Comme je mettais dans le post précédent, Warren Buffett pose : "it takes 20 years to build a reputation and a day to ruin it. When you acknowledge this, you act differently, always with integrity".
J'aurais envie de poser une autre loi dans la même veine :
"Un client pleinement satisfait, qui se sent et qui est respecté, qui n'est jamais déçu ni trahi, a pour l'entreprise qui le fournit une valeur énorme. Une fois qu'on reconnait et qu'on a bien compris cela, on agit en conséquence".
Reprenons (encore) Amazon. Mes extrapolations m'indiquent qu'un client revient en moyenne 4 à 5 fois par an et dépense autour de 300$/an chez eux. Avec une marge brute de disons 25%, cela représente 60$ de marge brute par an. Et si le client est pleinement satisfait, car il trouve tout ce dont il a besoin (produits, prix, service et respect), c'est un client gagné pour des années, et qui représente donc - sur la durée - des centaines d'€ de valeur (voire bien plus).
Posons donc les choses clairement :
Dans ce métier de l'eCommerce généraliste :
- Un client insatisfait, parce que le produit et/ou le prix et/ou le service était inadéquat, représente quelques € ou quelques dizaines d'€ de valeur nette. Et si on prend les coûts d'acquisition, toujours élevés en général, on peit en déduire que la valeur finale est proche de 0. L'entreprise ne crée aucune valeur et elle finira par disparaître ou se faire racheter.
- Un client pleinement et toujours satisfait représentera lui sur la durée des centaines d'€ de valeur nette.
Bilan, ne pas penser avant tout à l'intérêt et à la satisfaction de son client, ne pas agir et investir dans ce sens, et évidemment a fortiori le gruger plus ou moins consciemment et plus ou moins fortement, c'est juste être un gagne-petit !
Dans le monde de l'automobile, où certaines marquent gagnent en net jusqu'à plusieurs milliers d'€ par voiture, la fidélité engendrée par la satisfaction est un formidable levier de création de valeur. Un constructeur généraliste premium comme Audi gagne 2700€ net par voiture (4Mds€ de bénéfice net pour 1,5M de véhicules vendus), et chez Ferrari c'est 27K€ de profit net/voiture (plus de 200M€ de bénéfice net pour 7500 voitures/an) !
Il y a ceux qui visent un petit profit rapide, un one-off, et ceux qui pensent long terme en faisant tout pour la satisfaction de leurs clients. Sur le terme, ces derniers gagnent infiniment plus que les 1ers, qui d'ailleurs disparaissent tôt ou tard, d'une façon ou d'une autre.
Sur un autre plan, je me rappelle d'une quote de Bernie Ecclestone, le grand argentier et promoteur de la F1 moderne, milliardaire de son état, qui disait quelque chose comme : "devenir riche c'est facile, il faut simplement être fiable et ne jamais décevoir ses partenaires".
Echo parfait dans le monde des relations business et d'associés au "customer-centrism" qu'il faut avoir.
Il est clair que ce n'est pas en cherchant à faire un profit rapide sur le dos de ses partenaires d'affaires, et a fortiori sur le dos de ses associés en les grugeant, qu'on peut générer beaucoup de valeur sur la durée. La aussi, le one-off court terme est du domaine du gagne-petit sans bon sens (re, Barenton confiseur, "l'honnêteté est une preuve de bon sens").
Il y a ceux qui ne pensent qu'à faire des "coups", qui pensent à leur petit profit personnel court-terme sans se soucier des conséquences futures de leurs actions, et ceux qui pensent et bâtissent sur le long terme en adoptant forcément en permanence des comportements irréprochables et raisonnent vraiment win/win.
Il y a aussi un autre élément de bon sens : la vie est déja suffisamment intense et compliquée comme cela pour ne pas s'ennuyer à se demander si le partenaire est fiable et va vraiment délivrer ce qui est attendu (valable pour une entreprise, un collaborateur, un associé). Autrement dit tout humain normalement constitué met bien une prime à la fiabilité :
- En tant que consommateur/client, si on est systématiquement 100% satisfait de son marchand ou de son prestataire, on ne va a priori même pas regarder à côté car cela introduirait une notion de risque qu'on a pas envie de prendre. On pourrait même être prêt à payer un poil plus cher, car on sait que si jamais en passant par un autre prestataire il y a un bug cela coûtera finalement beaucoup plus cher. En exemple, je reste aujourd'hui totalement fidèle à Amazon, car je valorise fortement leur fiabilité. Je n'ai aucune envie de prendre le risque de perdre mon temps à gérer un problème avec une autre entreprise, car je connais la galère à communiquer avec la plupart des services clients.
- En tant qu'entrepreneur/homme d'affaires, le risque à s'associer avec une personne ou une entreprise malhonnête et/ou incompétente est extrêmement lourd car les enjeux se chiffrent en dizaines, centaines de milliers voire millions d'€ dans certains cas. Dans le cas d'association de personnes dans une société, se séparer d'un individu présent au capital qui n'a pas les compétences, l'honnêteté intellectuelle ou l'intégrité nécessaire peut être long et coûteux.
Good news cependant, dans ce monde internet, "connecté" où tout finit par se savoir car il y a de nombreuses traces, il est devenu relativement plus facile de séparer le bon grain de l'ivraie : le web, les forums et les sites d'avis consommateurs donneront déja un 1er aperçu de la qualité des produits et services d'une entreprise et du niveau de respect qu'elle a de ses clients (à prendre avec un grain de sel néanmoins), et quant à trouver des partenaires d'affaires et/ou des associés fiables, rien ne vaut une bonne due diligence humaine approfondie !
Dans le passé, les (rares) fois où je n'ai pas respecté cette règle de due diligence approfondie sur les partenaires d'affaires (collaborateurs, associés, entreprises), par excès de rapidité et d'enthousiasme, il m'est arrivé de le regretter, parfois amèrement. D'autant plus d'ailleurs que, par la suite, me rendant compte de mon erreur j'ai bien mené une due diligence qui en quelques coups de fil a remonté très rapidement des problèmes d'éthique et/ou de compétences, que je suis donc impardonnable de ne pas avoir vu avant ;-(
Dans toute due diligence, il faut bien entendu aller au dela de ce que les personnes ou entreprises concernées écrivent. Il est en effet si facile de se présenter positivement en embellissant la situation et de pipeauter allègrement.
Dites-vous aussi que les vrais malhonnêtes sont des spécialistes du pipeau, très forts dans le paraître et la poudre aux yeux, pour masquer leur incompétence et leur manque d'intégrité.
La réalité est simple : une personne ne se définit pas par ses écrits ou ses parôles, mais bien par ses choix et ses actes.
Donc, renseignez-vous scrupuleusement, et posez les questions incisives précises en allant voir et écouter de nombreux clients et/ou partenaires qui ont fait affaire avec l'entreprise ou la personne : est-elle fiable, est-elle honnête, est-elle vraiment compétente, pense t'elle win/win ?
Cela devrait vous éviter de nombreux déboires !
L'honnêteté, l'intégrité et l'éthique devraient d'ailleurs être les premiers critères à vérifier avant tous les autres, 100% agree avec ton post Michel !
Posted by: Rémy Bigot | January 04, 2014 at 10:01 AM
Excellent article. J'adorerai un article sur comment faire une bonne due diligence humaine approfondie.
Posted by: Pierre | January 04, 2014 at 12:14 PM
Pierre, c'est assez simple, il faut contacter les personnes et entreprises avec qui la personne ou l'entreprise en question a été associée ou à travaillé avec.
C'est d'ailleurs la due s'il que doit faire tout chasseur de tête sur une personne, en renseignant précisément sur le candidat.
Les VC recherchent aussi souvent des "références", ce qui est le bon sens même.
Posted by: MdeG iPhone | January 04, 2014 at 01:04 PM
100% d'accord avec vous Michel, pour manipuler les concepts dans le consulting chez les opérateurs télécoms, il aura fallu des années pour que les opérateurs arrêtent de penser unqiquement en ARPU (Average Revenue per user) pour basculer en approche CLTV (et encore, c'est un sacré bouzin à mettre en oeuvre compte tenu des règles analytiques complexes au niveau réseau télécom pour répartir les coûts).
Dans un monde "infidèle" de l'e-commerce, Amazon fait justement un tour de force avec son service premium sur la livraison. En se plaçant juste au prix du marché sur la plupart des produits(voire un peu en dessous), combinée avec Premium (coût indolore pour les serial acheteurs ramené sur l'année) , l'approche est redoutable pour favoriser la rétention implicite du client et l'inciter à basculer tous ses achats dans le monde Amazon (je suppose que vous avez vu les derniers chiffres sur le retour d'expérience Premium). Je reste assez admiratif de la justesse du modèle, j'aimerais bien savoir si comme dans les télécoms et maintenant l'e commerce, d'autres industries basculent dans cette approche financière, l'avez vous obsevé ? (pour Moi Ferrari cela reste encore de l’orfèvrerie - je ne sais pas si la CLTV est leur KPI clé - elle est implicite compte tenu de l'exclusivité / univers très spécifique à la marque)
Posted by: Axel Duplan | January 07, 2014 at 04:06 PM
Audi est aussi excellent pour travailler la Life Time Value de ses clients. Avec 10% des ventes du groupe VAG (en unités), ils font la moitié des profits !
J'ai bien vu les 20M de premium sur Amazon, soit en effet pas loin de 10% des comptes clients.
Les 3 clés de Jeff Bezos devraient être encore et toujours méditer :
- être customer-obsessed
- penser long terme
- être inventif
Posted by: MdeG iPad | January 07, 2014 at 04:16 PM