Il y a 10 ans, je gérais une quarantaine de magasins de fruits & légumes. Aujourd'hui et depuis 2007, après un détour par le conseil en LBO et le développement de Photoways, devenu leader en Europe du développement photo sur Internet, retour aux sources avec Inspirational Stores, nouveau groupe de distribution e-commerce (managé au quotidien par l'excellent Erik-Marie Bion), qui exploite des magasins de macarons et autres douceurs (Ladurée), du caviar (Caviar Kaspia), des parapluies fashion exceptionnels (Alexandra Sojfer), du prêt à porter haut de gamme (Antik Batik ou Daniel Crémieux, entre autres), des parfums uniques (Different Company), et des dizaines d'autres en préparation.
Un groupe de distribution haut de gamme, multi-secteurs, mais dont le champ d'action est essentiellement le web. C'est un concept novateur en soi, mais qui n'est pas sans rappeler certains groupes de distribution du monde physique qui gèrent des dizaines de franchises de marques dans des secteurs différents (prêt à porter, restauration, parfums et cosmétiques, footwear, etc) sur des territoires particuliers.
Et nous, notre territoire, c'est tout simplement le web. Nous sommes des commerçants du web, notre connaissance et notre maîtrise des paramètres de ce secteur nous permet d'y développer efficacement à peu près n'importe quel catégorie.
La problématique de fond entre le retail physique et le retail web reste la même : construire des magasins agréables, y mettre le merchandising adéquat propice à déclencher des achats, entretenir un bon relationnel avec la clientèle et développer une compréhension très fine de ce qu'elle est, de ses besoins et de ses comportements, animer commercialement le magasin.
Si on remplace la construction et l'aménagement physique du magasin par les technologies informatiques et web, on a les mêmes ingrédients du succès.
A un bémol près, mais un gros bémol...
En effet, dans le retail physique, le trafic - 1er élément essentiel pour dégager du CA - vient d'abord et avant tout par l'emplacement physique. Un magasin bien placé, sur une artère très commerçante en centre ville ou dans un centre commercial, et vous disposez d'un bon trafic naturel. L'idée est de "poser" le magasin là où il y a du trafic.
A ce constat simple sur le trafic dans le retail physique, on peut en ajouter 2 autres :
- 1) Le coût du trafic est fixe, il est quelque part inclus dans le loyer ou le pas de porte. Suivant les secteurs, cela variera entre disons 2 et 10% du CA.
- 2) L'intensité du trafic - liée à la qualité de l'emplacement - ne varie que lentement dans le temps. Une bonne artère commerçante ou un centre commercial dynamique ne vont pas subitement perdre leur attrait.
En gros, toutes autres choses étant égales par ailleurs, le retail physique repose sur une mécanique assez basique en matière d'acquisition de trafic : l'emplacement, l'emplacement et l'emplacement...
Une fois qu'on a trouvé le bon emplacement libre (et ce n'est pas toujours simple, ie Apple Store à Paris), on a des investissements d'ouverture non négligeables, mais après on bénéficiera d'un trafic important sans rien faire de plus - ce qui n'empêche pas des actions commerciales pour booster encore plus fort - si ce n'est payer son loyer.
Bienvenue dans le monde joyeux de l'e-commerce, qui est exactement à l'opposé :
Si la création d'un magasin web ne coûte pas très cher, et moins cher que dans le physique (au pire on va dire 100K€, et là je suis généreux), c'est après que les choses se corsent : alors que dans le retail physique on pose le magasin là où il y a du trafic, sur le web on doit passer son temps, et son argent, à créer ce trafic qui n'existe pas à l'état naturel. Et de plus :
- Le trafic peut et va provenir d'une quasi infinité de sources (référencement naturel, mots clés dans moteur de recherche, positionnement dans moteurs de shopping, affiliation, positionnement dans une "galerie marchande virtuelle", bannières, etc).
- La volumétrie et le coût de ce trafic sont non seulement très variable selon les sources, mais ils varient également énormément dans le temps en fonction de multiples paramètres. Une source qui est à un certain coût et une certaine volumétrie à un instant t, peut valoir 2 fois plus ou être divisé par 2 quelques mois plus tard. On peut aussi mettre la dedans les Google dances, qui feront chuter du jour au lendemain votre référencement naturel...
Finalement, la création de trafic en e-commerce c'est la science de poser et gérer de façon fine, précise et réactive de très nombreux petits canaux d'acquisition dans le cyber-espace, qui peuvent se compter d'ailleurs en millions (ie Ebay ou Amazon). Cette problématique d'acquisition de trafic sur le web est donc infiniment plus complexe et demande infiniment plus d'analyse et de réactivité que dans le monde physique.
Comptez les fois où vous tombez sur un lien Amazon, Ebay ou Apple, et vous en déduirez aussi que belle marque reconnue ou pas, la problématique ne change pas : sur le web, il faut être et se rendre visible le plus souvent possible, et cela a un coût important ! La maîtrise de ce coût est une chose très complexe qui demande des compétences et des outils particuliers, et il n'y a aucune raison que cela change, bien au contraire.
C'est donc aussi pour cela que, fondamentalement, je pense que le canal e-commerce est vraiment très spécifique et ne peut être géré efficacement que par des spécialistes globaux de ce territoire, comme il y a des spécialistes de tel ou tel territoire géographique.
L'e-commerce présente peu de barrières d'entrée, et c'est ce qui le rend très trompeur. Car la vraie valeur, les vrais coûts et la vraie problématique ne reposent absolument pas dans la création du magasin et son emplacement quelque part, mais bien dans la création du trafic et la gestion au jour le jour.
Finalement, le concept de "groupe de distribution e-commerce" que développe Inspirational Stores repose sur cette conviction fondamentale que l'e-commerce est un canal de distribution très spécifique, qui le restera, et qui demande des compétences, des outils et un mindset bien particulier que nous avons développés.
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