Amusant de reprendre le même titre de post qu'il y a 3 mois, ICI !
En juillet dernier, suite aux résultats trimestriels du 2ieme trimestre calendaire (mais 3ieme fiscal, les exercice d'Apple commencent le 1er octobre) l'action s'était repliée vers les 570$, je conseillais alors vivement d'en profiter. Quelques semaines plus tard, elle dépassait les 700$ et là je conseillais d'être prudent...
On a aujourd'hui la même configuration, et je ne peux que conseiller la même chose : sous les 600$ et a fortiori vers 550$ c'est une super opportunité, et si l'action venait à booster trop vite au dessus des 700$ il faudrait s'alléger fortement. Mon analyse est simple et toujours la même depuis plusieurs mois : en fonction du marché des tablettes et des smartphones ainsi que des performances propres d'Apple, je vois l'action entre 550 et 1100$ dans 3 ans, donc à 550$ aujourd'hui on ne prend strictement aucun risque, et plus on monte haut et vite vers le point max, plus le risque devient important.
Apple a annoncé jeudi soir dernier ses résultats du Q4 fiscal 2012, et ils ont légèrement déçu. Non pas qu'ils soient mauvais - une croissance sur 2011 de +27% du CA et de +24% des profits ainsi qu'un taux de rentabilité nette de 22,8% du CA sont de nature à faire pâlir 99,9% des entreprises, surtout dans le contexte actuel - mais le marché s'attendait à un peu mieux.
Dans le détail :
- La ligne iPhone reprend de très belles couleurs avec un excellent +58% en CA sur le même trimestre 2011 avec 27M d'unités vendues. Ce alors que l'iPhone 5 n'est arrivé que le 21 septembre et fut fortement limité au niveau de l'approvisionnement. Les détracteurs et anti-Apple primaires (il y en a qui lisent ce blog et qui commentent !) qui se réjouissent d'un pseudo "écroulement" de l'iPhone en sont actuellement pour leurs frais.
- L'iPod continue voire accélère sa descente avec 5,3M d'unités et -26% de CA. Arrivé en 2001, il a progressé jusqu'en 2008 pour décliner depuis. En 2013, il ne devrait sans doute s'en écouler que la moitié environ des volumes de 2008. L'iPod, qui a réalisé plus du 1/4 du CA d'Apple au milieu des années 2000, ne représentera alors qu'autour de 2% seulement du CA total. L'avantage, c'est que même quand il baisse de 20% d'une année sur l'autre, l'impact sur le bottom line total est marginal.
- La ligne Mac est en croissance d'un petit 1%, mais ceci est à mettre en contexte avec une contraction du marché de 8%. Pour le nieme trimestre consécutif, Apple gagne donc des parts de marché sur les PC.
- L'iPad fut en fait la grande déception, et donc la grande interrogation. Le marché attendait 17M d'unités et Apple n'en a vendu que 14M, en croissance de 26% seulement sur les 11M du Q3 2011, et +9% en valeur (voir post précédent, l'ASP a fortement baissé du fait de ventes en volume et de la présence de l'iPad 2 vendu 409$).
Alors, que penser de cette forte baisse du taux de croissance de l'iPad ? Comment l'expliquer, est-elle inquiétante ?
En fait, il faut un peu creuser les chiffres :
- Au 3ième trimestre 2011, Apple en avait vendu 11,1M, mais en même temps le stock dans le réseau avait progressé de 1,45M d'unités, ce qui veut dire que les "vraies" ventes aux consommateurs (dans le jargon du retail on appelle cela le "sell through") n'étaient que de 9,65M d'unités.
- Au 2ième trimestre 2011, Apple en avait vendu 9,2M, le stock dans le réseau avait progressé de 0,2M d'unités, ce qui donne un sell-through de 9M d'unités.
- Au 2ième trimestre 2012, Apple en a vendu 17M, avec un stock dans le réseau en croissance de 1,2M d'unités, ce qui veut dire que le sell-through était de 15,8M d'unités.
- Au 3ième trimestre 2012, Apple en a vendu 14M avec un stock dans le réseau en croissance de 200K unités, ce qui veut dire que le sell-through était de 13,8M d'unités
L'analyse quantitative juste est alors :
- Croissance YoY (year on year) de +43% (13,8/9,65) et non pas +26%
- Croissance séquentielle Q3 vs Q2 de -13% (13,8/15,8) et non pas -18%, à comparer au également modeste +7% du Q3 2011 vs Q2 2011
En clair :
- Le taux de croissance d'une année sur l'autre reste encore très élevé
- La décroissance séquentielle trimestrielle, normale puisque en Q2 on a eu l'effet d'intro du nouvel iPad n'est pas si dramatique que cela, même si elle est réelle.
Alors, il faut objectivement fortement relativiser la soi-disant contre performance, l'iPad n'est clairement pas en crise ni proche d'une quelconque saturation, et sa part de marché proche de 66% au dernier trimestre montre que le produit l'emporte toujours largement sur la concurrence.
D'ailleurs, il suffit de regarder autour de soi, chez les consommateurs comme dans les commerces et les entreprises, pour réaliser que les iPad prolifèrent. Mon passage éclair au Mondial de l'Automobile m'a d'ailleurs permis de voir que plus d'un stand sur 2 avait des iPad !
Ceci dit, on est en crise économique actuellement, l'aspect prix joue forcément un rôle, aussi l'arrivée de l'iPad Mini et le maintient au catalogue de l'iPad 2 à 399$ vont permettre à Apple de continuer à très bien vendre sa tablette. Dans mon post précédent je fais l'hypothèse que l'iPad Mini va en effet cannibaliser son grand frère, mais va surtout permettre d'étendre le marché cible. Et au final Apple devrait en vendre 60 à 80% de plus en 2013 qu'en 2012 (de 110 à 130M vs 70M cette année) et de faire 60-70% de CA en plus avec l'iPad.
Dernier point sur l'iPad, le toujours excellentissime Asymco a publié tout récemment le tableau des croissances Apple par ligne de produit et global (cliquez dessus) :
On peut y observer qu'au 6ième trimestre de commercialisation de l'iPhone, au Q3 2009 (encore un 3ieme trimestre), l'iPhone avait connu une certaine crise de croissance avec un tout petit +5% YoY seulement. Le dernier trimestre fut aussi le 6ieme trimestre de commercialisation de l'iPad...
Dernier point concernant les résultats, Apple a annoncé pour le dernier trimestre 2012 d'une part une marge brute prévisionnelle de 36% contre 40% qui avaient été annoncé pour le 4ième trimestre 2011, d'autre part un résultat par action de 13$ seulement, contre 13,87$ en 2011, ce alors que le CA est prévu en hausse de près de +15% sur 2011. En clair, on aurait un CA toujours en bonne croissance, mais également un problème de marge assez net.
La encore, il faut relativiser car Apple a donné des explications claires et totalement logiques : de fait, et c'est assez impressionnant, la quasi totalité de la gamme a été tout récemment raffraîchie (iPhone, iPad, Mac Book pro, iMac, iPod) et par conséquent les coûts de production sont forcément bien plus élevés temporairement.
Au final, Apple semble toujours solidement on track, rien dans la communication des chiffres de ce trimestre ne permet de s'inquiéter ou de s'enthousiasmer plus qu'il y a 15 jours ou il y a 1 mois ! Les interrogations fondamentales demeurent, mais c'est le temps seul qui apportera des éléments sur la taille des marchés et la pérennité de la position concurrentielle d'Apple. Que les énormes marges d'Apple s'effritent dans le temps, c'est possible, et même certain en fait, mais avec un P/E de l'ordre de 9 ex cash, cela est déja pris en compte.
Au niveau produit, car c'est quand même le point de base pour faire du chiffre, le rafraichissement de l'ensemble des gammes permet à Apple d'entrer dans ce Q4 avec les meilleures chances de réaliser un gros carton. Ils vont certainement faire autour de 55Mds$ de ventes, ce qui est largement plus que le CA de toute l'année 2009 !
Certains se plaignent qu'Apple n'innove plus assez, ne présente pas assez de ruptures technologiques. Mais bon, la aussi il faut raison garder. Il y a eu l'iPod en 2001, puis plus rien jusqu'en 2007 avec l'iPhone, puis plus rien jusqu'en 2010 avec l'iPad, et Steve Jobs était là. On ne peut pas non plus demander à Apple d'enclencher une révolution tous les ans, ni se dire que si Steve était là...
Et, écomiquement, faire bien évoluer ses produits tous les ans, au gré des avancées des technologies (sur les écrans, les processeurs, les batteries, etc), ne pas louper quelques grands virages (comme celui qu'ont loupé Nokia et RIM, sans compter Microsoft) sera suffisant pour rester dans le cercle des leaders. L'eco-système crée par Apple le lui permet.
Contrairement à RIM et encore plus à Nokia et mamie Microsoft, Apple a toujours quelque part un ADN de start-up, avec réactivité, flexibilité, remise en cause, frugalité, excellence et adaptation toujours bien ancrés à Cupertino, même sans Steve Jobs. Donc, non, et heureusement, Apple n'est pas en voie de "microsoftisation" comme j'ai pu lire.
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