Entrepreneur & Investor. Co-founder & President Day One Entrepreneurs & Partners, President Plus-de-Bulles. Founder of Photoways/Photobox, co-Founder of Inspirational Stores (Motoblouz).
Swimmer, hiker, diver, wildlife photographer. Proud father of 4.
Après avoir été à l'Elysée la veille au matin avec E. Macron, puis à Versailles dans la soirée, Elon Musk était hier de retour à Austin, Texas, pour l'Assemblée Générale Annuelle des actionnaires Tesla. Je l'ai trouvé franchement très en forme (à Paris il avait des petits yeux fatigués par contre), focus, optimiste, et avec de l’humour.
De manière générale, beaucoup d’énergie positive lors de cette Assemblée Générale, même si aucune nouvelle réelle news.
Les key points que j'ai notés hier soir (également de l'interview qui a suivi avec David Faber) :
Démentissant les fake rumeurs du Wall Street Journal de semaine dernière : "No plan to step down as CEO". Rappel, ça avait bien fait chuter l'action semaine dernière (ça devrait donc repartir dans l'autre sens aujourd'hui en toute logique, mais bon, Mr Market et logique ne font pas toujours bon ménage).
Tesla, comme le recommandaient avec insistance certains actionnaires institutionnels, va s'essayer à faire un peu de pub : "It's worth a try...as long as it's effective". ""We'll try out a little advertising and see how it goes". Ce qui a bizarrement suscité un tonnerre d’applaudissements de la salle, comme si c’était un game changer, et ce à la grande surprise aussi d’Elon « I was not expecting that level of enthousiasm». En réalité, Elon avait déja dit il y a quelques années qu’il n’était pas dogmatiquement contre la pub et qu’un jour viendrait où Tesla pourrait en faire…
"Tesla is an AI company". « Tesla has the most advanced real world AI, by far ». Intéressant à l’heure où on commence à voir poindre une bulle sur les valeurs IA (Nvidia, par exemple, est valorisée plus de 20x son CA et 60x ses résultats 2024...) ! Bon, OK, le marché ne voit pas encore Tesla comme cela à ce stade, mais ça pourrait/devrait changer dans le futur, et j’imagine que Musk va s’y employer. Laissons encore 12-18 mois couler, et ça devrait être bien plus flagrant.
Sur le plan macro, Musk pense toujours que la situation risque d'être difficile pendant encore 12 mois, et Tesla n'est pas "immune to global economic environment".
Question cours de l'action, Musk a recommandé de ne pas regarder pendant 12 mois (...) mais que s'il y avait un dip il fallait acheter, et que le reward serait huge à terme...
Model Y : Musk est confiant que ce sera le véhicule le plus vendu au monde cette année. Ca me parait en effet quasi acquis.
Tesla travaille sur 2 nouveaux produits qui à eux 2 devraient faire 5M d'unités. Hypothèse : l'un d'entre eux est certainement le "Model 2", la voiture autour des 25K$/€, l'autre pourrait être un refresh du Model 3 ? Aussi bien le design de ces produits que les manufacturing techniques sont "head & shoulders above everything else". Impatient de voir...
L'objectif des 20M d'unités en 2030 encore et toujours réitéré.
Chine : aucun problème de demande, la limite est la capacité de production.
Chine : la prédiction de Musk est que l'invasion de Taiwan par la Chine est inévitable (pas très cool ça). Ca veut certainement aussi dire que Tesla a déja travaillé sur ce scénario et y est préparé.
Le Cybertruck arrive bien cette année, still on track...mais sans doute avec du retard. Musk a précisé qu'il était très compliqué à produire ! Elon bullish, clamant qu'il sera encore mieux qu'attendu (« if anything, better than expected »), et dieu sait qu’il est attendu ce Cybertruck, et Morgan Stanley prédit que ce sera une « voiture culte ». Question volume anticipé, Elon a parlé de 250-500K à terme.
Le Roadster pourrait commencer à être produit en 2024 (ça reste du conditionnel !).
Sur Twitter, Musk a admis que c'était une "short term distraction", qu'il avait dû recourir à une "major open-heart surgery" mais que maintenant Twitter était une "stable place".
Allez, en ce début de week-end, un petit travail de fond, thought-provoking, sur les styles et les approches contrastées entre Warren Buffett et Elon Musk, que j'admire tous les 2, mais pour des raisons différentes !
Le week-end dernier, lors de l'assemblée annuelle de Berkshire Hathaway, Warren Buffett a totalement écarté la considération d'investir dans Tesla à court terme, j'en avais parlé il y a quelques jours ICI.
En synthèse, le secteur va demander de très lourds investissement, les positions concurrentielles sont encore trop ouvertes, et on ne peut pas savoir qui va gagner, s'imposer, et en tirer les fruits. Donc trop de risque, comme pour tout secteur neuf en très forte croissance, pour lequel c'est "just the begining" !
Ce n'était pas un avis contre Tesla, mais sur le secteur en général. Sur le principe même, rien à dire la dessus, même si mon analyse donne que Tesla possède bel et bien des avantages concurrentuels indéniables et pérennes.
Quelques jours plus tard, Elon Musk s'est lui moqué de l'approche de Warren Buffett et des "moats" que ce dernier recherchait quand il investissait dans une entreprise. Littéralement, la "moat" ce sont les douves d'un château fort, à savoir le fossé rempli d'eau qui permet d'être quasi inexpugnable, du moins de défendre la position avec les plus grandes chances de succès. Relatif au business, une moat représente l'avance prise par une entreprise avec ses technos, ses parts de marchés captives, sa cost position, etc, qui la protège de la concurrence et lui permettrait de garder son leadership, et sa rentabilité, sur le long terme.
Elon Musk : "moats are lame" (en clair, c'est bancal comme concept). "Ce qui compte c'est le rythme d'innovation", voir cette courte video :
Dans la réalité, les 2 ont portant raison...mais pas au même moment, et pas dans les mêmes contextes !
Dans le "Venture" qui est tout de même un peu mon métier avec Day One, on parie avant tout sur l'homme et sa capacité à tirer le meilleur d'un secteur naissant que l'on considère à fort potentiel, où la techno joue un rôle important, de même que l'innovation (qui n'est pas que technologique, loin de la, ça peut être le produit, le canal de distribution, l'image et le marketing, la supply, etc).
Quand on investit à un moment t, certes il y a parfois déja une techno dispo (ou un début de techno), un produit, un peu de CA éventuellement, un modèle économique plus ou moins calé, et tout cela confère une certaine confiance (ou pas), mais de fait on sait que tout est amené à fortement évoluer dans le futur (et on sait que les BP sont quasiment jamais respectés !). Et in fine, ce qui va faire le succès de l'entreprise c'est la capacité du managementfondateur à naviguer mieux que ses concurrents, dans un terrain mouvant et inconnu qu'il faut défricher, donc à s'adapter sans cesse aux réalités du marché, à innover mieux et plus vite que les autres, et à poser progressivement un business model vertueux.
L'homme, l'homme et encore l'homme !
Oui le secteur et ses economics jouent toujours in fine un rôle, du moins à terme, mais :
Un entrepreneur accompli, dans un bon secteur, en tirera le meilleur et mieux que ses concurrents. Et dans un secteur pourri, il comprendra la situation et travaillera vite sur un pivot pour se sortir du merdier, ce avant que les finances ne se dégradent trop. C'est ce que nous avions fait en notre temps avec mon associé Martin Genot sur "Inspirational Stores" à la fin des années 2000 : malgré une levée de 10M€ en 2008 (en plein coeur de la crise financière !), comprenant à quel point c'était un secteur sans avenir, nous avions discrètement entamé un pivot à 180°, arrêtant totalement notre métier de la "délégation eCommerce" pour racheter Motoblouz, avant de très bien revendre l'entreprise en 2016. Le secteur était d'ailleurs tellement pourri que tous nos concurrents de l'époque sont soit mort (l'un d'entre eux, malgré 15M€ de levés, s'est fait racheter pour 1€ symbolique), soit ont végété et bricolé sans réellement créer de valeur.
Un mauvais entrepreneur, même dans un excellent secteur question dynamique et economics, va se faire dépasser et battre par ses concurrents meilleurs que lui. Plus le secteur est d'ailleurs attractif, plus il va attirer la concurrence, logique et inéluctable. Et le mauvais entrepreneur, qui ne comprendra pas non plus qu'il est dans un mauvais secteur, va vouloir s'accrocher en vain sans chercher d'autres voies de création de valeur.
En venture, comme les choses ne sont initialement pas établies (et en very early stage il n'y a d'ailleurs rien d'autre qu'un homme, une équipe, et une idée), que l'avenir reste encore intégralement à écrire, c'est bien l'homme et son talent qui fait toute la différence. Et quand vous misez sur l'entrepreneur gagnant, un Bill Gates, un Steve Jobs, un Jeff Bezos, un Mark Zuckerberg, etc, vous obtenez in fine un return extraordinaire, du x100 schématiquement est possible (c'est par exemple le cas de Tesla depuis son IPO).
Mais la réalité est aussi que pour un Steve Jobs ou un Bill Gates, 2 entrepreneurs visionnaires doublés chacun d'un redoutable sens des affaires et de la négociation, au pragmatisme business sans faille, qui vous apportera du x100, vous aurez 1000 entrepreneurs plus ou moins bons qui vous feront du x0 à x3 (ce parfois par pur chance, un corporate fortuné peut vous racheter à fort prix, pensant à tort qu'il tient une vraie pépite "stratégique" pour lui !).
Et compliqué a priori de spotter en amont les vraies stars, certains entrepreneurs charismatiques et extrêmement ambitieux, qui donnent clairement envie, sont parfois juste des lunatiques, et peuvent alors vous faire perdre des fortunes. Masayoshi Son de Softbank en sait quelques chose avec, par exemple, Adam Neumann de WeWork.
Quand on se plante en venture, on se plante surtout, voire essentiellement, sur son diagnostic de l'homme, de l'équipe. Et les raisons sont nombreuses, pas assez tenace, pas assez créatif, pas assez analytique et ne regardant pas assez les metrics, pas assez proche des besoins des clients, pas assez bon négociateur, ne sachant pas manager et s'entourer de compétences fortes, pas assez à l'écoute des multiples signaux du marché, etc. D'aucuns psychologues argumenteront aussi que le % de psychopathes chez les entrepreneurs est largement supérieur à la moyenne et approcherait les 15%. A débattre, mais je peux prendre les paris que tous les VC de la place ont eu affaire à ça...
L'approche de Warren Buffett est totalement différente, il mise lui principalement sur une situation économique à un instant t, où les positions concurrentielles sont déja si fortement établies et stables qu'il pense non seulement pouvoir en extrapoler le futur mais qu'il pourrait également et éventuellement se passer d'un excellent manager (ponctuellement !). Ce dernier (qui est éventuellement un entrepreneur, ie Rose Blumkin avec le Nebraska Furniture Mart ou Richard Santulli avec Netjets, quand Warren a acheté ces 2 entreprises) est certes important, mais moins que le secteur lui-même et ce qu'apporte la maturité de l'entreprise, sa stabilité concurrentielle et ses economics.
Warren Buffett déclarant d'ailleurs qu'il cherche des entreprises "tellement fortes et solides que même un idiot pourrait les gérer sans les affecter, car tôt ou tard ce sera le cas" !
Il ne cherche pas à faire du x20+ en 5-8 ans comme un VC, mais plutôt, schématiquement du x10 sur 20 ans, et ce avec une forte probabilité et une faible variabilité. Ce qu'il résume très bien en disant que si on fait ce genre de performance sans connaître de cata totale (ce qui arrive nécessairement et fréquemment dans le venture), on aura au final une très belle performance. Ce qui est non seulement sur le principe mécaniquement vrai, mais que Warren a aussi prouvé sur la distance mieux que quiconque (avec un TRI moyen de l'ordre de 20%/an pendant 50 ans !).
A contrario, le venture cherche lui le "home run", du x20+ et plus en 5-10 ans, mais accepte aussi en parallèle de tout perdre sur un certain nombre de dossiers. C'est intégré dans le modèle, et si, par exemple, sur 10 investissements il y en a 1 qui fait du x10, 5 qui font entre x2 et x3, et 4 où c'est la cata, la performance globale restera très bonne. Certains investissements sont même des "fund returner" à savoir qu'à eux seul ils payent l'intégralité du fonds (ce fut par exemple le cas de Facebook pour Accel, ou de Blablacar pour ISAI).
Une approche analytique basée sur des avantages concurrentiels et des "moats", "à la Warren Buffett", ne peut par définition par marcher quand un secteur est encore trop jeune et trop incertain, où les positions ne sont pas encore prises, où les barrières d'entrée ne sont par définition qu'encore naissantes (ça m'a d'ailleurs toujours fait rigoler ces VC qui vous challengent lors des pitchs en objectant "qu'il n'y a pas de barrières d'entrée", c'est par définition le cas !). Dans ce genre de contexte économique, le seul curseur différenciant c'est l'homme, l'entrepreneur. Il n'y a pas encore de "moat", mais celle-ci sera édifiée progressivement sur la durée par les bons entrepreneurs.
Si je crois que Tesla a bel et bien des avantages concurrentiels bétons qui devraient être pérennes dans le temps, je suis aussi néanmoins le 1er à dire que ceux d'Apple sont encore bien plus tangibles, établis et solides ! Une réalité attestée d'ailleurs aussi tout simplement pas l'exceptionnel niveau de marge brute, stable et même en hausse sur le terme (alors que les marges de Tesla fluctuent beaucoup, et d'aucuns sont même inquiets pour le futur).
Non seulement une approche venture ce n'est pas le style de Warren Buffett, lui qui initialement était d'ailleurs "deep value" (il a évolué grâce à Charlie Munger, préférant "a great company at a fair price" à "a fair company at a great price"), mais ce serait aussi inadéquat pour Berkshire Hathaway, qui gère aujourd'hui des centaines de milliards, et qui recherche donc des "éléphants". A savoir des entreprises dont ils ont tellement confiance dans le futur en raison des "moats" établies, qu'ils peuvent mettre de très gros paquets d'argent dessus, se comptant en milliards voire en dizaines de milliards (ie une mise de 36Mds$ sur Apple en 2016-2017).
Une approche venture, par définition bien plus risquée, ne permet pas d'investir des milliards sur une seule entreprise, ni même de mettre un trop gros % de son fond sur une seule entreprise.
A l'extrême, on voit sur Twtter des "Tesla fans" qui se gargarisent d'être "all-in" sur l'entreprise, à savoir qu'ils ont même revendu leur baraque pour mettre le placement uniquement sur Tesla ! Inutile de dire comment je qualifie cette prise de risque...Disons juste, pour être politiquement correct, que ça manque sérieusement de "rationnel" ! Il faut voir Tesla comme un investissement de type venture et y allouer le % de son patrimoine en rapport. Si j'ai déja dit que je n'aurais pas de problème qu'à terme Tesla représente 25% de mon patrimoine, c'est très loin d'être le cas actuellement, et si ça le devenait c'est que Tesla aurait justement super performé. Exactement comme Apple, qui faisait bien moins de 10% de Berkshire Hathaway initialement, et qui maintenant en représente plus de 20% (et 45% de leurs placements boursiers), parce que "it just happens to be a far better business than our other businesses", dixit Warren.
Sur le marché de l'automobile :
Warren Buffett, en business analyst génialement rationnel qu'il est, voit un secteur incertain, avec la montée d'une techno - les véhicules électriques - qui rabat les cartes et rend les economics et les positions mouvantes, avec de gros capex, et aucun acteur pouvant raisonnablement être certain d'être l'archi leader dans 10 ans.
Elon Musk, en technologist visionnaire qu'il est, et qui maîtrise tout de même déja pas mal de choses question production efficace de voitures électriques, estime que par les multiples innovations qu'il a déja en tête, à de nombreux niveaux (pas uniquement produit, mais aussi manufacturing, supply chain, software, etc), il saura conserver et même amplifier son lead actuel.
Warren Buffett mise avant tout sur une situation et des economics établies, puis sur un manager (à qui il demande d'être 3 choses 1/ intelligent, 2/ énergique et 3/ honnête, précisant avec humour et pragmatisme que si la 3ieme compétence n'est pas la les 2 1ères vont vous tuer !), mais dans le cas de l'automobile, avec la rupture induite par plusieurs technos (électricité, software, IA/Autonomie), on est de fait (et malgré l'ancienneté du secteur) dans un contexte "venture", il faut d'abord miser et croire en Elon Musk (ou pas), avec des economics actuels certes très bons mais qui restent de fait encore très mouvants et incertains vu la jeunesse et l'immaturité du marché.
Warren Buffett et Charlie Munger ont de fait parfaitement raison quand ils analysent qu'actuellement les consommateurs changent sans problème de marque de voiture, que ce n'est pas un business sticky, c'est juste un constat indiscutable aujourd'hui et les voitures sont assez commoditisées en fait (pour 99% du marché, je ne parle pas du segment luxe/hyper sportives). Mais demain, la valeur du hardware devrait s'effacer devant la force du logiciel et de l'écosystème proposés par les marques, et je pense qu'on devrait aboutir à un business "à la Apple", ie une base installée générant de confortables revenus récurrents et quasi récurrents (pilotage automatique, recharge, assurance, etc).
C'est une évolution lourde et extrêmement rentable du business model, ce n'est pas le style de Warren de faire ce genre d'extrapolation et de prendre ce genre de paris (ils ne l'ont d'ailleurs pas pris à la fin des années 2000/début des années 2010 quand l'iPhone et l'écosystème d'Apple étaient en montée en charge, ils ont attendus 2016 et des preuves tangibles), mais moi je le prends...sans doute en avance de phase sur eux !
Mon reward n'en sera que plus grand...mais à cet instant le risque l'est tout autant ! Du moins sur le principe et de loin. Car le vrai risque c'est juste de ne pas savoir ce qu'on fait, d'investir dans ce qu'on ne comprend pas vraiment. Or mon analyse fondamentale des avantages concurrentiels de Tesla me laisserait plutôt penser qu'il n'y a sur le fond pas tant de risque que cela.
Sur les 10 dernières années, jouissant à la fois d'une trésorerie initialement pléthorique et d'un free cash flow qui l'est tout autant année après année, Apple a employé près de 600Mds$ à racheter ses propres actions, ce qui a permis d'une diminuer le nombre de 25% à peu près.
Voici le tableau sur les 7 dernières années, avec le montant des buybacks (colonnes bleues) ainsi que le prix moyen de rachat de l'action (ligne rouge). On en est actuellement à environ 90Mds$ par an. Au dernier trimestre c'était 20Mds$ de dépensés à un cours de 150$ de moyenne, mais au Q1 2022 (Q2 2022 fiscal), c'était 23Mds$ à 165$ de moyenne (je rappelle qu'Apple a atteint son plus haut historique de 182$ début janvier 2022, avant de refluer progressivement jusqu'à un plus bas de 125$ début janvier 2023...puis de vite remonter !).
Dans le futur et d'ici à 2030, je fais l'hypothèse qu'Apple va encore investir plus de 800Mds$ pour racheter ses propres actions, ce qui devrait en diminuer le nombre par 20% environ pour tomber autour des 12-12,5 Milliards contre 15,7 Milliards actuellement.
Je redonne mes lignes d'horizon pour 2030 :
CA : autour des 1000Mds$ (vs 400Mds$ en 2023).
Net profit : 300Mds$ (vs pas loin de 100ds$ en 2022)
Market Cap base 28x le net profit : autour des 8000Mds$
Soit une action proche des 700$
On aurait bien ainsi du x4 à attendre d'ici à 2030 sur le cours de l'action, soit aussi un très sympathique rendement moyen supérieur à 20% par an. Et ce avec un degré de probabilité franchement important (je reprends Warren Buffett cité dans le post précédent : "it's better to identify opportunities with more certainties. I think I know where Apple’s going to be in 5 or 10 years...").
A noter que la philosophie d'Apple d'employer continuellement son cash excédentaire pour racheter ses propres actions, mois après mois et année après année, quel que soit le cours de Bourse (donc sans jamais chercher à "timer" le marché et deviner en vain le sens du vent), est aussi exactement ce que je recommande de faire, ce évidemment sur des entreprises ayant une forte dynamique positive top et bottom line, et qui vont donc mécaniquement créer de la valeur. C'est simple, c'est serein, et c'est surtout mécaniquement et automatiquement gagnant !
C'est certes grisant de rêver à des petits profits rapides, mais pourquoi se compliquer la vie quand on peut faire simple et gagnant avec un bien plus fort degré de certitude ? Pourquoi vouloir prendre des risques à trader et timer le marché quand il y a des stratégies gagnantes à tous les coups ? Franchement, la perspective de quadrupler son patrimoine en 7 ans devrait déja être suffisamment excitante pour dissuader de chercher à "finasser" non ?
A noter que pour Tesla je pense qu'on aura du x10, mais ceci néanmoins avec un degré d'incertitude bien plus fort que des x4 d'Apple. D'où le fait que j'ai les 2 ;-)
Tout en reprécisant encore et toujours qu'on ne doit investir en Bourse que le cash strictement excédentaire dont on n'a absolument pas besoin pour les 10 ans à venir (ce qui est exactement ce que fait Apple).
Ce week-end a eu lieu à Omaha, Nebraska, le "Woodstock du capitalisme", c'est en effet ainsi que l'on a baptisé l'assemblée annuelle de Berkshire Hathaway, le conglomérat d'investissement de Warren Buffett, au 20% environ de TRI annuel depuis sa création il y a plus de 50 ans !
Sans toutefois en parler directement, lui et Charlie Munger ont indirectement expliqué pourquoi ils ne se voyaient pas aujourd'hui investir dans Tesla. En synthèse, le secteur et ses economics ne sont au final pas assez prévisibles pour eux à ce stade, avec 2 arguments :
1/ L'incertitude au niveau des coûts et des investissements
Charlie Munger : "the electric vehicle is coming big time, and that’s a very interesting development". "At the moment, it's imposing huge capital costs and huge risks, and I don't like huge capital costs and huge risks."
2/ Secteur extrêmement concurrentiel, peu "sticky", pas de grand archi leader pérenne
"Charlie and I long have felt that the auto industry is just too tough. It’s just a business where you’ve got a lot of worldwide competitors, they're not going to go away, and it looks like there are winners at any given time, but it doesn’t get you a permanent place."
"It's premature to declare any winners in the electric vehicle competition... There's just too much uncertainty in the sector".
"Henry Ford looked like he owned the world with the Model T ... and 20 years later they were losing money."
"You will see a change in the vehicles, but you won't see anyone that owns the market because they changed the vehicles".
Et Warren Buffett donc de résumer en mettant l'accent sur le manque de certitude du secteur et en donnant la comparaison avec Apple : "it's better to identify opportunities with more certainties". "I think I know where Apple’s going to be in 5 or 10 years, and I don't know what the car companies are going to be in 5 or 10 years".
Je suis 100% en ligne concernant Apple (re, je vois Apple à 1000Mds$ de CA et l'action à 600-800$ en 2030, relire ICI ou encore LA), sur le fond ce sont des arguments fondamentaux tout à fait recevables et légitimes, et je préfère d'ailleurs largement débattre la dessus que sur le sens de l'action Tesla à court terme, qui est anybody's guess (et qui n'a aucun intérêt quand on est investisseur long terme) ! Oui il va y avoir énormément d'investissements, oui les economics vont encore largement évoluer, et oui le business de la voiture est peu sticky aujourd'hui, les consommateurs changent assez (voire très) facilement de marque.
Donc, à ce stade, la décision de Berkshire Hathaway de ne pas miser sur le secteur est tout à fait rationnelle dans leur logique. Aujourd'hui, c'est juste trop tôt, et comportant trop de risque à leurs yeux.
Mais, de même que Warren n'a commencé à comprendre la stickyness et la force du modèle Apple qu'en 2016, quand l'entreprise faisait déja plus de 200Mds$ de CA et gagnait 45Mds$ de profit net, je pense qu'il va falloir encore un peu de temps pour que Berkshire Hathaway ne réalise la qualité et la solidité intrinsèque du modèle Tesla, et que celui-ci prouve bien sa stickyness. Et je pense que ce sera le cas, grâce au réseau de superchargers, grâce aux logiciels, et notamment la conduite autonome.
A noter aussi que quand Buffett a commencé à miser sur Apple en 2016, l'entreprise entamait une phase de croissance très modérée, et elle était même en décroissance cette année la. Depuis 2015, Apple n'a en effet cru son CA que de 7% seulement en moyenne par an (2015 calendaire : 235Mds$, 2022 : 388Mds$). Contraste fort avec les 7 années précédentes où Apple a connu une croissance annuelle proche des 40% ! Buffett a investi dans Apple quand il y avait des certitudes sur la qualité et la pérennité du modèle long terme, et la génération de free cash flow mais...plus de croissance explosive (et donc aussi bien moins d'investissement capex vs le CA).
Le style Warren Buffett, ce sont des entreprises présentant une forte certitude de bonne croissance des bénéfices et du free cash flow sur les nombreuses années à venir, mais pas non plus des croissances exponentielles, qui viennent mécaniquement avec forcément bien plus de risques et de lourds investissements obérant le free cash flow. Berkshire préfère investir quand les choses sont bien plus stables, avec des certitudes plus affirmées sur les avantages concurrentiels, les positions et les economics. Les gros business leader consumer goods avec clientèle sticky (ie Coca, Gillette, Heinz, mais aussi maintenant Apple) sont parfaits pour cette stratégie.
Mais tout comme Warren Buffett, je mets avant tout l'accent sur les avantages concurrentiels pérennes, et je pense que Tesla en possède de nombreux comme je l'ai déja étayé (notamment ICI), et ce sont bien ceux-ci qui amèneront dans quelques années une entreprise extrêmement solide et rentable, dégageant des montagnes de cash. Ma conviction est que Tesla sera quelque part l'Apple du futur, puissance 5...et en est aujourd'hui là où Apple était au tout début des années 2010.
Berkshire Hathaway cherche avant tout à avoir de très bons rendements avec un grand degré de prévisibilité et donc de probabilité, plutôt que d'avoir des rendements de dingue, mais avec une probabilité plus faible car plus de risque.
Autres commentaires sur Elon Musk entendues ce week-end, signe de beaucoup de respect et d'admiration de la part de Charlie et Warren :
"He would not have achieved what he has in life if he hadn't tried for unreasonably extreme objectives"(Charlie Munger)
"He likes taking on the impossible job and doing it...We're different. Warren and I are looking for the easy job". (Charlie Munger)
"It's a dedication to solving the impossible, and every now and then he'll do it". (Warren Buffett)
A noter aussi tout de même que Berkshire Hathaway possède pour environ 1,5Mds$ d'actions General Motors (donc pas grand chose relativement) ainsi qu'un groupe de concessions automobiles regroupant 102 franchises représentant 27 marques et couvrant 10 états américains. On y retrouve quasiment tous les concurrents occidentaux de Tesla : Toyota, VW, Mercedes, BMW, Honda, Hyundai, etc.
Avec le Covid, il y a eu en 2020-2021 la flambée des valeurs techno, puis en 2022 la marée s'est brutalement retirée...
Et on voit ainsi maintenant les entreprises qui restent débout car elles jouissent d'un modèle solide et d'une belle dynamique, à même de justifier une croissance de leur cours de Bourse...et les autres !
Bilan de la marée :
Les entreprises qui ont flambé (autour des 300% de hausse) : Tesla et Nvidia.
Les entreprises qui ont connu une grosse progression (autour de +100%): Apple et Microsoft.
Celles qui ont connu une progression décente (+30 à +50%) : Google et Shopify.
Celles qui sont quasi stables (de 0 à +15%) : Spotify, Amazon, Meta, Netflix.
Celles qui ont plongé (-15% et pire) : Zoom, Docusign, Peloton.
Et la seule entreprise qui est aujourd'hui tout proche de son plus haut historique (atteint début janvier 2022) c'est ....Apple !
Mes estimations données hier pour Apple étaient globalement justes (top et bottom line), et celles-ci ont bien largement dépassé le consensus des analystes de Wall Street, mais également les propres estimations internes de Cupertino, qui avait été de fait un poil trop pessimiste pour ce trimestre.
Apple montre une fois de plus l'incroyable force et la qualité de son modèle, naviguant avec brio un contexte économique compliqué et des perturbations diverses.
CAglobal : 94,8Mds$, -3% vs les 97,3Mds$ de 2022. Malgré 5% de headwinds Forex, on aurait sinon eu un trimestre record en croissance de quelques %.
iPhone : 51,3Mds$, record pour un Q2, +1% vs 50,6Mds$ 2022
Mac : 7,2Mds$, -31% vs 10,4Mds$ (grosse chute comme prévu)
iPad : 6,7Mds$, -13% vs 7,6Md$ (chute sensible comme prévu, comparaison difficile avec l'année dernière où l'iPad M1 était introduit)
Wearables & Accessories : 8,8Mds, stable vs 2022, ce qui est une très bonne surprise. Record trimestriel cependant aux US et en Chine. La base installée de Watch continue de fortement croître.
Services : 20,9Mds, +5% vs 19,8Mds$ 2022. La croissance des services illustre parfaitement la force de l'écosystème Apple. 975M d'abonnements payants, +18% vs les 825M l'année dernière.
Marge brute globale : 44,3% vs 43,7%, hausse qui reflète la force de l'iPhone et la part plus importante des services dans le CA (22% vs 20%)
Marge brute hardware : 36,7 vs 36,4% (idem iPhone)
Marge brute services : 71% vs 72,6% (il y a du y avoir un mix services différents, ceux qui incorporent du contenu sont relativement moins rentable qu'Apple Care ou la pub par exemple, cette dernière ayant été affecté par le contexte macro. 45% de la marge brute d'Apple ce trimestre provient des services !
Net Profit : 24,2Mds, -3% vs 25Mds$ (et 22.6Mds$ attendus par le marché). A noter que ce résultat est obtenu sans qu'Apple ait eu recours à un plan de licenciements massifs comme on fait les autres GAFAM. La rigueur et prudence de gestion, Apple connait depuis longtemps, et c'est aussi à ça qu'on voit à quel point Tim Cook est un excellent CEO.
EPS : 1,52 vs 1,52$ (merci au programme de rachat d'actions, encore 19Mds$ ce trimestre, et donc avec moins de profits l'EPS reste identique). Rappel, le marché attendait 1,43$, on a donc un beat significatif; traduction pour les boursicoteurs spéculateurs, l'action devrait grimper aujourd'hui. En ce qui me concerne, on est dans une continuité, les targets n'ont pas changé depuis 2 ou 3 ans, et je vise autour entre 600 et 800$ en 2030, et les soubresauts ponctuels ne sont pas trop mon sujet.
Operating Cash Flow : 28,6Mds$, au dessus des 28,2Mds$ de l'année dernière, et donc un nouveau record trimestriel. Dit différemment, Apple a généré un eu moins de profit, mais un peu plus de cash opérationnel. Sur cette metrics clé, c'est absolument remarquable. Question Cash, comme je mettais hier, Apple reste le roi incontesté. Et, après tout, c'est ce qui compte plus que tout.
Cash & debt : 166Mds$ et 110Md$, net cash 57Mds$ (effet d'arrondi).
Share buyback : Apple dégageant bien plus de cash qu'il en a besoin, le Board a autorisé 90Mds$ supplémentaire de rachat d'actions (soit 3% de la market cap actuelle).
Au dela de ces key metrics, points saillants :
Très long couplet de Tim Cook qui a tenu à insister sur l'impact d'Apple sur l'humanité et l'environnement. je le mets en intégralité car ça me semble finalement encore plus important que les chiffres eux-mêmes. Et peut-être que ces chiffres sont aussi le reflet des forte valeurs d'Apple...
"We're constantly striving to make a positive difference in people's lives and be a force for progress. We're investing in education to give students the skills they need to shape the future. We're helping to create pathways of opportunity for communities of color through our Racial Equity and justice initiative. And every day we're building an even more inclusive and diverse Apple rooted in our culture of belonging. To better understand how our work intersects with our values, look no further than what we're doing for the environment. We just celebrated Earth Day in April, and during that month, Apple announced that its global manufacturing partners now support over 13 gigawatts of renewable energy, a nearly 30% increase in just the last year. This translates to 17.4 million metric tons of avoided carbon emissions, the equivalent of removing nearly 3.8 million cars from the road.
We're all investing up to an additional $200 million in our Restore Fund, which is designed to support innovative, scalable, nature based carbon removal projects, with the goal of removing 1 million metric tons of carbon every year. These are just the latest steps on our journey toward our 2030 goal to be carbon neutral across our supply chain and lifecycle of our devices. At the same time, we're advancing renewable energy across our supply chain, we're also sourcing more recycled materials in our products. Last month, we announced our plans to have all Apple design batteries include 100% certified recycled cobalt by 2025, and we remain committed to one day using only recycled and renewable materials in our products. We have a deep sense of mission here at Apple. We believe in the power of innovation to build a better world. We are determined to do our best work on behalf of our customers and to give them the tools that can enrich lives. So we will manage for the long term, just as we always have, with our eyes to the horizon, with limitless creativity, and with a deep belief that we can achieve anything we put our minds to".
Ce fut un trimestre de records absolus dans un certain nombre de pays en développement : "We were particularly pleased with the performance we saw in emerging markets and achieved all-time records in Mexico, Indonesia, the Philippines, Saudi Arabia, Turkey and the UAE".
Apple anticipe un Q2 calendaire à la hauteur du Q1, donc globalement relativement difficile en terme de comparaison et de croissance, mais au moins il n'y a pas de dégradation, et même une petite amélioration question forex (4% d'impact vs 5% ce trimestre).
L'Inde comme nouvelle frontière : "Looking at the business in India, we did set a quarterly record, grew very strong, double digits year-over-year. So it was quite a good quarter for us, taking a step back, India is an incredibly exciting market. It's a major focus for us. I was just there, and the Dynamism in the market, the vibrancy is unbelievable". Je rappelle qu'Apple a ouvert ses 2 premiers Apple Stores en Inde il y a 2 semaines (20 avril), lire ICI.
Base installée : c'est le point clé, capital et central d'Apple et de son modèle, que Tim Cook a résumé par "it's a huge asset for us, and it's a testament to the overall customer satisfaction and engagement and loyalty of our customers. And so we view this as a major asset for us".
De fait,il y a aujourd'hui plus de 2 Milliards de devices Apple dans la nature, en croissance importante (à 2 chiffres) sur la durée. Ils sont appelés à être régulièrement changés (tous les 3-6 ans en moyenne) ce qui devient presque du revenu récurrent pour Cupertino. Je rappelle au passage ma façon très simple d'apprécier le business Apple : de plus en plus en users, prenant chacun de plus en plus de devices et de services Apple, ce avec des marges supérieures (en raison du mix hardware/services).
Mon hypothèse à 2030 : 1,5 Milliard de users ayant chacun en moyenne entre 3 et 4 appareils et entre 3 et 4 abonnements de services. Ce qui nous amènera mécaniquement à 800-1000Mds de CA (re, changement/upgrade tous les 3-6 ans), 200-250Mds$ de résultat net, une market cap de 6 à 8000Mds$ et un stock price entre 600 et 800$.
D'une année à l'autre il peut y avoir un cycle de renouvellement moins important, pour des raisons macro (crise éconmique, récession, etc) ou micro (nouvelle génération pas assez excitante), ce sera compensé l'année suivante par un cycle plus important (ce qu'on qualifie en anglais de "pent up demand"), et sur la durée la mécanique ne changera pas.
Anecdotiquement et de façon amusante, certains journalistes et pseudos analystes ont regretté qu'Apple n'ait pas assez parlé d'Intelligence Artificielle, le gros buzzword du moment...Tim Cook a répondu sobrement que 1/ ils en incorporaient bien de plus en plus dans leurs produits et que 2/ ils ne parlaient jamais des produits en développement.
Dernier GAFAM à le faire, Apple va présenter ce soir après la clôture du marché ses résultats pour son 2ième trimestre fiscal 2023 (Octobre 2022 - Septembre 2023), et avait prévenu lors du précédent que le CA serait en baisse, dans la même amplitude qu'au dernier trimestre, ie autour de 5%.
Le marché a donc déja anticipé des résultats peu fameux, et s'attend en moyenne à 93Mds$ de CA et un EPS de 1,43$, soit respectivement des baisses de 4,5 et 6% vs Q1 2022.
En raison des bonnes performances de l'iPhone, qui reste le device phare (par contre, Mac, iPad et Wearables devraient ne pas être brillants), je m'attends pour ma part à une baisse un peu moins sensible, autour de -2 à -3% pour le CA (95Mds$), et un EPS quasiment du niveau de 2022 à 1 ou 2% près (l'iPhone a de meilleures marges que le reste du hardware, donc une bonne performance de l'iPhone se reflète dans une meilleure marge brute globale et donc des profits meilleurs). Le Forex meilleur devrait aussi aider (le $ s'est affaissé ce trimestre, mais l'impact devrait être cependant réduit puisque sans nul doute Apple se hedge en grosse partie).
Dans l'ensemble, Apple devrait néanmoins, et de loin, rester le roi du Free Cash Flow. En ces temps actuels, c'est une force colossale justifiant un bon premium ($AAPL est tout proche d'ailleurs de ses records historiques de janvier 2022, cf ci-dessus).
I) Taille et Split du marché mondial du BEV (véhicule pur électrique)
7,7M de BEV ont été vendus dans le monde en 2022, sur un total de 80M au niveau de l'industrie automobile, mais le marché est concentré puisque 90% du volume se réalise dans 6 pays seulement, et les 2/3 sont en Chine. C'est donc clairement la-bas qu'on peut acquérir de gros volumes...
II) Dynamique de croissance des BEV
Dans un marché mondial de l'automobile globalement stable en 2022, les BEV ont fait +60%. Autrement dit ils prennent des parts de marché à vitesse grand V sur les "ICE" (Internal Combustion Engine). De fait, ils ont reculé de 6% en 2022 et leur pic en volume fut atteint en...2018. Les constructeurs ont compensé en augmentant fortement les prix, de l'ordre de +30% depuis 2019 (stratégie claire de milking pour moi d'une catégorie en déclin, cf le segment "cash cow" d'une matrice BCG).
Croissance 2022 par principale zone :
Chine : +84%
US : +60%
Europe : +29% (Allemagne +32%, France +26%, UK +40%)
On s'attend en 2023 à ce que la croissance mondiale des BEV soit de l'ordre de +30 à +35%, donc atteigne 10M d'unités, les US prenant le lead en terme de dynamique avec +50%, dépassant le million de véhicules localement. Tesla devrait évidemment largement profiter du dynamisme de son 1er marché (rappel, sa PDM en BEV y est la-bas de l'ordre de 60%).
Sur une plus longue période, on observe schématiquement que le marché est passé de 100,000 à 1M de voitures entre 2012 et 2017, puis de 1 à 10M entre 2017 et 2023. Je vous laisse extrapoler 2023-2030 ;-)
III) Part/Pénétration des BEV par pays
Si au niveau mondial les BEV représente 10% du total des immatriculations en 2022, les différences sont énormes entre les marchés :
Moins de 1% au Japon (pourtant le 3ième marché mondial de l'automobile après la Chine et les US, avec ses 4M de véhicules/an). Certainement un "effet Toyota" qui jusqu'à très récemment n'y croyait pas et n'avait mis aucun focus dessus. Le nouveau CEO a mis un c ap radicalement différent, mais c'est bien tardif.
Autour de 5% seulement aux US (mais en Californie le taux est de 16% et cet Etat trustait en 2022 40% des BEV vendus aux US) !
Et 21% sur le 1er marché mondial qu'est la Chine. Résultat d'une stratégie délibérée du Gouvernement chinois depuis une dizaine d'années.
L'Europe (comprenant aussi le UK) est au dessus de la moyenne mondiale avec 14%.
Mais avec la aussi de grandes variations :
Taux très élevé en Scandinavie (dont l'incroyable 80% en Norvège).
Taux très bas en Europe du Sud avec moins de 4% en Italie et en Espagne, moins de 3% en Grèce. A l'exception du Portugal (11%).
La France étant dans la moyenne européenne avec 14%.
Les 15 1ers taux de pénétration des BEV :
IV) Les 10 1ers Constructeurs
Tesla est toujours loin devant, mais il faut noter l'incroyable progression de Byd (quasiment x3 en 2022), et le fait que 5 des 10 1ers constructeurs d’EV en volume sont chinois. Au total, il y a d’ailleurs une centaine de constructeurs chinois de voiture électriques.
On peut être certain que la plupart disparaitront (ou se feront racheter) dans les 10 ans, mais que les plus gros vont venir rapidement chatouiller douloureusement les traditionnels en Europe et, dans une moindre mesure probablement, aux US aussi, avec des price points à les faire blémir (les prix en Chine sont 30% plus bas qu’en Europe, et c’est aussi le cas d’ailleurs pour les Tesla localement).
A noter que Tesla est le seul constructeur de BEV à être réellement mondial, avec des usines sur les 3 continents. Selon toute probabilité, le Model Y devrait être en 2023 le modèle de voiture le plus vendu au monde, toutes catégories confondues.
Je souhaite au passage bonne chance aux constructeurs traditionnels, coincés entre Tesla et les chinois. Je ne vois pas comment on pourrait éviter un gros shake out dans les 5 ans à venir. Ils vont devoir gérer la décroissance, se replier (ie je pense notamment que Ford finira par quitter l’Europe), se spécialiser sur certains segments/niches, certains se faire racheter… Reminder, dans mon post de début février dernier j’extrapolais que les constructeurs traditionnels perdent 30 à 40% de leurs volumes en 2030…
Courte video (quelques minutes) très intéressante sur les progrès du logiciel de pilotage automatique de Tesla ("FSD"). Ci-dessous.
Au curseur 1'50, pour illustrer la qualité du FSD, et sa usabilité, le gars dit carrément : "I've stopped driving, I just don't drive anymore, I let the car do its things...I can now use it at any point...".
Maintenant, même si le FSD était actuellement 99,9% parfait, il faut qu'il le soit à 100%, et ces petits 0,1% de gap à combler pourraient prendre un temps très très long...ou peut-être pas. En fait, personne ne peut réellement s'avancer sur un timing de disponibilité, ça ne fait jamais que 4 ou 5 ans qu'Elon Musk le promet "pour la fin de l'année" (il a réitéré ça aux derniers earnings d'il y a 15 jours).
Mais ma conviction (ou ma croyance, appelez ça comme vous voulez), c'est qu'ils vont bien y arriver, un jour, ce avant tout le monde, et donc avec une avance de très nombreuses années sur la concurrence. Ce jour la, s'il arrive, ce sera totalement game changer, à tous points de vue.
Regardez aussi cette video d'il y a 2 mois d'un chauffeur Uber qui se sert à 99,99% du FSD pour prendre et déposer ses clients (il le laisse juste 3 secondes pour mettre la voiture un peu plus sur le côté) :
Interview avant hier sur CNBC particulièrement intéressante de Jon McNeill, au brillant parcours professionnel en tant qu'executive, et maintenant à la tête d'un start-up studio extrêmement successful, DvX.
Si un Board Member de General Motors aussi crédible montre ostensiblement autant d'admiration, de respect et de confiance en Tesla et Elon Musk en particulier, et qui l'a systématiquement défendu devant les questions critiques voire un peu agressives de l'interviewer, beaucoup devraient sans doute s'en inspirer !
Notamment tous ces prétendus "analystes" qui n'ont pas le 100ème de l'expérience d'entreprise de Jon McNeill...
Et en plus le gars est un ancien top executive de Tesla, connaissant donc très bien Elon Musk personnellement.
Extraits :
"He's incredible at managing his schedule ans staying involved at the absolute key topics".
"Because they have lots of margins they're using that as a weapon".
"Even though they cut prices 6 times this quarter they still have more margins than the industry".
"He's good at deliverying eventually on promises but not on time".
"You're investing in a space which could be 10 times larger in 5 years time than it is today".
Sur les multiples sociétés d'Elon Musk avec des ingénieurs qui sont parfois appelés à travailler pour les autres : "It drives believe it or not some massive breakthroughs"..."There are Space X materials engineers who've really transformed the way Model Y gets produced".
Recent Comments