Petit retour sur l'aventure Big Moustache évoquée dans le dernier post, car c'est tout de même un sacré rebondissement, une belle histoire que celle de Nicolas Gueugnier, co-fondateur et CEO de Big Moustache (l’une des start-up financée et accompagnée par Day One), et il y a quelques enseignements à en tirer.
Par la qualité de ses produits (aussi bien des rasoirs 3 lames que 5 lames), et un ton marketing sympathique et décalé, dans l’esprit de « Michel & Augustin », Big Moustache a réussi une belle percée avec près de 7000 abonnés récurrents à son service, concurrençant ainsi les marques établies et archi leaders que sont Gillette et Wilkinson.
Néanmoins, sous-capitalisée, n’étant pas encore arrivée au point mort (autour des 10.000 abonnés), la start-up devait constamment jongler avec une trésorerie insuffisante et donc flirter régulièrement avec le dépôt de bilan. Une sortie de route qui a bien failli devenir définitive à l’automne dernier, moment où Nicolas Gueugnier a lancé sur LinkedIn son fameux cri d’alarme après que sa banque lui ait refusé un découvert au tout dernier moment, ce après l’avoir fait espérer plusieurs mois…
Sûr de la qualité de ses produits (aussi efficaces que les marques concurrentes, mais beaucoup moins chers), convaincu de la pertinence de son modèle commercial (vente d’abonnements par Internet) et de la qualité du modèle économique, porté par son public et soutenu par ses fournisseurs qui furent souples sur les délais de paiement, Nicolas s’est accroché, coûte que coûte…
Il a fait le dos rond, a réduit ses coûts au minimum possible pendant plusieurs mois, le temps de tenir et de remanier son capital…
Et il a eu bien raison. Son cri d’alarme a non seulement suscité un élan de sympathie de la part du public… Mais il a aussi attiré un investisseur aux côtés de Day One, convaincu que le projet en valait la peine, qu’il y avait une belle marque à renforcer dans l’univers du rasage et des soins de la barbe et du visage pour les hommes. L’aventure continue donc pour Big Moustache, et de plus belle…
Ce qu'il faut retenir, c'est que la ténacité en entrepreneuriat est l’une des qualités essentielles. Quasiment rien ne se passe jamais comme prévu, quasiment rien n’arrive aussi vite que prévu. Il faut tenir et la vie d’une start-up est marquée par l’adaptation permanente, et parfois par un pivot radical.
Ténacité, flexibilité, agilité et adaptation sont bien au cœur de la réussite entrepreneuriale. Tesla, créée il y a déjà 13 ans, a frôlé de très près la mort en 2008 (notamment), et a dû lever beaucoup plus d’argent que prévu pour arriver à être le constructeur iconique et tendance qu’il est aujourd’hui. Et je me rappelle personnellement avoir dû faire la tournée de mes fournisseurs de Photoways durant l’été 2000 pour éviter le dépôt de bilan…alors que 15 ans plus tard l’entreprise, devenue n°2 mondial de sa catégorie, avec 300M€ de CA, était revendue pour près de 600M€ à des fonds d’investissement…
Néanmoins, gros caveat, si la ténacité est essentielle à la réussite entrepreneuriale, il faut toujours aussi rester lucide et ne pas s’accrocher indûment, ce qui ne ferait alors que causer perte de temps et gaspillage de ressources. Ce qui doit irriguer la niaque de continuer, c’est d’abord la qualité différençiante des produits/services offerts aux clients, et la pertinence du modèle économique actuel ou prévisible.
Photoways était au bord du dépôt de bilan en 2000. Mais quand vous recevez le mail ci-dessous de la part de clients, et que vous êtes très rentable à chaque commande marginale (donc que vous avez un bon modèle économique), vous continuez alors à vous battre avec force, sûr de la valeur de ce que vous leur apportez et de la valeur créée pour l’entreprise :
« Votre prestation est de loin la meilleure et donc je vous en félicite et je vous encourage à poursuivre cet effort pour garder voire même distancer vos concurrents [...] Votre prestation est de qualité au point que je me sens obligé de vous faire de la publicité, et c’est presque une fierté pour moi. »
Mais s’accrocher sans avoir un produit/service de grande qualité, et délivrant suffisamment de marge, ne serait probablement qu’un entêtement vain voire vaniteux !
Le vrai combat, c'est celui de créer une véritable valeur économique et sociale pérenne, pas de défendre son petit ego personnel en maintenant artificiellement en vie, sous perfusion, une entité économique qui déja un mort-vivant ! L'acharnement thérapeutique ne fait pas partie des outils de création de valeur.
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