Amazon fut donc le dernier GAFAM a publié hier soir ses comptes pour l'important Q4 2021. Il y avait quelques craintes, qui avaient alimenté une baisse de près de 8% de l'action en séance hier jeudi (dans le sillage du gros décrochage de Meta qui s'est écroulé de 26%).
Tous les GAFAM ayant maintenant publié, avec des effets variés sur le cours de Bourse en fonction de leurs résultats, je ferai demain, après la séance d'aujourd'hui à Wall Street, un update sur les niveaux de cours vs les plus hauts atteints en 2021.
Le nouveau CEO d'Amazon, Andy Jassy, qui a pris la suite de Jeff Bezos en juillet dernier, a bien résumé les choses : “As expected over the holidays, we saw higher costs driven by labor supply shortages and inflationary pressures, and these issues persisted into the first quarter due to Omicron. Despite these short-term challenges, we continue to feel optimistic and excited about the business as we emerge from the pandemic."
En synthèse, le trimestre ne fut pas bon du tout dans l'absolu sur pas mal de metrics (CA, croissance, rentabilité opérationnelle), en raison des paramètres que l'ont connait (Covid/Omicron et toutes ses conséquences sur l'emploi et la supply chain), mais il est meilleur que les craintes et les anticipations, et surtout les fondamentaux du modèle restent eux positifs (contrairement à Meta).
- Le chiffre d'affaires de 137Mds$ n'est qu'en faible croissance de 9%. C'est la plus faible croissance depuis de nombreuses années. Dans le détail, +9% en Amérique du Nord mais -1% à l'International.
- L'operating Income à 3,5Mds$ a en gros été divisé par 2 vs 2020. Cela était attendu, et il est même un peu meilleur que les attentes. Toute la rentabilité opérationnelle est venue d'AWS : 5.3Mds$ pour AWS, -1.8Mds$ pour le reste...
- Et si le net income a doublé (14.3Mds$ vs 7.2Mds$), c'est grâce à un gain sur Rivian de 11.8Mds$ pre tax.
- Les anticipations pour le Q1 n'ont rien d'excitantes, à 112-117Mds$ de CA cela induit une croissance de 3 à 8% seulement, c'est sous les attentes du marché. Et question rentabilité Seattle s'attend à un operating profit entre 3 et 6Mds$, vs 8.9Mds$ au Q1 2021 !
En surface, il est clair que le business Amazon est formidablement impacté par Omicron, pressurisant le top (product shortages) comme le bottom line (flambée des coûts).
Cela durera ce que cela durera.
Mais en creusant sous la surface, ce qu'on l'on voit aussi dans le même temps :
- Une croissance de l'activité pub, hyper lucrative évidemment (marges probables entre 60 et 80%), de +32% à 9,7Mds$. C'était la 1ère fois qu'Amazon donnait le détail de l'activité. 31Mds$ de revenus annuels en pub, très joli, et comme pour AWS, Amazon a gardé cette réussite le plus longtemps possible sous le radars. Il était en effet inutile que Google, en autres, sache à quel point Amazon mettait l'accent dessus.
- Un segment AWS, lui aussi superbement rentable, en croissance d'encore +40%, soit quasiment au même niveau que Microsoft et Google qui sont eux 2 et 7 fois plus petits. La croissance en absolu d'AWS est donc largement supérieure à celle de Microsoft, n°2 avec en gros 20% de PDM. Le run rate annuel d'AWS est de 71Mds$, colossal.
- Amazon a profité des earnings pour annoncer une hausse prochaine (18 février) de 20$ de l'abonnement annuel Prime aux US (de 119 à 139$). Nul doute qu'il passera sans problème et qu'il y a un vrai pricing power. Quelques milliards de net profit en plus en perspective à terme...
- Quand on prend du recul, on calcule que pour la 1ère fois plus de 50% du CA d'Amazon provient d'activités qui ne sont pas l'eCommerce direct/1st party. Seattle est quelque part devenue une vraie plateforme.
- On peut aussi relativiser la faible croissance du Q4 2021, car on se comparait à un Q4 2020 en croissance de +44%, totalement atypique. Si on prend la comparaison vs Q4 2019, on est en croissance moyenne de +25%/an, toujours d'un excellent niveau.
Entre les coûts en plus (au dela des 4Mds$) et la marge perdue, c'est sans doute un total de 10Mds$ de shortfall ponctuel causé par le Covid sur le bottom line. Qui reviendront prochainement au P&L...Je considère que le business reste en excellente croissance sous jacente (sans doute peut-on compter sur 15-20%/an sur les 5/6 prochaines années), et également bien rentable.
Sur 2021, Amazon a fait 470Mds$ de CA, en croissance de +22%, générant 24,9Mds$ d'Operating Income (+9%) et 33,4Mds$ de net income (+55%, mais impact de Rivian). Ce n'est pas en 2022 qu'Amazon devrait dépasser Walmart en CA pour devenir la 1ere firme mondiale sur ce critère, mais très probablement en 2023 quand les 2 se tutoieront au dela des 600Mds$ de CA (Apple devrait être un distant 3ième en CA avec environ 450Mds$, mais très loin devant question rentabilité et free cash flow généré)!
Foi de ces mauvais résultats dans l'absolu, mais moins mauvais qu'attendus et quelque part rassurants (!), l'action Amazon a repris 15% en after hours après la publication des earnings. On est pas avec Seattle dans un syndrome Meta avec d'une part le core business qui est attaqué et at risk sur le fond, et d'autre part des investissements colossaux de diversification qui mettront des années avant de payer, éventuellement !
La trajectoire long terme d'Amazon me semble toujours on track, je reste dans mes prévisions étayées l'année dernière à cette période, de l'ordre de 2500Mds$ de CA minimum et une market cap de 7-8000Mds$, ce d'ici à 2030.
Et je suis toujours aussi dans la logique énoncée dans ce post de l'année dernière où j'écrivais :
"Mes 3 favorites pour les 10 ans à venir sont Apple, Amazon et Microsoft. Puis Google, et en dernier Facebook...
Je pense qu'on peut investir sur eux les yeux fermés puis dormir tranquille, on se réveillera dans 10 ans en ayant fait du x3 à x4, 10-15% de TRI par an hors dividendes (quoi qu'Amazon n'en verse pas encore), soit le rendement d'un bon fonds d'investissement de private equity".
Quoi que comme depuis l'action Amazon a baissé, c'est maintenant plutôt du x5 qu'on peut attendre. Acheter de très belles valeurs de croissance long terme sur des dips est clairement la meilleure des stratégies...By far.
Le plus difficile est certainement de maitrises ses émotions, de rester zen et de ne rien faire d'autre que d'attendre que le temps fasse son oeuvre. Quand vous cultivez un champs, dont vous êtes certains qu'il y a de bons arbres solides qui à terme donneront de très beaux fruits, vous n'êtes pas la tous les matins à vous inquiéter quand il y a un peu voire beaucoup de vent. C'est normal, c'est le cours des choses.
Apprendre à 1) rester zen parce que vous avez la certitude que 2) votre analyse économique fondamentale est juste et pertinente, voila 2 beaux challenges.
J'aimerais, plus tard, enseigner ça...
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