J'aurais vendredi prochain l'honneur et le plaisir d'exposer à Roubaix ma vision de l'e-commerce auprès de quelques centaines de membres de l'Association Familiale Mulliez qui invite régulièrement des "guest speakers" sur des thèmes divers.
Sacré pôle de distribution que celui crée au cours du temps par les membres de cette très grande famille : Auchan bien entendu, mais aussi Boulanger, Pimkie, Décathlon, Norauto, Leroy Merlin, les 3 Suisses (avec l'allemand Otto), St Maclou, Kiabi, Brice, etc. Peu de secteurs du retail échappent aux initiatives des Mulliez. J'ai beaucoup de respect et d'admiration pour eux qui savent construire dans le temps, et qui sont si proches du consommateur.
Etat des lieux, fondamentaux de l'e-commerce, perspectives et enjeux, etc, je ferai un tour d'horizon de ce nouveau canal et mon message de base sera simple : l'e-commerce aux commerçants, à vous d'en saisir les opportunités (il va tripler dans les 5 prochaines années), décarcassez-vous !
Le retail physique a en effet tous les atouts pour réussir et s'imposer, d'abord des enseignes légitimes et crédibles qui inspirent confiance, d'autre part l'indispensable mais rare mentalité commerçante, et enfin le sourcing et les volumes d'achat !
Certes, il lui reste à comprendre et intégrer d'une part la spécificité de l'environnement virtuel où, notamment, le consommateur n'est jamais qu'à un clic d'une foultitude de concurrents et est toujours parfaitement renseigné grâce aux shopping engines et aux forums, d'autre part les possiblilités, les contraintes et les limites de la technologie, mais je considère que les bases fondamentales, celles qui sont les plus créatrices de valeur, sont bien là !
Ce qu'on a d'aileurs coutume de dire en retail, c'est qu'on crée de la valeur en amont et on évite de la perdre en aval par une mauvaise gestion ou une mauvaise présentation en magasins. Je crois que c'est pareil dans l'e-commerce : la technologie ne crée pas intrinsèquement de la valeur, mais elle évite de beaucoup en perdre ! Certains pourraient penser que c'est pareil (elle en crée car elle évite d'en perdre) mais bon, il y a tout de même une nuance. Désolé pour les technologists pur jus ! Je m'appuyerais de plus derrière ce que disait Jim Clark lors de sa démission de la Présidence du Conseil de Shutterfly "en tant que technologiste je n'apporte plus assez de valeur à cette société devenue avant tout industrielle et commerciale" !
A noter que l'importance relative de la technologie en e-commerce est bien différente de nombreux modèles web 2.0 où elle est l'atout essentiel créateur de valeur et est intrinsèquement un facteur clés de succès. En e-commerce, même si ce n'est évidemment pas idéal, on peut largement compenser une technologie disons "trop juste" par d'autres atouts : innovations, tactiques commerciales, proximité et relationnel client. Le client ne vient pas pour la techno ou la qualité du site, il vient pour les produits, leur attractivité, les prix, la qualité et la fiabilité du service. Mais il risque bien de ne pas acheter, de partir et de ne plus revenir si la techno n'est pas au point, le site défaillant, présentant une trop grande difficulté à commander, etc.
Et loin de moi de minimiser l'importance de la technologie ! Je réalise et mesure tout ce qu'elle peut détruire comme valeur si elle n'est pas au point ! L'ouverture peu glorieuse de Boostore est aussi la pour l'illustrer ! Ce n'est pas un facteur clé de succès, mais c'est clairement un facteur d'échec !
Si le retail physique a les cartes fondamentales pour s'imposer en e-commerce, je ne crois pas dans l'avenir des pure players sur des marchés de commodités/biens courants, à quelques exceptions près. Leur avenir passe nécessairement par un adossement à un grand groupe retail. Pixmania l'avait très bien compris quand ils se sont revendus à DSG (Dixon en autres) en avril 2006.
Et dans le même temps, un pure player apporte la mentalité technologique et web qui fait défaut au retail physique, donc le mariage fait du sens pour les 2 parties.
Mais l'avenir de l'e-commerce passe aussi, à mon sens, par des marchés de niche, où on s'écarte des produits courants et on écoule des produits spécifiques à une clientèle CSP+. Ce qui, de toute façon, ne dispensera pas de garder une bonne mentalité commerçante et de maîtriser la technologie.
Michel, je ne sais pas si vous le connaissez mais l’hyper Auchan Val d’Europe vaut le détour.
Pour les achats utilitaires, une logique commerciale basée sur l’efficience (prix, lisibilité de l’assortiment, choix…) et pour les achats plus « affectifs » une logique commerciale « expérientielle » qui d’habitude est l’apanage des spécialistes (étonnement par les produits, espace commercial traité en petites surfaces différenciées (parquet au sol etc)…).
Rien à voir avec la/les tentative(s) de Carrefour de considérer des univers.
Posted by: J. | March 18, 2007 at 08:56 PM
Et n'oublions pas que les GSA détiennent 20% du marché des produits non-alimentaires et sont leaders sur certains secteurs (hygiène, textile enfant...)
Posted by: J. | March 18, 2007 at 09:03 PM
Bonsoir Michel.
Un très bon billet !
Qui m'a inspiré ce billet :
http://www.ziserman.com/blog/2007/03/18/quand-il-faut-changer-de-paradigme/
Où je rappelle l'histoire d'un p'tit texan, Dell, qui a battu à plat de couture les grands acteurs établies (IBM, Compaq...). Pourquoi ? Pas de barrières technologiques, rien de techniquement très difficile.
La seule raison, c'est que pour les grands acteurs établis, pour barrer la route à Dell, ils leurs auraient fallu changer de paradigme.
Je pense que c'est un peu le même challenge qui attend les commerçants actuels : ils ont tout pour prendre de belles parts dans le e-commerce, mais il faut changer de point de vue !
Posted by: François Ziserman | March 18, 2007 at 09:36 PM
Avec le lien correct :
Changer de paradigme
François
Posted by: François Ziserman | March 18, 2007 at 09:39 PM
Jean Louis, non, je n'ai pas cette chance ! Mais cette approche me paraît tout à fait sensée.
Posted by: Michel de Guilhermier | March 18, 2007 at 09:47 PM
François,
Merci, 2 points :
- Plus que de point de vue, ils doivent surtout s'imprégner des conséquences de la virtualité. Ils baignent dans le lien physique.
- Ils doivent aussi connaître les 2 domaines qu'ils ne maîtrisent pas, la techno et la logistique one 2 one.
Posted by: Michel de Guilhermier | March 18, 2007 at 09:50 PM
En gros, tu affirmes que la technologie n'est pas la finalité dans l'e-commerce, non?
La création de valeur d'un commerçant, c'est sa capacité à faire du CA et à dégager une marge.
A partir de là, les techno (dans le e-commerce), la logistique (chez Dell), les achats, le marketing (chez Apple), ... etc, ne sont que des léviers pour limiter la destruction de valeur issues des frictions du processus de vente. Me trompe-je?
Posted by: Julien | March 19, 2007 at 03:28 AM
L'exposé promet d'être tres interessant !
Dommage que Lyon ne soit pas le fief d'un gros de la distribution comme Auchan :-)
Posted by: Daniel | March 19, 2007 at 09:40 AM
Bonjour Michel,
Joli post et félicitaion pour cette invitation à l'AFM.
Sur le dernier paragraphe, tu évoques la long tail : "[...] par des marchés de niche, où on s'écarte des produits courants et on écoule des produits spécifiques à une clientèle CSP+.[...]
Est-ce que justement les deux approches ne sont pas divergentes?
Les Retailer précités ainsi que 3suisses ou redoute optimisent leurs rendements sur les 20/80 au CA par m² ou au cm de catalogue papier et sont donc sur des produits généralistes avec des gammes courtes.
Les Pures players travaillent sur leur profondeur de gamme n'ayant pas ces contraintes d'expositions de leur produit, le média étant ici tout à fait approprié.
On voit donc les acteurs majeurs perdre des parts de marché sur le Web au profit d'une foultitude de microacteurs (17500 aujourd'hui source FEVAD).
Donc même s'ils ont les "bases fondamentales", le Web demande réactivité et souplesse, ce qu'il n'ont pas toujours. Ce n'est pas rare que le moindre développement demande plusieurs mois, ce qui les laisse toujours en phase de réaction, rarement en prise d'initiatives (le cas Venteprivée en est un bonne exemple). Enfin, la plupart d'entre eux extrapole le fonctionnement de leurs magasins sur le Web, ce qui est parfois un peu limite au vu de la virtualité de leur client.
Posted by: Urc | March 19, 2007 at 03:30 PM
Bonjour Urc,
je ne suis pas sûr de suivre le fil de ta pensée !
Quelles 2 approches seraient divergentes ?
Posted by: Michel de Guilhermier | March 19, 2007 at 07:23 PM
Le "groupe" Auchan privilégie le ROE et le free cash flow (raisons entre autres pour lesquelles Kiloutou n'a pas été "suivi") voire les synergies avec une acquisition e-commerce (grossbill), aussi je ne le vois pas faire d'acquisitions e-commerce.
Remarquez, à ce jour, il n'aurait pas grand choix.
Posted by: J. | March 19, 2007 at 09:08 PM
Il y a aussi 2x-cher (3 suisses) et un autre encore racheté récemment...
Posted by: Michel de Guilhermier | March 19, 2007 at 09:11 PM
oui, j'associe trop 3 suisses à Otto. L'autre une acquisition par 3 suisses?
Posted by: J. | March 19, 2007 at 09:25 PM
non non...
Posted by: Michel de Guilhermier | March 19, 2007 at 09:30 PM
c'était quoi?
Posted by: J. | March 19, 2007 at 09:32 PM
Ils n'ont pas communiqué dessus, mais c'était Boulanger qui a racheté. Puis ça a servi de base au site de Boulanger.
Posted by: Michel de Guilhermier | March 19, 2007 at 09:33 PM
Vraiment étonnant...un ptit kiki, alors...
Posted by: J. | March 19, 2007 at 09:36 PM
;-)
Posted by: Michel de Guilhermier | March 19, 2007 at 09:38 PM
J.
Je pense , pour y avoir évolué, que le groupe Auchan est justement extrêmement pragmatique. C'est un commerçant.
Si ils invitent des guests pour évoquer le e-commerce, c'est qu'ils ont eu simplement le temps d'observer l'évolution du e-commerce. Enfin, je dirai plutôt du commerce-e. Car le e-commerce.... n'existe pas encore. Le commerce sur le net n'est qu'un nouveau canal de commercialisation. Mais rien n'a encore été réellement inventé.
Le groupe Auchan est déjà présent sur le web. Exple Décat. Mais sans vendre. Il ne reste plus qu'à initialiser. La philosophie d'Auchan est simple: "employer les méthodes qui ont fait leur preuve pour vendre"... et les améliorer en innovant. Je pense qu'ils arriveront prochainement sur le Web. Et peut être inventeront-ils le Commerce-E
Posted by: Steeve REYNAUD | March 19, 2007 at 10:09 PM
L'e-commerce aux commerçants et je vais les aider !
Posted by: Michel de Guilhermier | March 19, 2007 at 10:11 PM
Euh, Michel il y a un truc qui m'échappe ; les aider? Gratuitement?
Plutôt faire le ptit kiki, évaluer leurs besoins, faire et vendre?
Posted by: J. | March 19, 2007 at 10:15 PM
Les aider, parce que je trouve que ce sont des gens bien, avec des valeurs fortes.
Comment les aider ? Bah, on verra bien. Je connais l'e-commerce, je comprends l'e-commerce, je sais que c'est avant tout par un mindset commerçant qu'on fait la différence, ils ont ce mindset mai pas encore la logique du virtuel, je peux les y aider...
Posted by: Michel de Guilhermier | March 19, 2007 at 10:19 PM
Et un détail Jean Louis, je n'ai plus besoin financièrement maintenant de jouer au pti kiki !
Posted by: Michel de Guilhermier | March 19, 2007 at 10:20 PM
Oui, oui.
Evaluer leurs besoins, faire et vendre, c'est aussi les aider. En notant qu'ils apprécient de garder le management, mais bon...
C'est suite à une thèse avec des positionnement d'enseignes (méthode AFC) qu'ils ont développer Kiabi.
Après avoir "payé" le thésard (Marc Filser) pour qu'il fasse des précos.
Il aurait certainement pu maximiser la valeur de son aide différemment.
Posted by: J. | March 19, 2007 at 10:24 PM
oui, mais il n'y a pas que l'argent ! tant que je peux savourer des macarons Ladurée et des oeufs de saumon ou du tarama à la poutargue Kaspia, je suis content !
Posted by: Michel de Guilhermier | March 19, 2007 at 10:27 PM
Vous allez foutre les chocottes aux niakeux qui vous ont adressé un cv.
Posted by: J. | March 19, 2007 at 10:29 PM
C'est l'examen de passage !
Posted by: Michel de Guilhermier | March 19, 2007 at 10:31 PM
Michel, j'avais éteint mon laptop et je le rallume pour vous dire que vous m'étonnez.
Peu probable, mais 90% de personnes comme vous dans une étude qualitative et le consultant remet son métier en cause;-)
Bonne nuit.
Posted by: J. | March 19, 2007 at 10:52 PM
faut vraiment essayer les oeufs de saumon non pasteurisés de byzance, ca vous changera vraiment de ceux du bon marché.
Vous allez leur parler du positionnement prix offline vs. online? Par exemple Carrefour avec Boostore et Fnac avec Surcouf n'arrivent pas vraiment à pratiquer des prix "internet" en online, ca leur pose trop de problèmes en magasin.
Sinon, decathlon se remet à l'ecommerce : http://www.koodza.fr sous un autre nom, une façon (couteuse en pub) de régler le problème.
Posted by: paul | March 19, 2007 at 11:14 PM