San Francisco ("Bay area"), origine de la société, 12% de tous les foyers sont maintenant clients Netflix ! Etonnant, la pénétration dans les autres régions ouvertes après suit excatement la courbe de San Francisco. Le modèle serait ainsi assez prédictible et Netflix promet alors 20 Millions de foyers clients en 2012, soit environ 20% de tous les foyers américains. Belle ambition !
Point intéressant,Ted Sarendos, le Chief Content Officer, détaille que si 90% du
business d'un video store physique se fait sur les nouveaux titres, la proportion n'est que de 30% pour eux ! Ainsi, si la société estime qu'elle possède 12% de PDM globale de la location de DVD aux Etats-Unis, elle peut représenter près de 60% du marché de la location pour certains films !
Totalement customer centric, Netflix a été élu n°1 en satisfaction client sur l'ensemble des sites de e-commerce, y compris devant Amazon, avec pour conséquence un "churn" (clients stoppant leur abonnement) ne dépassant ainsi pas 4% de la base. Bravo !
Seul petit hic du modèle, la rentabilité n'est pas très élevée du fait d'une concurrence intense qui fait pression sur les marges. Ted Sarendos ayant déclaré sans ambiguité qu'ils pouvaient faire des guerre de prix pour rendre leurs concurrents non rentables...
SHUTTERFLY, notre confrère, ami et modèle depuis l'origine (j'ai crée Photoways quand j'ai su que Jim Clark créait Shutterfly), a été le plus avare en chiffres ! J'ai néanmois relevé qu'ils arguaient d'un panier moyen extrêmement élevé, 2.5 fois supérieur à celui qu'aurait Walmart pour son business concurrent et 2 fois supérieur à celui de Snapfish (Groupe Hewlett Packard, voir note plus bas).
Je n'ai pu m'empêcher de faire immédiatement la comparaison avec Photoways : bonne nouvelle, notre panier moyen est supérieur à celui de Shutterfly (et je crois qu'on va garder ce chiffre confidentiel) !
Shutterfly mise à fond sur des technologies propriétaires avec déja 10 brevets déposés et une trentaine d'autres en cours !
La croissance de Shutterfly en 2005 fut un "petit" +50%, ce qui est finalement un peu décevant mais s'explique par leur stratégie spécifique et plutôt originale : dans notre métier hyper concurrentiel et price-driven, ils refusent totalement de jouer la guerre des prix (Walmart ou Snapfish sont ainsi 2 fois moins cher que lui sur le tirage 10x15) et ont une stratégie à 3 piliers :
- Une obsession totale de la qualité du service à tous les niveaux pour assurer la fidélité.
- Un très puissant CRM pour maximiser le yield client.
- Des produits à forte valeur ajoutée pour augmenter le panier moyen (ie livre photo). Le fameux tirage 10x15, qui était la base du métier il y a 6 ans, ne représente plus maintenant qu'un revenu presque marginal pour eux.
La croissance à tout va n'étant pas la priorité, les dépenses de publicité sont alors extrêmement réduites, voir quasi nulles, les efforts marketing se déployant vers quelques partenariats à forte visibilité.
Corrolaire aux faibles dépenses marketing puisque la croissance a tout va n'est pas leur stratégie, Shutterfly affiche une très belle rentabilité, la plus belle du métier, et de très loin...
Alors que Netflix et Naspter sont côtés à Wall Street, Shutterfly est intégralement privé (Jim Clark, fondateur de Silicon Graphics et Netscape est notamment l'un des principaux actionnaires) et le CFO, Stephen Recht, a annoncé qu'il n'entendait pas dans l'immédiat céder aux sirènes de la Bourse car il y avait plus d'inconvénients que d'avantages...
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