Alors qu'Aston volait de succès en succès ces dernières années après être passé (une nouvelle fois), au bord du gouffre au début des années 90, battait des records de vente (7500 véhicules en 2007), inaugurait son propre centre de style (décembre 2007), étendait son réseau de distribution, ouvrait de nouvelles concessions en Russie et en Chine (2007 et 2008), présentait de nouvelles voitures excitantes (DBS, One-77, Vantage RS, etc), prévoyait de relancer la marque Lagonda, les affaires se sont subitement et violemment corsées fin 2008 avec la brutale crise bancaire, boursière et économique qui n'épargne quasiment personne.
En novembre, les ventes d'Aston au UK ont chuté de plus de 70% et en décembre la chute était de 33%.
Début décembre, on apprenait qu'Aston allait se séparer du tiers de ses effectifs, coupe énorme pour une société.
Ce week-end, le Chairman d'Aston, David Richards, a annoncé que si la firme n'avait pas de problèmes financiers immédiats, elle pourrait au cours de 2009 ne pas être en mesure de respecter les engagements contractés avec les banques (covenant breach). L'annoncer maintenant revient sans doute à dire que ça va très certainement arriver.
Quand une firme emprunte à une banque, le prêt est assorti de tout un tas d'engagements (ie des critères de rentabilité, de liquidité, etc) qui, s'ils ne sont pas respectés, peut permettre à la banque d'exiger immédiatement un certain nombre de choses afin de se protéger.
Un covenant breach peut ainsi amener les banques à demander le paiement immédiat du solde des emprunts et donc, au pire si la firme n'est pas en mesure de rembourser et si ses investisseurs ne peuvent remettre de l'argent frais, elle peut alors être acculée au dépôt de bilan.
L'un des actionnaires d'Aston, Investment Dar, qui avait annoncé son intention de vendre 20% de sa participation dans Aston, a également récemment annoncé qu'il devait lever 1Mds$ pour refinancer sa dette court terme. Il ne faudra donc pas trop compter sur lui vraisemblablement pour remettre au pot si besoin.
On en est pas encore au stade critique chez Aston Martin, mais ça devient visiblement chaud. Et à cela viennent aussi s'ajouter les désordres monétaires avec une Livre Sterling ayant tellement baissé depuis 12 mois que les Aston sont bien moins chères au UK que sur le Continent ! Mais Aston ayant de nombreux coûts en €, à commencer par les moteurs (produits en Allemagne), il y a de fortes chances qu'elle perde maintenant de l'argent sur le marché intérieur britannique, qui il y a peu faisait le 1/3 de ses ventes.
Les choses ne sont pas simples pour les grands constructeurs actuellement, ils connaissent tous des problèmes, même les meilleurs d'entre eux (ie Toyota qui va diviser par 2 sa production pendant 3 mois au Japon, Porsche dont les ventes sur le marché clé américain baissent de plus de 30%, BMW qui met au chômage partiel 26.000 employés pendant 2 mois, etc), et pour un "petit" constructeur indépendant comme Aston Martin, cette crise va nécessairement être l'épreuve de vérité sur la pérennité du modèle.
Cette épreuve arrive vraisemblablement bien plus vite que ce que ne pouvaient imaginer les repreneurs en mars 2007. Aston est rentable depuis plusieurs années, mais les réserves ne sont certainement pas colossales.
Ceci étant, fondamentalement, Aston est certainement en meilleure posture actuellement qu'elle ne l'a jamais été : une très belle gamme de produits, une usine ultramoderne (elle n'a pas 5 ans), un réseau de distribution large, un management de grande qualité, etc
mince alors
de beaux modèles, un staff de qualité, un beau réseau mais pas adaptés à la demande...
un échec pour l'instant donc et face à cette crise !
Posted by: laurents91 | January 21, 2009 at 02:56 PM
Non, non, ne parlons pas encore d'échec ! Et les temps sont très durs pour TOUS les constructeurs. Ce qui revient à dire que personne n'est "adapté" à la demande.
La chute du marché a été incroyablement violente, -30 à -50% en moyenne, aucune entreprise industrielle ne peut s'adapter aussi vite.
En virant 30% de ses effectifs, Aston a réagit très vite.
Le problème d'Aston sur lequel je pointe dans le cas présent est un problème "technique" - lié à leur dettes bancaires - et non pas fondamental sur l'adéquation ou pas de leurs produits.
Par ailleurs, dans le monde du LBO aujourd'hui, plus d'1 sur 2 breach ses covenants...
Donc, pas de dramatisation ni d'extrapolation !
Posted by: Michel de Guilhermier | January 21, 2009 at 03:02 PM