Après les succès de Netflix et VistaPrint, 2 e-commerçants pure-players d'un type un peu particulier qui résistent très bien à la récession, retour sur l'e-commerce américain en général, et là c'est bien moins rose.
La dernière fois que j'en avais parlé, c'était à l'occasion du Cyber Monday (ICI). Ses chiffres n'avaient pas été mauvais (850M$ sur une seule journée, +15% vs 2007), mais j'avais explicitement mis des réserves sur l'interprétation de ceux-ci et indiqué que comScore prévoyait d'ailleurs une croissance flat sur l'ensemble de la Xmas season 2008 vs 2007
On vient d'avoir les chiffres...et on est pas du tout dans une croissance flat : l'e-commerce américain a régressé de 3% vs 2007 sur la période novembre-décembre. Vu la courbe depuis le printemps dernier (ci-dessous), on pourra dire que c'était un peu prévisible...
Plusieurs points intéressants :
- C'est à peine mieux que le retail physique qui a fait -4,4% sur cette même période.
- C'est une détérioration largement plus forte que dans le retail physique : alors que ce dernier est passé d'une croissance de +2,5% en 2007 à une baisse de -4,4% en 2008, soit 6,9 points de baisse, l'e-commerce est passé lui d'une croissance de +19% à uen baisse de -3%, soit 22 points de baisse.
- Certains segments font pire que le retail physique, autrement dit l'e-commerce a perdu de la part de marché : c'est le cas du mobilier, avec une décroissance sur le web de 14% contre 13% dans le retail physique.
- De manière générale, il ne fait pas bon de vendre du luxe actuellement aux US ! Les luxury stores (Ie Saks, Neiman Marcus, etc) sont en baisse de 17% vs 2007 à périmètre comparable, et sur le web la catégorie "Montres et Bijoux" est en baisse de 24% sur 2007.
Attention, ces chiffres déprimants ne concernent que les US, en France les chiffres sont sortis récemment et l'e-commerce reste encore en forte croissance, pour le moment.
Le consommateur américain subit de plein fouet la crise, le chômage est monté très vite ces derniers mois (on est maintenant au plus haut depuis 16 ans), il épargne maintenant bien plus et son budget de consommation s'est fortement contracté.
Pour avoir une chance de le capter, les retailers doivent recourir à des promos massives (-50% est un minimum) et ceux qui ne se résolvent pas à le faire chutent dramatiquement (ie Abercrombie & Fitch en baisse de 25% alors que Aeropostale est en hausse de 6%, à périmètre comparable).
Vu ce que le consommateur américain endure actuellement, il n'est certainement pas prêt à réouvrir fortement son portefeuille dans les mois qui viennent, je m'attends donc à plusieurs trimestres de consommation déprimée.
Ceci étant, les retailers (physiques ou web) qui marcheront le mieux dans cette crise, ce sont aussi ceux qui sauront rester proche de leurs meilleurs consommateurs (ceux qui dépensent le plus) et s'adapter à leurs besoins (merchandising et price points). Plus que jamais, un vrai et profond focus consommateur est indispensable.
Une relation et une compréhension consommateur ça se travaille jour après jour, et c'est l'un des pieds essentiels du commerce, mais je ne fais là que redire une vérité basique !
2 autres piliers du retail que j'ai donnés et rabâchés depuis longtemps :
1) Rester frugal, contrôler tous les coûts, tracker et éliminer ceux qui ne servent à rien. En période d'euphorie et de croissance, les coûts ont une forte tendance naturelle à s'envoler. Aujourd'hui, il faut comprimer tous les coûts qui n'ont pas d'impact sur le consommateur.
2) Etre obsédé par le tiroir-caisse jour après jour, tout faire pour l'entendre sonner plus souvent en se battant pour faire rentrer les ventes. Ce qui passe par la case "comprendre intimement le consommateur et ses besoins, lui parler, le convaincre, etc.
Dans cette période très particulière de récession, on ajoutera aussi bien entendu que cash is king pour de nombreux retailers américains qui, étranglés par des dettes lourdes, flirtent avec le dépôt de bilan. L'économie repartira...en 2010, progressivement, mais faut tenir jusque là.
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