Petite pensée ce matin, c'était le 26 juin 2000 très exactement que le site Photoways.com ouvrait ses portes virtuelles !
Alors tout d'abord un très bon anniversaire à Photoways, et petit flash-back sur les débuts de l'aventure et les personnes qui y ont joué un rôle !
Peut-être y a t-il comme lecteurs de ce blog certains des 1ers clients ?
Ce qui suit est un peu long, mais je n'avais encore jamais fait cet exercice de reprendre clairement l'histoire des débuts de Photoways, avec leur lot de problèmes, et les composantes humaines et capitalistiques en détail. Après tout, ce sont les 2 éléments qu'il faut pour créer une société, alors ça vaut le coup d'exposer comment ça c'est passé pour Photoways à l'époque.
L'idée de créer un service photo en ligne avait concrètement germé dans mon esprit durant l'été 1999, en lisant que Jim Clark, l'iconique entrepreneur de la Silicon Valley (Netscape, Silicon Graphics, etc) venait de créer Shutterfly, service de tirage photo en ligne (aujourd'hui leader du secteur). On était au coeur de la bulle, les arbres devaient monter au ciel, il fallait donc que je me lance vite et si Jim Clark se lançait lui la dedans, ça devait être bon ! Rien de génial ni d'original donc, je reprenais juste un concept américain, mais encore fallait-il l'exécuter correctement.
J'y croyais aussi pour une raison simple, j'étais client à l'époque d'un tel service aux US (c'était printroom, qui existe toujours mais qui semble s'être spécialisé dans le professionnel) et je trouvais le principe aussi efficace que qualitatif ! L'imprimante couleur à la maison ne m'avait jamais convaincu (et de fait ma 1ère imprimante couleur ne date que de janvier 2009 !).
Mais j'avais aussi en parallèle à développer Burlington France, ma société de due diligences stratégiques pour le comptes d'acteurs du LBO qui cartonnait à l'époque (1999-2000 furent de très belles années pour le monde du LBO), et je devais aussi superviser le Groupe Provifruits à Lyon, que je n'avais pas encore revendu (c'était en finalisation).
Pris par ces autres activités, je devais donc trouver un collaborateur pour m'accompagner dans le lancement et piloter opérationnellement les débuts en tant que "Directeur Général".
Initialement, je ne pouvais pas être opérationnel à temps complet, l'idée était que j'oeuvre en tant que Président, pilotant la stratégie, organisant les levées de capitaux (4 petites en 15 mois entre janvier 2000 et avril 2001, voir ci-dessous), tenant bien sûr les cordons de la bourse, négociant les contrats importants, et décidant ou
supervisant les grands choix avec le DG opérationnel.
Par le biais d'un cousin qui me l'a présenté parce que je lui avais dit que je cherchais quelqu'un, j'ai recruté Miguel Espada, jeune diplômé de 26 ans à l'époque, et lui ai proposé de m'accompagner en tant que bras droit, pilier opérationnel, pour monter et développer ce service de tirage photo en ligne. L'idée l'a séduit, et pour le motiver je lui ai proposé - trop vite - de s'associer et de lui octroyer 25% du capital : plus précisément je lui ai même prêté l'argent (50KF) pour qu'il l'investisse !
Avec un salaire correct pour l'époque (18KF/mois) pendant que je faisais le sacrifice de ne pas me payer...
Miguel recruta un 3ième homme, qui travaillait à l'époque chez Photo Service, Laurent Exbalin, qui pris aussi quelques % de capital (à travers un prêt également). Et off we started tous les 3 à l'automne 1999, plein d'enthousiasme et d'espoir, avec une SAS à 250KF de capital : j'en avais un peu moins des 3/4, Miguel le 1/4 et Laurent 2 ou 3%.
Pendant les 4 ou 5 1ers mois, Photoways fut hébergée chez Burlington France (gratuitement, donc avec les sous d'une autre de mes poches !) au 121 avenue des Champs Elysées
(!), ce qui me permettait d'être au contact direct de Miguel qui prépara notamment les cahiers des charges et travailla sur la définition du service. C'est aussi sur les Champs Elysées que j'ai ainsi reçu les fournisseurs, négocié les appels d'offre et ai signé les grands contrats initiaux : la machine de tirage photo (Fuji
Frontier), la SSII qui allait développer le site (Studio Grolier
associé à Valoris), l'hébergeur (PSINet), etc.
Début janvier 2000, j'organisais la 1ère levée de fonds en appelant principalement nombre de mes amis entrepreneurs ou business angels de l'époque, ce fut sans problème. En avril 2000, le krach du Nasdaq était passé par là (en mars), mais ce fut encore facile car on croyait que ce n'était qu'une correction, la valo avait même quadruplé depuis janvier ! C'est durant la levée d'avril 2000 que sont arrivés les fonds Odyssées Ventures (qui se créait juste, je crois même qu'on était leur 1er investissement) et Cyber Capital (Pierre Sissmann et Dominique Bourse, 2 ex excecutives de la Walt Disney Corp, présent aussi dans chapitre.com et notrefamille.com), mais avec des sommes de type "business angels", ie quelques centaines de KF.
Il a fallu encore relever en octobre 2000, là ce fut très difficile mais en mettant beaucoup de ma poche j'ai emporté l'adhésion; puis encore en avril 2001, et là ce fut vraiment l'enfer ! Mais c'est cette bien dernière levée de 5MF, principalement avec le VC Olivier Hua d'Innovafrance, qui nous a définitivement sauvé, nous donnant de quoi tenir 24 mois environ, un vrai bonheur et une grande sérénité vs les autres levées qui nous donnaient des lucarnes de vie de quelques mois seulement, vraiment stressant ! Merci Olivier (que je vois de temps à autres aussi) de ta confiance, même si Photoways te l'a bien rendue (x8 ou 9 quand même en 4 ans !).
A la fin de l'été 2000, à court d'argent avant la levée d'octobre 2000, je suis allé faire la tournée des grands fournisseurs à qui nous devions pas mal (Grolier, PSINet, etc), pour leur signifier qu'ils devaient vite abandonner une partie de leurs créances car sinon nous devions mettre la clé sous la porte ! De facto, si les créances avaient été maintenues, c'était alors ma responsabilité de Président de nous mettre en cessation de paiement ! PSINet, qui avait elle-même des problèmes, fut très compréhensive et je remercie Bertrand Usunier, à l'époque PDG de PSINet France, avec qui je suis encore en contact aujourd'hui. Quelque part, leur grande souplesse financière a sans doute sauvé Photoways !
Grolier/Valoris fut bien moins souple, mais j'ai obtenu un petit quelque chose, et je suis aujourd'hui toujours en contact avec le très bon chef de projet de l'époque, Juan Antonio Hernandez. Il s'est lancé depuis quelques années dans l'entrepreneuriat, bravo !
Opérationnellement au niveau de l'équipe, malheureusement, grosse déception : si Miguel a contribué aux débuts du service et à poser les toutes 1ères pierres, il n'a pas fait l'affaire et il quittera rapidement l'aventure, dès la fin 2000, quand l'entreprise ne faisait peut-être que 2 ou 3
commandes par jour et que le plus dur restait à faire : tenir ! Mais 5 ans plus tard, lors de la revente partielle (juillet 2005), il fit du x30 environ sur l'argent que je lui avais initialement prêté pour avoir le quart du capital. C'est ce qu'on appelle un court passage très fructueux !
Considérant que Miguel ne serait pas l'homme de la situation ni le pilier dont j'avais besoin, j'ai du très vite chercher, dès février ou mars 2000 en fait, un Directeur Général plus expérimenté via un chasseur de tête (Ray & Berndtson). Ce fut James Rebours, un ancien manager d'Infogrames et de Konami (et qui a après fait une très belle carrière au sein de Sega), qui arriva à la mi juillet juste après l'ouverture du site.
Epaulé par mon ami Martin Genot (que je connais depuis 1986 !), arrivé lui début 2001 (initialement à temps partiel), James supervisa efficacement et rigoureusement les opérations Photoways au quotidien depuis la mi juillet 2000 jusqu'à la fin 2001.
Et début 2002, suite au départ de James (qui, me disait-il, Photoways aura été "une des expériences les plus enrichissantes sur le plan professionnel", c'est Martin qui prendra alors la direction générale et joua un rôle capital jusqu'à la fin de l'aventure pour nous fin 2006.
Pour ma part, l'arrivée full time opérationnelle fut le 1er janvier 2003, avec dès lors un sacré tandem MG/MdeG super efficace et complémentaire, qui est le même à l'origine d'Inspirational Stores !
A noter qu'en septembre 2000, suite au départ de notre 1er opérateur de laboratoire, Serge Piotin, attiré par un concurrent qui lui offrait 2x plus de salaire que nous, nous avons recruté Didier Floury...qui est toujours aujourd'hui chez Photoways et est "Responsable Production" ! C'est le plus ancien salarié, il va bientôt fêter ses 10 ans la-bas ! Didier est d'une loyauté et d'un professionalisme hors norme et il a joué un rôle capital dans la qualité du tirage photo Photoways. Didier, si tu me lis, un grand merci, Photoways te doit sincèrement beaucoup !
Voila pour les pionniers des débuts Photoways !
Economiquement, le moins que l'on puisse dire, c'est que les débuts en 2000/2001 furent très difficiles, le marché n'était juste pas là : peu d'appareils numériques dans la nature, pas de haut débit, et personne ne nous connaissait. A l'époque, le grand sujet était aussi de lutter contre les coupures au téléchargement, chaque photo mettait entre 1 et 3 minutes à s'uploader, avec une liaison RTC à 33 ou 56K ! Un autre temps...
18 mois plus tard, fin 2001, nous ne faisions encore que quelques commandes par jour (cf graphe plus bas).
Nous nous sommes accrochés, pragmatique, frugal (salaire 0 pour moi en 2000 et 2001, puis 1500€/mois en 2002) et surtout extrêmement attentif aux besoins et à la problématique de nos clients, avec une vraie proximité relationnelle.
Financièrement, la très difficile levée de 800K€ (5MF tout rond) d'avril 2001, si elle m'a considérablement dilué, nous a aussi permis de vivre et de tenir en nous donnant suffisamment de visibilité. Ce fut capital.
Et ce qui nous donnait l'énergie de nous accrocher, c'était la certitude de faire des clients heureux, tel ces emails reçus en 2002 :
« ...votre prestation est de loin la meilleure et donc je vous en félicite et je vous encourage à poursuivre cet effort pour garder voire même distancer vos concurrents [...] Votre prestation est de qualité au point que je me sens obligé de vous faire de la publicité, et c’est presque une fierté pour moi. »
ou encore :
"Bonjour, J'ai découvert récemment la photo numérique et surtout j'ai découvert votre site.
Je viens de recevoir mes premières photos qui ont été prises avec un appareil dont la qualité n'est pas exceptionnelle mais je suis particulièrement étonné et heureux de constater que les photos que j'ai reçues sont quant à elle d'une excellente qualité.
D'autre part, le service est très rapide et je dois dire que je suis très satisfait d'avoir passé commande chez vous, je recevrai prochainement un appareil photo pense de bonne qualité le Canon Powershot G2 pro, je poursuivrai bien sûr le développement de mes photos sur votre site que je ne manquerai pas de conseiller mes amis.
Encore merci, et à bientôt. Bien sincèrement"
Et encore :
"Bonjour, Je viens de recevoir ma première commande (72 heures après mon téléchargement...un record absolu !) et je dois dire que je suis épaté par la qualité des tirages. Votre service est tout simplement parfait : un tirage de qualité, au prix le moins cher du marché et en un temps record ! Vous avez acquis en moi un client assidu, et un client qui fera une publicité plus que positive à son entourage !"
Outre la qualité et la rapidité du traitement des commandes, le service client était l'un de nos grands points forts, autre signe de notre customer-centrism :
"Bonjour,
J'ai pas l'habitude d'ecrire des mails mais si j'etait président du comité des site internet, j'vous en offrirai la palme; en tout les cas celle du service client :D bonne continuation".
Nos clients, heureux, revenaient donc, et nous en acquérions tous les jours de nouveaux, au rythme de plusieurs dizaines par jour à l'automne 2002, surtout par bouche à oreille, preuve de la satisfaction de nos clients.
Et, progressivement, avec des clients qui reviennent et de nouveaux clients qui arrivent tous les jours, le business grossit, grossit...et la courbe de la marge brute finit par couper celle des coûts fixes !
Ci-dessous la croissance du nombre de photos téléchargées par jour, entre juillet 2000 et septembre 2002. J'avais fait cette slide pour préparer une petite levée de fonds qui a eu lieu en novembre 2002, ce afin d'accélérer la croissance :
Sympa ce genre de courbe ! On voit la stagnation sur 2000/2001, et l'explosion en 2002, également du au fait que j'avais décider, après un test, de baisser le prix du tirage 10x15 de 3,5FF à 2FF.
Customer-centric dès l'origine, nous avions alors une vue très claire de notre positionnement :
Le marché est bien arrivé en 2002, puis s'est accéléré en 2003. Photoways fut rentable dès juillet 2003, est devenu le plus gros acteur européen dés 2004, très rentable alors (environ 10% de résultat net) et quand j'ai cédé un bloc majoritaire en 2005 nous faisions déja plusieurs milliers de commandes par jour.
Aujourd'hui ce sont des pointes à 3 Millions de photos reçues par jour et pas loin des 100M€ de CA cette année, soit quelques millions de commandes...
Mais ce n'est plus mon histoire !
Ceci étant, j'ai aujourd'hui le même objectif, contribuer à faire d'Inspirational Stores une société de l'ordre de 100M€ de CA en 2014 !
C'est l'objectif, la route est longue, mais elle sera excitante, passionnante et belle !
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