Au delà d'un pouvoir d'achat globalement en baisse, de manière importante aux US et au UK mais moins chez nous, je crois surtout qu'il y a 2 phénomènes qui se conjuguent et qui expliquent la baisse actuelle de la consommation :
- Une crise de confiance sur l'avenir, alimentée notamment par la montée du chômage et les désordres financiers qu'on a vécus depuis quelques mois, impactant notamment les biens lourds en valeur (automobile, immobilier, produits électroniques coûteux, etc)
- Surtout, une modification du comportement d'achat et de la perception de la valeur des choses : les soldes, qui ont démarré semaine dernière en Lorraine, ont battu des records, les ventes privées cartonnent, et le sondage actuel du Figaro indique que les 2/3 des répondants ont cette année attendu les soldes pour acheter !
Cet élément me paraît fondamental : les consommateurs refusent tout simplement de payer le prix facial indiqué, trop élevé à leur yeux. Et c'est vrai que ces dernières années de nombreux producteurs ne se sont pas privés d'augmenter fortement leurs prix.
Réalité fondamentale : le vrai prix d'un bien c'est celui sur lequel se mettent d'accord 2 parties (également vrai pour une entreprise). Quand une marque vend 50 à 60% de ses produits à -30 à -60%, le vrai prix, accepté par les consommateurs, ce n'est clairement pas le prix facial.
De plus, demander à un consommateur de payer 100, ce alors qu'en attendant un peu il l'aura à 50, ne peut pas fonctionner très longtemps. Progressivement, il modifie ses habitudes et n'achète plus au prix facial, et ce comportement se renforce lors d'une crise telle que celle que nous traversons.
On vit ainsi actuellement dans un monde artificiel, avec des prix faciaux qui ne veulent souvent plus rien dire du tout, et ne servent que de support à faire une remise substantielle. Et ces prix faciaux élevés font tout simplement les choux gras des soldes et des ventes privées qui remettent les prix à des niveaux perçus comme acceptable par les consommateurs.
Aux US, Walmart, avec depuis longtemps une politique de "l'everyday low price", que j'assimile à une politique de vérité des prix, surperforme actuellement largement tout le retail américain, et ce n'est pas une surprise.
S'il reste toujours une petite fraction d'acheteurs totalement price insensitive pour une raison ou une autre, ie urgence de l'achat et manque de choix local, elle est faible et la majorité des consommateurs achète maintenant au "vrai prix" qu'ils perçoivent, prix retrouvé durant les soldes et les ventes privées.
Un exemple frappant pour illustrer le phénomène : celui de la chemise en ligne. Je ne vais citer aucune marque mais je suis certain que certains lecteurs du blog vont comprendre...
Il y a des marques, plutôt connues avec des dizaines de magasins bien situés dans le monde physique, qui ont - ou ont eu - des sites marchands ne faisant pas des merveilles (ie quelques commandes par jour), mais qui réalisent entre 500K et 1M€ sur une seule vente privée de 24h. Conclusion pragmatique : ce niveau de CA montre que la marque garde bien son attractivité produit, mais clairement pas au prix facial demandé.
Et la raison en est simple, on trouve sur le web dans ce secteur des concurrents extrêmement performant vendant des produits comparables en qualité (et pour cause, les fils utilisés et le producteurs sont souvent les mêmes) pour 2 fois moins cher !
En clair, sur le web où le consommateur a sous les yeux un choix large de producteurs et peut comparer immédiatement les offres, le positionnement prix facial de ces marques du monde physique est tout simplement inadéquat.
A moins de changer dramatiquement leur politique de prix "fond de rayon", ce qui est difficile car il faut être cohérent avec le réseau physique et ses prix plus élevés, leur boutique online ne fera pas beaucoup de ventes en dehors des périodes "spéciales".
Bottom line, les marques qui performeront sur le web demain ne sont ainsi pas forcément les leaders du monde physique d'aujourd'hui, qui tiennent bien souvent leur force plus du nombre et de la qualité de leurs emplacements physiques que de l'unicité ou du caractère exceptionnel de leurs produits.
Sur le web, il n'y a pas réellement d'avenue Montaigne, de Champ Elysées ou de Velizy 2, le consommateur a le don d'ubiquité, il se déplace d'un magasin à l'autre d'un clic de souris, il compare d'un clic de souris, sans effort et sans coût. Et cela change absolument tout.
Certes, il y a bien sur le web des market places mises en place par les grands acteurs de l'e-commerce (Amazon, PriceMinister, RueduCommerce, etc), mais elles n'ont absolument pas le même grip sur le consommateur, qui peut toujours aussi facilement se déplacer ailleurs et comparer les produits et leurs prix.
Merci Internet au final, c'est quand même ce media qui amplifie formidablement les possibilités de comparaison de prix et finalement oeuvre à les faire baisser !
internet peut faire également monter les prix !
par exemple les place de concerts ou de grands matchs qui se vendent très rapidement et ensuite se retrouvent sur eBay beaucoup, beaucoup plus cheres et trouvent pourtant preneurs...
Posted by: Daniel Broche | January 06, 2009 at 08:40 AM
Certes ! Un peu marginal toutefois
Posted by: Michel de Guilhermier | January 06, 2009 at 08:57 AM
tout comme les actions et parts d'entreprises
le prix facial ne veut plus rien dire et est basé sur de l'argile depuis belle lurette...
disons que tant que ça arche on tire sur la corde...
sinon pour en revenir à la marginalité d'un comportement, bien souvent il suffit d'une minorité pour créer un prix moyen, et c'est valable dans tous les domaines... la bourse mais aussi pour bien de produits dediverses marques
La valeur d'un capital et d'un objet est bel et bien une notion artificielle, heureux de voir que vous partagez finalement ce raisonnement
Posted by: laurents91 | January 06, 2009 at 11:31 AM
Bonjour,
encore un article qui me plait bien, bravo!
Je suis parfaitement d'accord avec vous sur le fait que bien des enseignes ne tirent une grande partie de leur succès que de leurs emplacements (ie dans le sport retail: décathlon dont l'offre produit de marques est réduite à peau de chagrin mais qui truste quand même le marché grâce à un réseau exceptionnel). En fait, la guerre qui se joue est aussi celle des réseaux : l'un physique et qui a peut être trouvé ses limites, l'autre virtuel et dont les limites sont encore à chercher.
Posted by: Brice | January 06, 2009 at 03:01 PM
pas si marginal que ça du tout en fin de compte
sur le neuf internet presse le prix à la baisse alors que sur l'occasion c'est plutot le phénomène inverse qui se produit, démonstration faite via eBay, Price & cie
La logique de tout cela c'est qu'à bien comparer la valeur utilitaire des produits d'occasion est souvent proche de celle du neuf sauf pour le consommable ou les produits a court cycle de vie (ie techno)
la marque a donc a se poser la question de sa différenciation avec la concurrence mais aussi le cycle de vie de son produit
Dans certains secteur du luxe le probleme va etre de plus en plus présent. Les accusations de contrefaçons sur ebay sont une adroite maniere de combattre les dérégulations du marché mais à terme certaines positions ne sont pas tenables
Posted by: Daniel Broche | January 06, 2009 at 05:56 PM
La 'faillite' du prix fixe ne date pas de la crise actuelle.
En 2002, le New York Times publiait les statistiques suivantes : les biens vendus en promo représentent 30% des ventes de détail, contre moins de 10% dans les années 70.
L'intérêt fondamental d'Internet n'est pas de faire baisser les prix, ou de les rendre uniformes mais de les optimiser ((Cf. Baker, V Marn et Zawada, Harvard Business Review, 2001...!)
Autrement dit, de faire en sorte que chaque consommateur ait son Avenue Montaigne ou son Vélizy2, indépendamment de l'endroit où il vit...
Posted by: Emmanuel Marot | January 07, 2009 at 05:31 PM
Tout a fait d'accord avec l'auteur du billet, merci a internet de faire baisser les prix.
Posted by: Nom d'un chien | February 06, 2009 at 03:23 PM
Oi, Boa tarde Com certeza, falar sobre o assunto nem sempre pode ser tratado de maneira igual, pois em qualquer lugar as pessoas costumam ter um ponto de vista diferente. Bem legal este artigo - Alex
Posted by: Uniformes | November 10, 2011 at 05:50 PM