Entrepreneur & Investor. Co-founder & President Day One Entrepreneurs & Partners, President Plus-de-Bulles. Founder of Photoways/Photobox, co-Founder of Inspirational Stores (Motoblouz).
Swimmer, hiker, diver, wildlife photographer. Proud father of 4.
Après une année 2022 horribilis, Big Tech est revenu en force sur 2023, éclipsant totalement les performances du marché général.
Ceux qui avaient enterré un peu vite la Tech (prolongeant juste le trait sur les tendances 2022) en sont pour leur frais, tant pis pour eux s'ils ne comprennent et ne savent pas prendre en compte les dynamiques d'innovation et de croissance.
J'ai même vu sur Twitter un jeune présomptueux arrogant, je tairais son nom (du moins publiquement, le gars fait commerce de ses prévisions et vend des formations à la Bourse !), qui prévoyait une nouvelle mauvaise année pour la Tech et ne recommandait sur 2023 que 2 valeurs uniquement : Walgreens (WBA) et 3M (MMM). Rationnel : les multiples sont raisonnables (autour de 10x) et elles versent des dividendes à hauteur de 6%. Quel raisonnement puissant et étayé...wow...Bilan : ces 2 sociétés ont perdu plus de 20% depuis le début de l'année…
Ah ces charlatans écervelés, sans background économique et financier sérieux, sans aucune crédibilité objective, qui sur le fond ne font que vivre aux dépends de gogos naifs…qui quelque part le veulent bien...Si je n'ai que du mépris et du dégoût pour ces charlatans, je me demande tout de même si on ne pourrait pas aussi enseigner au grand public le bon sens dans la vie, dans ses choix et ses prises de décisions, enseigner le sens critique et le fait de tout le temps rester factuel, recouper les choses, qui croire, qui écouter, à qui faire confiance pour se faire conseiller...
C’était juste une courte mais nécessaire disgression en ce samedi de début de week-end, retour maintenant aux Big tech.
J'inclus désormais Nvidia dans mon récap, c'est la moindre des choses car avec 770Mds$ c'est devenu la 5ième plus gross market cap du marché (après Apple, Microsoft, Google et Amazon), devant Meta (630Mds$) et Tesla (570Mds$). Une valorisation très "riche" compte tenu du CA de seulement 30Mds$ environ. Quand on est valorisé 25x son CA, il faut délivrer sans relâche une croissance exceptionnelle, or celle de Nvidia est plutôt de l'ordre de 25%/an.
Si c’est une très belle croissance dans l’absolu, c’est néanmoins assez téméraire de justifier dans ces conditions une telle valo, mais Mr Market s'est clairement entiché de Nvidia (ainsi que d'autres valeurs "IA" par ailleurs) et se montre donc très généreux dans sa dote de P/E. Combien de temps ses amours et sa générosité à l'égard de Nvidia (certes une très belle jeune fille) dureront, anybody's guess...Les bulles, ça gonfle un certain temps avant d'éclater...
A voir le graphique et les performances ci-dessus, on a l'impression qu'Apple est un peu rentré dans le rang sur 2023 en terme de croissance de l'action vs celle de ses pairs Big Tech. C’est factuel, mais pour relativiser, il faut aussi prendre en compte qu'elle avait bien mieux résisté en 2022, et de facto c'est celle qui est toujours aujourd'hui la plus proche de son plus haut historique (182$ le 4 janvier 2022), ci-dessous.
Au contraire comme on le voit ci-dessus, Tesla a elle une grosse marge avant de retoucher son plus haut de l'automne 2021 (au dessus des 400$ l'action), qui était de fait un niveau totalement excessif et bullesque, la valorisant 23x son CA d'alors (clin d'oeil et parallèle aux 25x de Nvdia actuellement !). Dans un post de début d'année j'extrapolais que je ne la voyais pas retoucher son plus haut avant la fin 2024 (basé sur sa croissance et sur mes prévisions de CA et de bénéfice, et un multiple plus "rationnel"), mais comme toujours et comme tout ce qui touche aux prévisions boursières court terme, à prendre avec un gros grain de sel car la « rationalité » n’est là que sur le long terme en Bourse, et à ne surtout pas prendre comme base de décision. Mr Market peut très bien s’énamourer de nouveau de Tesla et faire flamber irrationnellement l’action…comme tomber dans un état dépressif…
En 2021, dans son chemin vers les sommets, Tesla était déja ponctuellement clairement trop cher à 10-12x son CA de l’époque, ce qui ne l’a pas empêché de poursuivre, à 15x, puis à 20x…pour culminer à 23x, avant de redescendre à 5-6x aujourd’hui, donc une division par 4 (comparaison Apple est à 7x). Comme je mettais plus haut, une bulle ça finit par se dégonfler, c’est une certitude, mais difficile de savoir quand. Comme toujours en Bourse, le what est clair, le when beaucoup moins (sauf pour les Madames Irma et autres astrologues de la Bourse qui évidemment prétendent savoir).
Pour ma part, la seule chose que je vise et la base sur laquelle j’ai pris une décision long terme c’est 2000$+ vers 2030, que l’action soit à 200 ou 500$ fin 2024 n’a aucune espèce d’importance à ce stade. Sauf qu’en 2024 si l’action n’est qu’à 200$ je pense que je me régalerais de l’aubaine, mais on verra cela en temps voulu.
Sur le fond, j'ai envie de dire pour Tesla, en français dans le texte : "being a Telsa shareholder is a cahotic and wild journey, enjoy the ride !". Mais c'est également surtout un voyage intellectuellement passionnant si on s'intéresse d’abord aux développements économiques de l'entreprise et ses nombreuses innovations disruptives qui vont bien au delà des véhicules électriques : la conduite autonome, la robotique, l'IA, etc.
Il est encore plus intéressant d'avoir une perspective moyen terme et de voir la croissance depuis l'avant Covid, avec le tiercé gagnant Nvidia, Tesla et Apple. Ce alors qu'Amazon et Meta sous performent le marché de façon assez nette, subissant ce qu'on pourrait appeler une crise de modèle. Grâce à ses fortes réductions de coûts et de capex depuis 6 mois Meta a rebondit, mais quid du top line dans le futur, quid du développement du « metaverse » et de sa monétisation ? Je ne dis pas qu’ils ne trouveront pas, mais qu’à ce stade c’est juste une question mark.
Les principaux constructeurs traditionnels sous performent tous le marché (+5% pour le S&P 500), de même que les nouveaux acteurs de l'électriques concurrents de Tesla, à l'exception de Li Auto.
Stellantis est le plus performant des traditionnels, mais il faut garder en tête qu’ils gagnent beaucoup d’argent sur les véhicules thermiques, car ils ont fortement augmenté les prix (de fait je pense qu’ils « milkent » le marché), tout en ayant réduit les frais de structure, mais en perdent aussi significativement actuellement sur le segment des VE qui est celui du futur. VW a d’ailleurs avoué il y a quelques jours qu’ils ne pensaient pas arriver à avoir les mêmes marges avec les VE avant 2026…Et Ford a lui aussi officiellement dévoilé il y a quelques semaines ses pertes colossales sur les VE.
Il est donc logique que les traditionnels cherchent à ralentir l’accélération de la transition vers l’électrique (qu’ils savent cependant bien inéluctable, et ils investissement massivement pour cela), afin d’avoir le temps d’améliorer leurs economics.
Mais le jeu de Tesla, et sa mission, c’est d’accélérer cette transition, et baisser le prix de ses voitures rentre évidemment dans ce cadre. J’imagine le nouveau Big Bang qu’il va y avoir fin 2024 quand le « Model 2 » de Tesla à 25K€ commencera à être disponible.
Après avoir été à l'Elysée la veille au matin avec E. Macron, puis à Versailles dans la soirée, Elon Musk était hier de retour à Austin, Texas, pour l'Assemblée Générale Annuelle des actionnaires Tesla. Je l'ai trouvé franchement très en forme (à Paris il avait des petits yeux fatigués par contre), focus, optimiste, et avec de l’humour.
De manière générale, beaucoup d’énergie positive lors de cette Assemblée Générale, même si aucune nouvelle réelle news.
Les key points que j'ai notés hier soir (également de l'interview qui a suivi avec David Faber) :
Démentissant les fake rumeurs du Wall Street Journal de semaine dernière : "No plan to step down as CEO". Rappel, ça avait bien fait chuter l'action semaine dernière (ça devrait donc repartir dans l'autre sens aujourd'hui en toute logique, mais bon, Mr Market et logique ne font pas toujours bon ménage).
Tesla, comme le recommandaient avec insistance certains actionnaires institutionnels, va s'essayer à faire un peu de pub : "It's worth a try...as long as it's effective". ""We'll try out a little advertising and see how it goes". Ce qui a bizarrement suscité un tonnerre d’applaudissements de la salle, comme si c’était un game changer, et ce à la grande surprise aussi d’Elon « I was not expecting that level of enthousiasm». En réalité, Elon avait déja dit il y a quelques années qu’il n’était pas dogmatiquement contre la pub et qu’un jour viendrait où Tesla pourrait en faire…
"Tesla is an AI company". « Tesla has the most advanced real world AI, by far ». Intéressant à l’heure où on commence à voir poindre une bulle sur les valeurs IA (Nvidia, par exemple, est valorisée plus de 20x son CA et 60x ses résultats 2024...) ! Bon, OK, le marché ne voit pas encore Tesla comme cela à ce stade, mais ça pourrait/devrait changer dans le futur, et j’imagine que Musk va s’y employer. Laissons encore 12-18 mois couler, et ça devrait être bien plus flagrant.
Sur le plan macro, Musk pense toujours que la situation risque d'être difficile pendant encore 12 mois, et Tesla n'est pas "immune to global economic environment".
Question cours de l'action, Musk a recommandé de ne pas regarder pendant 12 mois (...) mais que s'il y avait un dip il fallait acheter, et que le reward serait huge à terme...
Model Y : Musk est confiant que ce sera le véhicule le plus vendu au monde cette année. Ca me parait en effet quasi acquis.
Tesla travaille sur 2 nouveaux produits qui à eux 2 devraient faire 5M d'unités. Hypothèse : l'un d'entre eux est certainement le "Model 2", la voiture autour des 25K$/€, l'autre pourrait être un refresh du Model 3 ? Aussi bien le design de ces produits que les manufacturing techniques sont "head & shoulders above everything else". Impatient de voir...
L'objectif des 20M d'unités en 2030 encore et toujours réitéré.
Chine : aucun problème de demande, la limite est la capacité de production.
Chine : la prédiction de Musk est que l'invasion de Taiwan par la Chine est inévitable (pas très cool ça). Ca veut certainement aussi dire que Tesla a déja travaillé sur ce scénario et y est préparé.
Le Cybertruck arrive bien cette année, still on track...mais sans doute avec du retard. Musk a précisé qu'il était très compliqué à produire ! Elon bullish, clamant qu'il sera encore mieux qu'attendu (« if anything, better than expected »), et dieu sait qu’il est attendu ce Cybertruck, et Morgan Stanley prédit que ce sera une « voiture culte ». Question volume anticipé, Elon a parlé de 250-500K à terme.
Le Roadster pourrait commencer à être produit en 2024 (ça reste du conditionnel !).
Sur Twitter, Musk a admis que c'était une "short term distraction", qu'il avait dû recourir à une "major open-heart surgery" mais que maintenant Twitter était une "stable place".
Allez, en ce début de week-end, un petit travail de fond, thought-provoking, sur les styles et les approches contrastées entre Warren Buffett et Elon Musk, que j'admire tous les 2, mais pour des raisons différentes !
Le week-end dernier, lors de l'assemblée annuelle de Berkshire Hathaway, Warren Buffett a totalement écarté la considération d'investir dans Tesla à court terme, j'en avais parlé il y a quelques jours ICI.
En synthèse, le secteur va demander de très lourds investissement, les positions concurrentielles sont encore trop ouvertes, et on ne peut pas savoir qui va gagner, s'imposer, et en tirer les fruits. Donc trop de risque, comme pour tout secteur neuf en très forte croissance, pour lequel c'est "just the begining" !
Ce n'était pas un avis contre Tesla, mais sur le secteur en général. Sur le principe même, rien à dire la dessus, même si mon analyse donne que Tesla possède bel et bien des avantages concurrentuels indéniables et pérennes.
Quelques jours plus tard, Elon Musk s'est lui moqué de l'approche de Warren Buffett et des "moats" que ce dernier recherchait quand il investissait dans une entreprise. Littéralement, la "moat" ce sont les douves d'un château fort, à savoir le fossé rempli d'eau qui permet d'être quasi inexpugnable, du moins de défendre la position avec les plus grandes chances de succès. Relatif au business, une moat représente l'avance prise par une entreprise avec ses technos, ses parts de marchés captives, sa cost position, etc, qui la protège de la concurrence et lui permettrait de garder son leadership, et sa rentabilité, sur le long terme.
Elon Musk : "moats are lame" (en clair, c'est bancal comme concept). "Ce qui compte c'est le rythme d'innovation", voir cette courte video :
Dans la réalité, les 2 ont portant raison...mais pas au même moment, et pas dans les mêmes contextes !
Dans le "Venture" qui est tout de même un peu mon métier avec Day One, on parie avant tout sur l'homme et sa capacité à tirer le meilleur d'un secteur naissant que l'on considère à fort potentiel, où la techno joue un rôle important, de même que l'innovation (qui n'est pas que technologique, loin de la, ça peut être le produit, le canal de distribution, l'image et le marketing, la supply, etc).
Quand on investit à un moment t, certes il y a parfois déja une techno dispo (ou un début de techno), un produit, un peu de CA éventuellement, un modèle économique plus ou moins calé, et tout cela confère une certaine confiance (ou pas), mais de fait on sait que tout est amené à fortement évoluer dans le futur (et on sait que les BP sont quasiment jamais respectés !). Et in fine, ce qui va faire le succès de l'entreprise c'est la capacité du managementfondateur à naviguer mieux que ses concurrents, dans un terrain mouvant et inconnu qu'il faut défricher, donc à s'adapter sans cesse aux réalités du marché, à innover mieux et plus vite que les autres, et à poser progressivement un business model vertueux.
L'homme, l'homme et encore l'homme !
Oui le secteur et ses economics jouent toujours in fine un rôle, du moins à terme, mais :
Un entrepreneur accompli, dans un bon secteur, en tirera le meilleur et mieux que ses concurrents. Et dans un secteur pourri, il comprendra la situation et travaillera vite sur un pivot pour se sortir du merdier, ce avant que les finances ne se dégradent trop. C'est ce que nous avions fait en notre temps avec mon associé Martin Genot sur "Inspirational Stores" à la fin des années 2000 : malgré une levée de 10M€ en 2008 (en plein coeur de la crise financière !), comprenant à quel point c'était un secteur sans avenir, nous avions discrètement entamé un pivot à 180°, arrêtant totalement notre métier de la "délégation eCommerce" pour racheter Motoblouz, avant de très bien revendre l'entreprise en 2016. Le secteur était d'ailleurs tellement pourri que tous nos concurrents de l'époque sont soit mort (l'un d'entre eux, malgré 15M€ de levés, s'est fait racheter pour 1€ symbolique), soit ont végété et bricolé sans réellement créer de valeur.
Un mauvais entrepreneur, même dans un excellent secteur question dynamique et economics, va se faire dépasser et battre par ses concurrents meilleurs que lui. Plus le secteur est d'ailleurs attractif, plus il va attirer la concurrence, logique et inéluctable. Et le mauvais entrepreneur, qui ne comprendra pas non plus qu'il est dans un mauvais secteur, va vouloir s'accrocher en vain sans chercher d'autres voies de création de valeur.
En venture, comme les choses ne sont initialement pas établies (et en very early stage il n'y a d'ailleurs rien d'autre qu'un homme, une équipe, et une idée), que l'avenir reste encore intégralement à écrire, c'est bien l'homme et son talent qui fait toute la différence. Et quand vous misez sur l'entrepreneur gagnant, un Bill Gates, un Steve Jobs, un Jeff Bezos, un Mark Zuckerberg, etc, vous obtenez in fine un return extraordinaire, du x100 schématiquement est possible (c'est par exemple le cas de Tesla depuis son IPO).
Mais la réalité est aussi que pour un Steve Jobs ou un Bill Gates, 2 entrepreneurs visionnaires doublés chacun d'un redoutable sens des affaires et de la négociation, au pragmatisme business sans faille, qui vous apportera du x100, vous aurez 1000 entrepreneurs plus ou moins bons qui vous feront du x0 à x3 (ce parfois par pur chance, un corporate fortuné peut vous racheter à fort prix, pensant à tort qu'il tient une vraie pépite "stratégique" pour lui !).
Et compliqué a priori de spotter en amont les vraies stars, certains entrepreneurs charismatiques et extrêmement ambitieux, qui donnent clairement envie, sont parfois juste des lunatiques, et peuvent alors vous faire perdre des fortunes. Masayoshi Son de Softbank en sait quelques chose avec, par exemple, Adam Neumann de WeWork.
Quand on se plante en venture, on se plante surtout, voire essentiellement, sur son diagnostic de l'homme, de l'équipe. Et les raisons sont nombreuses, pas assez tenace, pas assez créatif, pas assez analytique et ne regardant pas assez les metrics, pas assez proche des besoins des clients, pas assez bon négociateur, ne sachant pas manager et s'entourer de compétences fortes, pas assez à l'écoute des multiples signaux du marché, etc. D'aucuns psychologues argumenteront aussi que le % de psychopathes chez les entrepreneurs est largement supérieur à la moyenne et approcherait les 15%. A débattre, mais je peux prendre les paris que tous les VC de la place ont eu affaire à ça...
L'approche de Warren Buffett est totalement différente, il mise lui principalement sur une situation économique à un instant t, où les positions concurrentielles sont déja si fortement établies et stables qu'il pense non seulement pouvoir en extrapoler le futur mais qu'il pourrait également et éventuellement se passer d'un excellent manager (ponctuellement !). Ce dernier (qui est éventuellement un entrepreneur, ie Rose Blumkin avec le Nebraska Furniture Mart ou Richard Santulli avec Netjets, quand Warren a acheté ces 2 entreprises) est certes important, mais moins que le secteur lui-même et ce qu'apporte la maturité de l'entreprise, sa stabilité concurrentielle et ses economics.
Warren Buffett déclarant d'ailleurs qu'il cherche des entreprises "tellement fortes et solides que même un idiot pourrait les gérer sans les affecter, car tôt ou tard ce sera le cas" !
Il ne cherche pas à faire du x20+ en 5-8 ans comme un VC, mais plutôt, schématiquement du x10 sur 20 ans, et ce avec une forte probabilité et une faible variabilité. Ce qu'il résume très bien en disant que si on fait ce genre de performance sans connaître de cata totale (ce qui arrive nécessairement et fréquemment dans le venture), on aura au final une très belle performance. Ce qui est non seulement sur le principe mécaniquement vrai, mais que Warren a aussi prouvé sur la distance mieux que quiconque (avec un TRI moyen de l'ordre de 20%/an pendant 50 ans !).
A contrario, le venture cherche lui le "home run", du x20+ et plus en 5-10 ans, mais accepte aussi en parallèle de tout perdre sur un certain nombre de dossiers. C'est intégré dans le modèle, et si, par exemple, sur 10 investissements il y en a 1 qui fait du x10, 5 qui font entre x2 et x3, et 4 où c'est la cata, la performance globale restera très bonne. Certains investissements sont même des "fund returner" à savoir qu'à eux seul ils payent l'intégralité du fonds (ce fut par exemple le cas de Facebook pour Accel, ou de Blablacar pour ISAI).
Une approche analytique basée sur des avantages concurrentiels et des "moats", "à la Warren Buffett", ne peut par définition par marcher quand un secteur est encore trop jeune et trop incertain, où les positions ne sont pas encore prises, où les barrières d'entrée ne sont par définition qu'encore naissantes (ça m'a d'ailleurs toujours fait rigoler ces VC qui vous challengent lors des pitchs en objectant "qu'il n'y a pas de barrières d'entrée", c'est par définition le cas !). Dans ce genre de contexte économique, le seul curseur différenciant c'est l'homme, l'entrepreneur. Il n'y a pas encore de "moat", mais celle-ci sera édifiée progressivement sur la durée par les bons entrepreneurs.
Si je crois que Tesla a bel et bien des avantages concurrentiels bétons qui devraient être pérennes dans le temps, je suis aussi néanmoins le 1er à dire que ceux d'Apple sont encore bien plus tangibles, établis et solides ! Une réalité attestée d'ailleurs aussi tout simplement pas l'exceptionnel niveau de marge brute, stable et même en hausse sur le terme (alors que les marges de Tesla fluctuent beaucoup, et d'aucuns sont même inquiets pour le futur).
Non seulement une approche venture ce n'est pas le style de Warren Buffett, lui qui initialement était d'ailleurs "deep value" (il a évolué grâce à Charlie Munger, préférant "a great company at a fair price" à "a fair company at a great price"), mais ce serait aussi inadéquat pour Berkshire Hathaway, qui gère aujourd'hui des centaines de milliards, et qui recherche donc des "éléphants". A savoir des entreprises dont ils ont tellement confiance dans le futur en raison des "moats" établies, qu'ils peuvent mettre de très gros paquets d'argent dessus, se comptant en milliards voire en dizaines de milliards (ie une mise de 36Mds$ sur Apple en 2016-2017).
Une approche venture, par définition bien plus risquée, ne permet pas d'investir des milliards sur une seule entreprise, ni même de mettre un trop gros % de son fond sur une seule entreprise.
A l'extrême, on voit sur Twtter des "Tesla fans" qui se gargarisent d'être "all-in" sur l'entreprise, à savoir qu'ils ont même revendu leur baraque pour mettre le placement uniquement sur Tesla ! Inutile de dire comment je qualifie cette prise de risque...Disons juste, pour être politiquement correct, que ça manque sérieusement de "rationnel" ! Il faut voir Tesla comme un investissement de type venture et y allouer le % de son patrimoine en rapport. Si j'ai déja dit que je n'aurais pas de problème qu'à terme Tesla représente 25% de mon patrimoine, c'est très loin d'être le cas actuellement, et si ça le devenait c'est que Tesla aurait justement super performé. Exactement comme Apple, qui faisait bien moins de 10% de Berkshire Hathaway initialement, et qui maintenant en représente plus de 20% (et 45% de leurs placements boursiers), parce que "it just happens to be a far better business than our other businesses", dixit Warren.
Sur le marché de l'automobile :
Warren Buffett, en business analyst génialement rationnel qu'il est, voit un secteur incertain, avec la montée d'une techno - les véhicules électriques - qui rabat les cartes et rend les economics et les positions mouvantes, avec de gros capex, et aucun acteur pouvant raisonnablement être certain d'être l'archi leader dans 10 ans.
Elon Musk, en technologist visionnaire qu'il est, et qui maîtrise tout de même déja pas mal de choses question production efficace de voitures électriques, estime que par les multiples innovations qu'il a déja en tête, à de nombreux niveaux (pas uniquement produit, mais aussi manufacturing, supply chain, software, etc), il saura conserver et même amplifier son lead actuel.
Warren Buffett mise avant tout sur une situation et des economics établies, puis sur un manager (à qui il demande d'être 3 choses 1/ intelligent, 2/ énergique et 3/ honnête, précisant avec humour et pragmatisme que si la 3ieme compétence n'est pas la les 2 1ères vont vous tuer !), mais dans le cas de l'automobile, avec la rupture induite par plusieurs technos (électricité, software, IA/Autonomie), on est de fait (et malgré l'ancienneté du secteur) dans un contexte "venture", il faut d'abord miser et croire en Elon Musk (ou pas), avec des economics actuels certes très bons mais qui restent de fait encore très mouvants et incertains vu la jeunesse et l'immaturité du marché.
Warren Buffett et Charlie Munger ont de fait parfaitement raison quand ils analysent qu'actuellement les consommateurs changent sans problème de marque de voiture, que ce n'est pas un business sticky, c'est juste un constat indiscutable aujourd'hui et les voitures sont assez commoditisées en fait (pour 99% du marché, je ne parle pas du segment luxe/hyper sportives). Mais demain, la valeur du hardware devrait s'effacer devant la force du logiciel et de l'écosystème proposés par les marques, et je pense qu'on devrait aboutir à un business "à la Apple", ie une base installée générant de confortables revenus récurrents et quasi récurrents (pilotage automatique, recharge, assurance, etc).
C'est une évolution lourde et extrêmement rentable du business model, ce n'est pas le style de Warren de faire ce genre d'extrapolation et de prendre ce genre de paris (ils ne l'ont d'ailleurs pas pris à la fin des années 2000/début des années 2010 quand l'iPhone et l'écosystème d'Apple étaient en montée en charge, ils ont attendus 2016 et des preuves tangibles), mais moi je le prends...sans doute en avance de phase sur eux !
Mon reward n'en sera que plus grand...mais à cet instant le risque l'est tout autant ! Du moins sur le principe et de loin. Car le vrai risque c'est juste de ne pas savoir ce qu'on fait, d'investir dans ce qu'on ne comprend pas vraiment. Or mon analyse fondamentale des avantages concurrentiels de Tesla me laisserait plutôt penser qu'il n'y a sur le fond pas tant de risque que cela.
Sur les 10 dernières années, jouissant à la fois d'une trésorerie initialement pléthorique et d'un free cash flow qui l'est tout autant année après année, Apple a employé près de 600Mds$ à racheter ses propres actions, ce qui a permis d'une diminuer le nombre de 25% à peu près.
Voici le tableau sur les 7 dernières années, avec le montant des buybacks (colonnes bleues) ainsi que le prix moyen de rachat de l'action (ligne rouge). On en est actuellement à environ 90Mds$ par an. Au dernier trimestre c'était 20Mds$ de dépensés à un cours de 150$ de moyenne, mais au Q1 2022 (Q2 2022 fiscal), c'était 23Mds$ à 165$ de moyenne (je rappelle qu'Apple a atteint son plus haut historique de 182$ début janvier 2022, avant de refluer progressivement jusqu'à un plus bas de 125$ début janvier 2023...puis de vite remonter !).
Dans le futur et d'ici à 2030, je fais l'hypothèse qu'Apple va encore investir plus de 800Mds$ pour racheter ses propres actions, ce qui devrait en diminuer le nombre par 20% environ pour tomber autour des 12-12,5 Milliards contre 15,7 Milliards actuellement.
Je redonne mes lignes d'horizon pour 2030 :
CA : autour des 1000Mds$ (vs 400Mds$ en 2023).
Net profit : 300Mds$ (vs pas loin de 100ds$ en 2022)
Market Cap base 28x le net profit : autour des 8000Mds$
Soit une action proche des 700$
On aurait bien ainsi du x4 à attendre d'ici à 2030 sur le cours de l'action, soit aussi un très sympathique rendement moyen supérieur à 20% par an. Et ce avec un degré de probabilité franchement important (je reprends Warren Buffett cité dans le post précédent : "it's better to identify opportunities with more certainties. I think I know where Apple’s going to be in 5 or 10 years...").
A noter que la philosophie d'Apple d'employer continuellement son cash excédentaire pour racheter ses propres actions, mois après mois et année après année, quel que soit le cours de Bourse (donc sans jamais chercher à "timer" le marché et deviner en vain le sens du vent), est aussi exactement ce que je recommande de faire, ce évidemment sur des entreprises ayant une forte dynamique positive top et bottom line, et qui vont donc mécaniquement créer de la valeur. C'est simple, c'est serein, et c'est surtout mécaniquement et automatiquement gagnant !
C'est certes grisant de rêver à des petits profits rapides, mais pourquoi se compliquer la vie quand on peut faire simple et gagnant avec un bien plus fort degré de certitude ? Pourquoi vouloir prendre des risques à trader et timer le marché quand il y a des stratégies gagnantes à tous les coups ? Franchement, la perspective de quadrupler son patrimoine en 7 ans devrait déja être suffisamment excitante pour dissuader de chercher à "finasser" non ?
A noter que pour Tesla je pense qu'on aura du x10, mais ceci néanmoins avec un degré d'incertitude bien plus fort que des x4 d'Apple. D'où le fait que j'ai les 2 ;-)
Tout en reprécisant encore et toujours qu'on ne doit investir en Bourse que le cash strictement excédentaire dont on n'a absolument pas besoin pour les 10 ans à venir (ce qui est exactement ce que fait Apple).
Ce week-end a eu lieu à Omaha, Nebraska, le "Woodstock du capitalisme", c'est en effet ainsi que l'on a baptisé l'assemblée annuelle de Berkshire Hathaway, le conglomérat d'investissement de Warren Buffett, au 20% environ de TRI annuel depuis sa création il y a plus de 50 ans !
Sans toutefois en parler directement, lui et Charlie Munger ont indirectement expliqué pourquoi ils ne se voyaient pas aujourd'hui investir dans Tesla. En synthèse, le secteur et ses economics ne sont au final pas assez prévisibles pour eux à ce stade, avec 2 arguments :
1/ L'incertitude au niveau des coûts et des investissements
Charlie Munger : "the electric vehicle is coming big time, and that’s a very interesting development". "At the moment, it's imposing huge capital costs and huge risks, and I don't like huge capital costs and huge risks."
2/ Secteur extrêmement concurrentiel, peu "sticky", pas de grand archi leader pérenne
"Charlie and I long have felt that the auto industry is just too tough. It’s just a business where you’ve got a lot of worldwide competitors, they're not going to go away, and it looks like there are winners at any given time, but it doesn’t get you a permanent place."
"It's premature to declare any winners in the electric vehicle competition... There's just too much uncertainty in the sector".
"Henry Ford looked like he owned the world with the Model T ... and 20 years later they were losing money."
"You will see a change in the vehicles, but you won't see anyone that owns the market because they changed the vehicles".
Et Warren Buffett donc de résumer en mettant l'accent sur le manque de certitude du secteur et en donnant la comparaison avec Apple : "it's better to identify opportunities with more certainties". "I think I know where Apple’s going to be in 5 or 10 years, and I don't know what the car companies are going to be in 5 or 10 years".
Je suis 100% en ligne concernant Apple (re, je vois Apple à 1000Mds$ de CA et l'action à 600-800$ en 2030, relire ICI ou encore LA), sur le fond ce sont des arguments fondamentaux tout à fait recevables et légitimes, et je préfère d'ailleurs largement débattre la dessus que sur le sens de l'action Tesla à court terme, qui est anybody's guess (et qui n'a aucun intérêt quand on est investisseur long terme) ! Oui il va y avoir énormément d'investissements, oui les economics vont encore largement évoluer, et oui le business de la voiture est peu sticky aujourd'hui, les consommateurs changent assez (voire très) facilement de marque.
Donc, à ce stade, la décision de Berkshire Hathaway de ne pas miser sur le secteur est tout à fait rationnelle dans leur logique. Aujourd'hui, c'est juste trop tôt, et comportant trop de risque à leurs yeux.
Mais, de même que Warren n'a commencé à comprendre la stickyness et la force du modèle Apple qu'en 2016, quand l'entreprise faisait déja plus de 200Mds$ de CA et gagnait 45Mds$ de profit net, je pense qu'il va falloir encore un peu de temps pour que Berkshire Hathaway ne réalise la qualité et la solidité intrinsèque du modèle Tesla, et que celui-ci prouve bien sa stickyness. Et je pense que ce sera le cas, grâce au réseau de superchargers, grâce aux logiciels, et notamment la conduite autonome.
A noter aussi que quand Buffett a commencé à miser sur Apple en 2016, l'entreprise entamait une phase de croissance très modérée, et elle était même en décroissance cette année la. Depuis 2015, Apple n'a en effet cru son CA que de 7% seulement en moyenne par an (2015 calendaire : 235Mds$, 2022 : 388Mds$). Contraste fort avec les 7 années précédentes où Apple a connu une croissance annuelle proche des 40% ! Buffett a investi dans Apple quand il y avait des certitudes sur la qualité et la pérennité du modèle long terme, et la génération de free cash flow mais...plus de croissance explosive (et donc aussi bien moins d'investissement capex vs le CA).
Le style Warren Buffett, ce sont des entreprises présentant une forte certitude de bonne croissance des bénéfices et du free cash flow sur les nombreuses années à venir, mais pas non plus des croissances exponentielles, qui viennent mécaniquement avec forcément bien plus de risques et de lourds investissements obérant le free cash flow. Berkshire préfère investir quand les choses sont bien plus stables, avec des certitudes plus affirmées sur les avantages concurrentiels, les positions et les economics. Les gros business leader consumer goods avec clientèle sticky (ie Coca, Gillette, Heinz, mais aussi maintenant Apple) sont parfaits pour cette stratégie.
Mais tout comme Warren Buffett, je mets avant tout l'accent sur les avantages concurrentiels pérennes, et je pense que Tesla en possède de nombreux comme je l'ai déja étayé (notamment ICI), et ce sont bien ceux-ci qui amèneront dans quelques années une entreprise extrêmement solide et rentable, dégageant des montagnes de cash. Ma conviction est que Tesla sera quelque part l'Apple du futur, puissance 5...et en est aujourd'hui là où Apple était au tout début des années 2010.
Berkshire Hathaway cherche avant tout à avoir de très bons rendements avec un grand degré de prévisibilité et donc de probabilité, plutôt que d'avoir des rendements de dingue, mais avec une probabilité plus faible car plus de risque.
Autres commentaires sur Elon Musk entendues ce week-end, signe de beaucoup de respect et d'admiration de la part de Charlie et Warren :
"He would not have achieved what he has in life if he hadn't tried for unreasonably extreme objectives"(Charlie Munger)
"He likes taking on the impossible job and doing it...We're different. Warren and I are looking for the easy job". (Charlie Munger)
"It's a dedication to solving the impossible, and every now and then he'll do it". (Warren Buffett)
A noter aussi tout de même que Berkshire Hathaway possède pour environ 1,5Mds$ d'actions General Motors (donc pas grand chose relativement) ainsi qu'un groupe de concessions automobiles regroupant 102 franchises représentant 27 marques et couvrant 10 états américains. On y retrouve quasiment tous les concurrents occidentaux de Tesla : Toyota, VW, Mercedes, BMW, Honda, Hyundai, etc.
Avec le Covid, il y a eu en 2020-2021 la flambée des valeurs techno, puis en 2022 la marée s'est brutalement retirée...
Et on voit ainsi maintenant les entreprises qui restent débout car elles jouissent d'un modèle solide et d'une belle dynamique, à même de justifier une croissance de leur cours de Bourse...et les autres !
Bilan de la marée :
Les entreprises qui ont flambé (autour des 300% de hausse) : Tesla et Nvidia.
Les entreprises qui ont connu une grosse progression (autour de +100%): Apple et Microsoft.
Celles qui ont connu une progression décente (+30 à +50%) : Google et Shopify.
Celles qui sont quasi stables (de 0 à +15%) : Spotify, Amazon, Meta, Netflix.
Celles qui ont plongé (-15% et pire) : Zoom, Docusign, Peloton.
Et la seule entreprise qui est aujourd'hui tout proche de son plus haut historique (atteint début janvier 2022) c'est ....Apple !
Mes estimations données hier pour Apple étaient globalement justes (top et bottom line), et celles-ci ont bien largement dépassé le consensus des analystes de Wall Street, mais également les propres estimations internes de Cupertino, qui avait été de fait un poil trop pessimiste pour ce trimestre.
Apple montre une fois de plus l'incroyable force et la qualité de son modèle, naviguant avec brio un contexte économique compliqué et des perturbations diverses.
CAglobal : 94,8Mds$, -3% vs les 97,3Mds$ de 2022. Malgré 5% de headwinds Forex, on aurait sinon eu un trimestre record en croissance de quelques %.
iPhone : 51,3Mds$, record pour un Q2, +1% vs 50,6Mds$ 2022
Mac : 7,2Mds$, -31% vs 10,4Mds$ (grosse chute comme prévu)
iPad : 6,7Mds$, -13% vs 7,6Md$ (chute sensible comme prévu, comparaison difficile avec l'année dernière où l'iPad M1 était introduit)
Wearables & Accessories : 8,8Mds, stable vs 2022, ce qui est une très bonne surprise. Record trimestriel cependant aux US et en Chine. La base installée de Watch continue de fortement croître.
Services : 20,9Mds, +5% vs 19,8Mds$ 2022. La croissance des services illustre parfaitement la force de l'écosystème Apple. 975M d'abonnements payants, +18% vs les 825M l'année dernière.
Marge brute globale : 44,3% vs 43,7%, hausse qui reflète la force de l'iPhone et la part plus importante des services dans le CA (22% vs 20%)
Marge brute hardware : 36,7 vs 36,4% (idem iPhone)
Marge brute services : 71% vs 72,6% (il y a du y avoir un mix services différents, ceux qui incorporent du contenu sont relativement moins rentable qu'Apple Care ou la pub par exemple, cette dernière ayant été affecté par le contexte macro. 45% de la marge brute d'Apple ce trimestre provient des services !
Net Profit : 24,2Mds, -3% vs 25Mds$ (et 22.6Mds$ attendus par le marché). A noter que ce résultat est obtenu sans qu'Apple ait eu recours à un plan de licenciements massifs comme on fait les autres GAFAM. La rigueur et prudence de gestion, Apple connait depuis longtemps, et c'est aussi à ça qu'on voit à quel point Tim Cook est un excellent CEO.
EPS : 1,52 vs 1,52$ (merci au programme de rachat d'actions, encore 19Mds$ ce trimestre, et donc avec moins de profits l'EPS reste identique). Rappel, le marché attendait 1,43$, on a donc un beat significatif; traduction pour les boursicoteurs spéculateurs, l'action devrait grimper aujourd'hui. En ce qui me concerne, on est dans une continuité, les targets n'ont pas changé depuis 2 ou 3 ans, et je vise autour entre 600 et 800$ en 2030, et les soubresauts ponctuels ne sont pas trop mon sujet.
Operating Cash Flow : 28,6Mds$, au dessus des 28,2Mds$ de l'année dernière, et donc un nouveau record trimestriel. Dit différemment, Apple a généré un eu moins de profit, mais un peu plus de cash opérationnel. Sur cette metrics clé, c'est absolument remarquable. Question Cash, comme je mettais hier, Apple reste le roi incontesté. Et, après tout, c'est ce qui compte plus que tout.
Cash & debt : 166Mds$ et 110Md$, net cash 57Mds$ (effet d'arrondi).
Share buyback : Apple dégageant bien plus de cash qu'il en a besoin, le Board a autorisé 90Mds$ supplémentaire de rachat d'actions (soit 3% de la market cap actuelle).
Au dela de ces key metrics, points saillants :
Très long couplet de Tim Cook qui a tenu à insister sur l'impact d'Apple sur l'humanité et l'environnement. je le mets en intégralité car ça me semble finalement encore plus important que les chiffres eux-mêmes. Et peut-être que ces chiffres sont aussi le reflet des forte valeurs d'Apple...
"We're constantly striving to make a positive difference in people's lives and be a force for progress. We're investing in education to give students the skills they need to shape the future. We're helping to create pathways of opportunity for communities of color through our Racial Equity and justice initiative. And every day we're building an even more inclusive and diverse Apple rooted in our culture of belonging. To better understand how our work intersects with our values, look no further than what we're doing for the environment. We just celebrated Earth Day in April, and during that month, Apple announced that its global manufacturing partners now support over 13 gigawatts of renewable energy, a nearly 30% increase in just the last year. This translates to 17.4 million metric tons of avoided carbon emissions, the equivalent of removing nearly 3.8 million cars from the road.
We're all investing up to an additional $200 million in our Restore Fund, which is designed to support innovative, scalable, nature based carbon removal projects, with the goal of removing 1 million metric tons of carbon every year. These are just the latest steps on our journey toward our 2030 goal to be carbon neutral across our supply chain and lifecycle of our devices. At the same time, we're advancing renewable energy across our supply chain, we're also sourcing more recycled materials in our products. Last month, we announced our plans to have all Apple design batteries include 100% certified recycled cobalt by 2025, and we remain committed to one day using only recycled and renewable materials in our products. We have a deep sense of mission here at Apple. We believe in the power of innovation to build a better world. We are determined to do our best work on behalf of our customers and to give them the tools that can enrich lives. So we will manage for the long term, just as we always have, with our eyes to the horizon, with limitless creativity, and with a deep belief that we can achieve anything we put our minds to".
Ce fut un trimestre de records absolus dans un certain nombre de pays en développement : "We were particularly pleased with the performance we saw in emerging markets and achieved all-time records in Mexico, Indonesia, the Philippines, Saudi Arabia, Turkey and the UAE".
Apple anticipe un Q2 calendaire à la hauteur du Q1, donc globalement relativement difficile en terme de comparaison et de croissance, mais au moins il n'y a pas de dégradation, et même une petite amélioration question forex (4% d'impact vs 5% ce trimestre).
L'Inde comme nouvelle frontière : "Looking at the business in India, we did set a quarterly record, grew very strong, double digits year-over-year. So it was quite a good quarter for us, taking a step back, India is an incredibly exciting market. It's a major focus for us. I was just there, and the Dynamism in the market, the vibrancy is unbelievable". Je rappelle qu'Apple a ouvert ses 2 premiers Apple Stores en Inde il y a 2 semaines (20 avril), lire ICI.
Base installée : c'est le point clé, capital et central d'Apple et de son modèle, que Tim Cook a résumé par "it's a huge asset for us, and it's a testament to the overall customer satisfaction and engagement and loyalty of our customers. And so we view this as a major asset for us".
De fait,il y a aujourd'hui plus de 2 Milliards de devices Apple dans la nature, en croissance importante (à 2 chiffres) sur la durée. Ils sont appelés à être régulièrement changés (tous les 3-6 ans en moyenne) ce qui devient presque du revenu récurrent pour Cupertino. Je rappelle au passage ma façon très simple d'apprécier le business Apple : de plus en plus en users, prenant chacun de plus en plus de devices et de services Apple, ce avec des marges supérieures (en raison du mix hardware/services).
Mon hypothèse à 2030 : 1,5 Milliard de users ayant chacun en moyenne entre 3 et 4 appareils et entre 3 et 4 abonnements de services. Ce qui nous amènera mécaniquement à 800-1000Mds de CA (re, changement/upgrade tous les 3-6 ans), 200-250Mds$ de résultat net, une market cap de 6 à 8000Mds$ et un stock price entre 600 et 800$.
D'une année à l'autre il peut y avoir un cycle de renouvellement moins important, pour des raisons macro (crise éconmique, récession, etc) ou micro (nouvelle génération pas assez excitante), ce sera compensé l'année suivante par un cycle plus important (ce qu'on qualifie en anglais de "pent up demand"), et sur la durée la mécanique ne changera pas.
Anecdotiquement et de façon amusante, certains journalistes et pseudos analystes ont regretté qu'Apple n'ait pas assez parlé d'Intelligence Artificielle, le gros buzzword du moment...Tim Cook a répondu sobrement que 1/ ils en incorporaient bien de plus en plus dans leurs produits et que 2/ ils ne parlaient jamais des produits en développement.
Dernier GAFAM à le faire, Apple va présenter ce soir après la clôture du marché ses résultats pour son 2ième trimestre fiscal 2023 (Octobre 2022 - Septembre 2023), et avait prévenu lors du précédent que le CA serait en baisse, dans la même amplitude qu'au dernier trimestre, ie autour de 5%.
Le marché a donc déja anticipé des résultats peu fameux, et s'attend en moyenne à 93Mds$ de CA et un EPS de 1,43$, soit respectivement des baisses de 4,5 et 6% vs Q1 2022.
En raison des bonnes performances de l'iPhone, qui reste le device phare (par contre, Mac, iPad et Wearables devraient ne pas être brillants), je m'attends pour ma part à une baisse un peu moins sensible, autour de -2 à -3% pour le CA (95Mds$), et un EPS quasiment du niveau de 2022 à 1 ou 2% près (l'iPhone a de meilleures marges que le reste du hardware, donc une bonne performance de l'iPhone se reflète dans une meilleure marge brute globale et donc des profits meilleurs). Le Forex meilleur devrait aussi aider (le $ s'est affaissé ce trimestre, mais l'impact devrait être cependant réduit puisque sans nul doute Apple se hedge en grosse partie).
Dans l'ensemble, Apple devrait néanmoins, et de loin, rester le roi du Free Cash Flow. En ces temps actuels, c'est une force colossale justifiant un bon premium ($AAPL est tout proche d'ailleurs de ses records historiques de janvier 2022, cf ci-dessus).
I) Taille et Split du marché mondial du BEV (véhicule pur électrique)
7,7M de BEV ont été vendus dans le monde en 2022, sur un total de 80M au niveau de l'industrie automobile, mais le marché est concentré puisque 90% du volume se réalise dans 6 pays seulement, et les 2/3 sont en Chine. C'est donc clairement la-bas qu'on peut acquérir de gros volumes...
II) Dynamique de croissance des BEV
Dans un marché mondial de l'automobile globalement stable en 2022, les BEV ont fait +60%. Autrement dit ils prennent des parts de marché à vitesse grand V sur les "ICE" (Internal Combustion Engine). De fait, ils ont reculé de 6% en 2022 et leur pic en volume fut atteint en...2018. Les constructeurs ont compensé en augmentant fortement les prix, de l'ordre de +30% depuis 2019 (stratégie claire de milking pour moi d'une catégorie en déclin, cf le segment "cash cow" d'une matrice BCG).
Croissance 2022 par principale zone :
Chine : +84%
US : +60%
Europe : +29% (Allemagne +32%, France +26%, UK +40%)
On s'attend en 2023 à ce que la croissance mondiale des BEV soit de l'ordre de +30 à +35%, donc atteigne 10M d'unités, les US prenant le lead en terme de dynamique avec +50%, dépassant le million de véhicules localement. Tesla devrait évidemment largement profiter du dynamisme de son 1er marché (rappel, sa PDM en BEV y est la-bas de l'ordre de 60%).
Sur une plus longue période, on observe schématiquement que le marché est passé de 100,000 à 1M de voitures entre 2012 et 2017, puis de 1 à 10M entre 2017 et 2023. Je vous laisse extrapoler 2023-2030 ;-)
III) Part/Pénétration des BEV par pays
Si au niveau mondial les BEV représente 10% du total des immatriculations en 2022, les différences sont énormes entre les marchés :
Moins de 1% au Japon (pourtant le 3ième marché mondial de l'automobile après la Chine et les US, avec ses 4M de véhicules/an). Certainement un "effet Toyota" qui jusqu'à très récemment n'y croyait pas et n'avait mis aucun focus dessus. Le nouveau CEO a mis un c ap radicalement différent, mais c'est bien tardif.
Autour de 5% seulement aux US (mais en Californie le taux est de 16% et cet Etat trustait en 2022 40% des BEV vendus aux US) !
Et 21% sur le 1er marché mondial qu'est la Chine. Résultat d'une stratégie délibérée du Gouvernement chinois depuis une dizaine d'années.
L'Europe (comprenant aussi le UK) est au dessus de la moyenne mondiale avec 14%.
Mais avec la aussi de grandes variations :
Taux très élevé en Scandinavie (dont l'incroyable 80% en Norvège).
Taux très bas en Europe du Sud avec moins de 4% en Italie et en Espagne, moins de 3% en Grèce. A l'exception du Portugal (11%).
La France étant dans la moyenne européenne avec 14%.
Les 15 1ers taux de pénétration des BEV :
IV) Les 10 1ers Constructeurs
Tesla est toujours loin devant, mais il faut noter l'incroyable progression de Byd (quasiment x3 en 2022), et le fait que 5 des 10 1ers constructeurs d’EV en volume sont chinois. Au total, il y a d’ailleurs une centaine de constructeurs chinois de voiture électriques.
On peut être certain que la plupart disparaitront (ou se feront racheter) dans les 10 ans, mais que les plus gros vont venir rapidement chatouiller douloureusement les traditionnels en Europe et, dans une moindre mesure probablement, aux US aussi, avec des price points à les faire blémir (les prix en Chine sont 30% plus bas qu’en Europe, et c’est aussi le cas d’ailleurs pour les Tesla localement).
A noter que Tesla est le seul constructeur de BEV à être réellement mondial, avec des usines sur les 3 continents. Selon toute probabilité, le Model Y devrait être en 2023 le modèle de voiture le plus vendu au monde, toutes catégories confondues.
Je souhaite au passage bonne chance aux constructeurs traditionnels, coincés entre Tesla et les chinois. Je ne vois pas comment on pourrait éviter un gros shake out dans les 5 ans à venir. Ils vont devoir gérer la décroissance, se replier (ie je pense notamment que Ford finira par quitter l’Europe), se spécialiser sur certains segments/niches, certains se faire racheter… Reminder, dans mon post de début février dernier j’extrapolais que les constructeurs traditionnels perdent 30 à 40% de leurs volumes en 2030…
Courte video (quelques minutes) très intéressante sur les progrès du logiciel de pilotage automatique de Tesla ("FSD"). Ci-dessous.
Au curseur 1'50, pour illustrer la qualité du FSD, et sa usabilité, le gars dit carrément : "I've stopped driving, I just don't drive anymore, I let the car do its things...I can now use it at any point...".
Maintenant, même si le FSD était actuellement 99,9% parfait, il faut qu'il le soit à 100%, et ces petits 0,1% de gap à combler pourraient prendre un temps très très long...ou peut-être pas. En fait, personne ne peut réellement s'avancer sur un timing de disponibilité, ça ne fait jamais que 4 ou 5 ans qu'Elon Musk le promet "pour la fin de l'année" (il a réitéré ça aux derniers earnings d'il y a 15 jours).
Mais ma conviction (ou ma croyance, appelez ça comme vous voulez), c'est qu'ils vont bien y arriver, un jour, ce avant tout le monde, et donc avec une avance de très nombreuses années sur la concurrence. Ce jour la, s'il arrive, ce sera totalement game changer, à tous points de vue.
Regardez aussi cette video d'il y a 2 mois d'un chauffeur Uber qui se sert à 99,99% du FSD pour prendre et déposer ses clients (il le laisse juste 3 secondes pour mettre la voiture un peu plus sur le côté) :
Interview avant hier sur CNBC particulièrement intéressante de Jon McNeill, au brillant parcours professionnel en tant qu'executive, et maintenant à la tête d'un start-up studio extrêmement successful, DvX.
Si un Board Member de General Motors aussi crédible montre ostensiblement autant d'admiration, de respect et de confiance en Tesla et Elon Musk en particulier, et qui l'a systématiquement défendu devant les questions critiques voire un peu agressives de l'interviewer, beaucoup devraient sans doute s'en inspirer !
Notamment tous ces prétendus "analystes" qui n'ont pas le 100ème de l'expérience d'entreprise de Jon McNeill...
Et en plus le gars est un ancien top executive de Tesla, connaissant donc très bien Elon Musk personnellement.
Extraits :
"He's incredible at managing his schedule ans staying involved at the absolute key topics".
"Because they have lots of margins they're using that as a weapon".
"Even though they cut prices 6 times this quarter they still have more margins than the industry".
"He's good at deliverying eventually on promises but not on time".
"You're investing in a space which could be 10 times larger in 5 years time than it is today".
Sur les multiples sociétés d'Elon Musk avec des ingénieurs qui sont parfois appelés à travailler pour les autres : "It drives believe it or not some massive breakthroughs"..."There are Space X materials engineers who've really transformed the way Model Y gets produced".
Petit post rapide en réaction au +13% de l'action Meta hier suite à l'annonce mercredi soir des résultats trimestriels.
L'action Meta a quasiment fait du x2 depuis le début de l'année, passant de 125 à 240$ environ. De très loin la pus forte hausse des GAFAM (qui font un tir groupé entre +22 et +30%).
Au passage on remarque que la Tech a opéré un très beau rebond vs le marché, ridiculisant ceux qui l'avaient enterré en début d'année et pariaient contre, à base généralement d'analyse graphique, extrapolant juste la tendance des courbes 2022. How smart ! Anecdote, j'ai même lu un gars qui, voulant jouer au gourou des marchés, prédisait que la Tech allait encore chuter en 2023, et ne conseillait dans sa newsletter pour cette année que 2 actions "solides", Walgreens et 3M. Bravo pour son flair, elles en sont à respectivement à -3 et -15%, pour un marché (S&P) en hausse de +8% !
Néanmoins, si on regarde le niveau vs les plus hauts historiques, c'est Apple qui s'en tire le mieux, et même devant le marché :
Et en ce qui concerne la croissance vs les niveaux pré-covid du 1er janvier 2020, Tesla, malgré le lourd sentiment négatif auquel on assiste en ce moment, écrase tout le monde (revoir la courbe de l'action donnée avant hier, Tesla en est encore à x8 sur le niveau moyen des années 2014-2019) :
Ce qui est intéressant pour Meta, c'est que si on regarde les metrics de l'entreprise au dernier trimestre, ce n'est pas non plus parfaitement excitant :
Un croissance anémique avec un CA qu Q1 de seulement +3% vs 2022
Net income en baisse de 24% et un free cash flow en baisse de 17%
Et par ailleurs, les nuages n'ont pas totalement disparu, loin de la : la division Reality Labs va continuer de perdre énormément d'argent, et ce plus qu'en 2022 et au total c'est 30 à 33Mdss$ de Capex que Meta devra consacrer en 2023 pour développer son business.
Mais dans le même temps, Zuckerberg a aussi franchement dégraissé l'entreprise, plus de 20% des effectifs en moins entrainant une baisse de 4Mds$ de frais de structure, et a montré ainsi un bien plus important focus dans ses "moonshots".
Et Meta a eu des succès opérationnels et voulu dissiper les craintes concernant la concurrence de TikTok :
2 Milliards de Reels partagés chaque jour (la feature concurrente de TikTok). Meta a annoncé qu'il pensait gagner des parts de marché sur les videos courtes.
La monétisation des Reels en amélioration de +30% sur Instagram et de +40% sur Facebook
Comme quoi, même avec un business pâtissant d'une faible dynamique, si on rassure Wall Street sur ce sur quoi elle est focus...
Le "sentiment" de Mr Market, ça va et ça vient...
L'analyse technique/graphique vise à interpréter la psychologie de Mr Market, et ainsi extrapoler ce qu'il va faire dans les jours et semaines à venir. Bon courage. "Souvent Mr Market varie, bien fol qui s'y fie" !
C'est la citation toute simple et de bon sens de Peter Lynch...
Appliquons la à Tesla :
2012-2023
2012 : 0,4Mds$ de CA. Action $TSLA autour des 2$ en moyenne (entre 1,5 et 2,5$).
2022 : 81Mds$ de CA, $TSLA autour des 200$ en moyenne (entre 100 et 380$)
Soit des multiples de :
CA : x 200
Action : x100 environ
En 2012 le CA était vraiment très bas, on partait pas de 0 mais presque, alors prenons un point de départ ultérieur, 2017.
2017-2023
2017: 12Mds$ de CA. Action $TSLA autour des 20$ en moyenne (entre 15 et 25$)
2023 : 85Mds$ de CA (trailing 12 months), $TSLA autour des 160$ actuellement.
Soit des multiples de :
CA : x 7
Action : x8
How surprising !
"If company does well, stock does well...: comme on le constate clairement, sur la longue distance la performance de l'action rejoint la performance de l'entreprise, et sur des durées plus courtes (2/3 ans), on a eu des périodes de flambées verticales incroyables (x30 en 30 mois), et des périodes de stagnation voire comme actuellement de consolidation sensibles...
À noter qu’idéalement il aurait plutôt fallu prendre la rentabilité, ou encore mieux le cash flow ou le free cash flow, mais en 2012 comme en 2017 Tesla n’était pas encore rentable (-400M$ et -2Mds$ respectivement).
Sur les 10 ans à venir, je ne prends pas beaucoup de risque en disant simplement que pour extrapoler ce que va faire l’action $TSLA il faut extrapoler ce que va faire l’entreprise…
Et comme j’anticipe qu’elle devrait multiplier par 20 son CA…j’extrapole que l’action peut aussi faire du x20…
Et d’ici la, certainement encore quelques montagnes russes, des poussées verticales sur des périodes assez courtes, comme des chutes brutales et des phases de consolidation.
On peut chercher à « trader » ces montagnes russes, timer le marché, avec tous les risques que cela comporte, comme on peut simplement laisser du temps au temps sereinement, au passage en renforçant régulièrement sa position.
Pour une société au potentiel colossal, c’est indubitablement la stratégie avec le plus gros levier.
Autre exemple que je peux reprendre car je le connais bien : Apple. Entre 2009 et 2022 :
CA : x10 (environ)
Net profit : x13
Market Cap : x16
Action : x20 environ (booster grâce aux rachats d'actions)
Article intéressant ce matin dans le Financial Times, qui reprenait une déclaration du Président du constructeur chinois Xpeng, arguant que dans 10 ans il n'y aurait pas plus de 10 constructeurs automobiles au niveau mondial.
Et point encore plus intéressant, il fixait le volume minimum à atteindre à 3M de véhicules vendus par an !
Cela rejoint en fait ma conviction, assise sur un constat simple : l'industrie automobile va fortement "s'iphoniser" au cours de cette décennie, le hardware va se commoditiser de plus en plus et la majorité de la valeur des voitures proviendra du logiciel, des applications et des services qui y seront intégrés. A l'exception de quelques constructeurs qui resteront dans un use case très spécifique de l'hyper luxe du genre Ferrari, Aston Martin ou Lamborghini. Mais c'est là un autre marché.
Dans l'industrie des smartphones, sur un marché de l'ordre de 1,5 Milliard d'unités par an, on n'a plus aujourd'hui qu'une demie douzaine de constructeurs majeurs (Apple, Samsung, Huawei, Lenovo, Xiaomi, Oppo), et 2 acteurs bien plus modestes, ZTE et Vivo.
Dans le domaine du logiciel, qui apporte des marges incomparablement supérieures au hardware (pour schématiser, 80-90% vs 20-30%), la taille critique compte encore plus vu que c'est le volume qui permet justement de couvrir les frais de R&D et fixe donc la rentabilité. Avec une spirale vertueuse, plus de volume, plus de profit, plus de réinvestissement en R&D, des produits encore meilleurs, du volume de nouveau pris aux concurrents, etc.
Par ailleurs, le coût du composant clé, la batterie, 20-30% du total, est lui aussi fortement dépendant du volume. On peut descendre ses coûts par le volume bien plus rapidement qu'on peut descendre aujourd'hui le coût de fabrication des moteurs thermiques. C'est donc d'ailleurs aussi pour cela que le véhicule électrique, certes aujourd’hui encore plus cher en moyenne que le thermique, va bien s'imposer, par le prix : il reste encore en effet un large potentiel d'y descendre les coûts, si bien qu'ils seront mécaniquement et nécessairement d'ici quelques années moins chers à l’achat que leur contrepartie thermique, sans compter qu’après l’achat il demande bien moins d’entretien. On arrivera donc probablement d’ici quelques années à un TCO (total cost of ownership) d’un VE significativement plus bas, 30 à 40% inférieur à celui d’un véhicule thermique.
Et c'est donc aussi pour cette mécanique volume/coûts/profits, que j'avais indiqué dans un post passé il y a quelques mois que la nature même de l'industrie automobile de demain serait forcément du type "winner takes most".
Je ne sais pas si la taille critique sera demain de 3 Millions comme le pense le Président de XPeng, ou 5 Millions, mais j'ai la conviction qu'elle devrait être bien supérieure à ce qu'elle est aujourd'hui.
C'est aussi pour cela que la stratégie de Tesla d'être agressif question prix pour rendre leurs voitures les plus accessibles possibles, et ainsi maximiser ses volumes, me paraît intrinsèquement parfaitement pertinente, voire même nécessaire. Sachant aussi que cette agressivité prix est en partie drivée par le contexte macro actuel, et qu'en période d'embellie économique il pourrait ne pas être autant nécessaire pour Tesla d'être aussi agressif.
On peut parfaitement critiquer le fait que le management, dans ses earnings conf call passés, n'avait absolument pas préparé les investisseurs à une telle guerre de prix rognant ainsi les marges et la rentabilité à court terme (au contraire même, il les a habitués et fait rêver avec des marges brutes allant jusqu'à 30% certains trimestres !), on est même légitime à critiquer la communication générale du management (franchement pas très bon), mais sur le fond je n'ai rien à dire sur la pertinence de cette stratégie, et je n'ai donc aucune raison de modifier mes perspectives sur Tesla à 10 ans, au contraire même ! A noter que Cathy Wood d’Ark Invest a elle réitéré sa perspective de $TSLA à 2000$ en 2027, bien plus bullish que moi.
Une stratégie volume pertinente intrinsèquement, et d'autant plus spécifiquement pour Tesla que c'est le lowest cost producer, donc peut l'appliquer tout en restant encore très correctement rentable (plus de 11% de marge nette au dernier trimestre).
Certes Stellantis a maintenant des marges nettes supérieures, mais c’est parce qu’il a depuis 2-3 ans entrepris une claire stratégie de prix et de marge au détriment des volumes, tout en réduisant ses coûts de structure, lui permettant ainsi de fortement abaisser son point mort (Carlos Tavares s’en est publiquement et à raison réjouit). Luca Di Meo n’a pas dit autre chose il y a quelques jours : « nous n’irons pas dans la guerre des prix, tant pis si nous perdons des volumes ».
A court terme, jouer les marges c’est clair que ça améliore le P&L, mais je ne vois pas trop comment cela peut tenir sur la durée. Les chinois ne sont pas encore en Europe (ou si peu), Tesla ne sait encore produire que 2M de véhicules par an, donc la pression est relativement faible, mais d’ici 3-4 ans ce sera totalement différent. Par ailleurs, sociologiquement et culturellement, j’ai tout de même l’impression que la voiture est de moins en moins un objet de différenciation et de statut social pour les générations qui arrivent, qui veulent de moins en moins d’ailleurs en posséder une.
La stratégie de volume de Tesla elle n'est cependant pas dénuée non plus de risque d'exécution, car construire les usines et avoir la supply chain pour produire et distribuer 5, 10, 15 et jusqu'à 20M de véhicules en 2030 (objectif affiché de Tesla) est clairement horriblement complexe ! Pour rappel, le leader mondial, Toyota, ne produit qu'autour de 10M de véhicules aujourd'hui...On mesure le challenge surhumain pour arriver à faire ce que personne n’a encore jamais fait…
Si Tesla y arrive, ce que je crois car je parie sur la ténacité de Musk et son approche unique des problèmes techniques, je ne vois pas non plus comment cela peut l’être de façon "smooth" et linéaire, sans accroc sur son parcours ! Et ça pourrait aussi prendre un peu plus de temps que prévu, mais ça Musk est habitué à gérer le temps long : « we specialize in making the impossible merely late » ! Plus de temps et éventuellement aussi plus de Capex. Mais in fine, à terme…
Et chaque « down cycle » où le « sentiment » est bearish comme en ce moment donne des opportunités pour rentrer ou renforcer sa position dans $TSLA…puis en laissant du temps au temps en attendant patiemment le prochain bond…
Même si je répète encore et toujours que je ne passe pas 30 secondes à spéculer sur ce que va faire l’action ^$TSLA à court terme, ie va t’elle ou pas toucher 150$ voire 140$ voire encore plus bas, ça ne m’intéresse pas et ça ne sert strictement à rien, je regarde juste ce que le marché me sert, et en fonction, j’agis. Et évidemment, à 150$ je serais gourmand ! Et à 100$ la j’aurais envie de faire mienne la citation de Warren Buffett (en 1974 durant le krach du marché) : je serais « comme un obsédé sexuel dans un harem » !
Et je conseille à tous de faire pareil !
S’il y en a qui veulent par contre s’amuser à trader $TSLA, du gagne-petit en faisant des AR sur l’action, essayant de timer le marché et de deviner le sens du vent, grand bien leur fasse mais ce blog n’est pas le lieu pour chercher des éléments pour ça. Mais de grâce, ne me laissez pas des commentaires pour me parler de trading et de sens du vent !
Au Q1 2023, globalement sur ces 3 grands marchés qui représentent environ 70% du marché mondial, Tesla a crû de +45% vs Q1 2022 pour des marchés en hausse de +1%, donc a significativement augmenté sa part de marché, de 2,5 à 3,6%.
On notera que sur le terrible marché chinois, où tous les principaux constructeurs occidentaux perdent rapidement des parts de marché (Carlos Tavares de Stellantis ayant même déclaré qu'il était content de ne pas y être !), Tesla performe aussi sans problème et y a même une part de marché supérieure à celle qu'il a en Europe (3,2 vs 2,9%).
Tesla y à même placé au 1er trimestre le 2ième modèle le plus vendu (toutes catégories confondues), pas si loin de la top position :
A noter au passage la part du marché total en véhicules pur électriques (hors hybrides) sur ces différentes zones (toujours au Q1 2023) :
Chine : 21%
Europe : 14%
US : 7% (seulement)
Partout la part des véhicules électriques est en forte croissance, au détriment des véhicules thermiques ("ICE", Internal Combustion Engine) qui ont de fait connu leur pic en...2018 !
Reste que sur le marché chinois, il y a un concurrent de poids, Byd, marque encore quasiment inconnue chez nous, participation de Warren Buffett depuis près de 15 ans, et dont la croissance est encore plus incroyable que celle de Tesla.
Byd est devenue la 1ère marque sur le marché chinois au Q1 2023, détrônant VW qui y était installée depuis belle lurette (à noter la 10ième place de Tesla, qui n'est en Europe que la 16ième marque. Et 5ième déja aux US) :
Sur 2023, Byd prévoit une croissance entre +70 et +100% environ, avec de 3 à 3,6M de véhicules, ce qui l'amènera loin devant Tesla et ses 1,8 à 2M d'unités prévues, et en ferait le 8 ou 9ième constructeur mondial en volume, de la même taille à peu près que Nissan.
Maintenant Byd et Tesla ne boxent pas complètement sur le même terrain :
Byd vend pour moitié environ des véhicules hybrides, l'autre moitié étant les véhicules pur électriques (vs 100% évidemment pour Tesla dans cette catégorie).
Byd vend en Chine à plus de 90% aujourd'hui, Tesla est lui vraiment un constructeur mondial avec des ventes bien plus équilibrées (40% US, 32% Chine, 22% Europe, 6% ROW). Avec des usines sur ces 3 grands marchés.
Byd vend en grande majorité des véhicules de moins de 30K$ (75% du total), alors que 100% des ventes de Tesla sont dans des véhicules bien plus coûteux au dessus des 30K$ :
On peut imaginer ce que va faire Tesla en Chine, sur le 1er marché automobile au monde (et de loin, environ 26M de véhicules par an vs 14M aux US et 12M en Europe), quand il disposera lui aussi, d'ici disons 24 à 30 mois (donc en 2025), d'un modèle à 20-25K$ capable d'être produit en masse...
Tony Sacconaghi, de Bernstein, a présenté le tableau comparatif suivant des différents constructeurs automobiles européens et américains :
Message subliminal, Tesla qui ne vend que 1,3M de véhicules, a à peu près les mêmes marges brutes et d'EBIT que les généralistes, mais sa valorisation Boursière est incomparablement supérieure...
Façon un peu détournée de certainement induire qu'elle est excessive !
Il n'y a juste que 3 gros biais :
1/ Le tableau présente les marges au Q1 2023 pour Tesla, qui vient de fortement baisser ses prix ce trimestre, contre en moyenne sur 2022 pour les autres constructeurs. Faudrait voir ce que la concurrence présente au Q1 2023, et après, dans le contexte macro que l'on connait, et après les baisses de prix qu'ils devront bien suivre aussi tôt ou tard.
2/ On ne parle pas du même marché : on compare Tesla, qui ne fait que des véhicules électriques, avec les autres qui sont encore massivement en ICE, pour lesquels les prix comme on le sait ont fortement augmenté (+37% en moyenne de 2019 à 2022), mais dont le marché est maintenant structurellement en baisse (très probable d'ailleurs que les constructeurs milkent délibérément ce segment encore majoritaire pour financer leur développement dans les EV). On sait par exemple que Ford et VW perdent de l'argent (voire beaucoup) sur les véhicules électriques. La réalité actuelle est qu'aucun autre constructeur ne sait aujourd'hui gagner autant d'argent que Tesla sur les véhicules électriques.
3/ La market cap dépend fortement aussi de la croissance, elle n'est (volontairement ?) pas indiquée ! Or celle de Tesla (+25% au Q1) est incomparable de celle des autres généralistes. Par ailleurs, re le point précédent, une grosse partie de la croissance 2022 en CA de ces derniers provient des augmentations de prix sur le segment des ICE, qui ne sont qu'un soufflet ponctuel, les volumes des ICE sont décroissants (et leurs prix baisseront également).
On peut parier que dans 2 ou 3 ans ce tableau n'aura absolument pas la même physionomie ! Or une valorisation d’entreprise reflète justement par définition une dynamique future (de son CA et surtout de ses profits et cash flow), donc si on ne donne pas cette dynamique, c’est une véritable escroquerie intellectuelle !
Pour les résultats trimestriels des principaux autres constructeurs, on aura bientôt plus d'éléments, voici le calendrier :
Je pense avoir déja largement évoqué le peu d'admiration" que j'ai pour la qualité du travail des analystes en général (je précise que certains sont top, ie pour Tesla Pierre Farragu), et de la non pertinence totale de leur target à 12 mois (stock price in short term is anybody's guess), mais c'est toujours un peu fun de regarder !
Suite aux earnings d'hier et de ce qui a été présenté et annoncé, ils ont assez logiquement mis à jour leur "targets" :
On remarque que :
La plupart restent de même au dessus du cours actuel (162$ hier soir), moyenne de ces 10 analystes à 194$ vs 212$ avant.
Certains ont slashé de 20% (de 250 à 200$), d'autres de seulement quelques petits % (de 217 à 212$ ou de 120 à 115$ !) ?
Les targets vont de 115$ à 257$, un rapport de 1 à plus de 2 ? Ce qui montre bien au passage la grande relativité de l'exercice.
Il y a tout de même un upgrade. De 220 à 225$ ! (J’avoue que j’ai beaucoup de mal à comprendre leur rationnel !).
Analyses, interprétations et boules de cristal ne sont pas de la même couleur selon les analystes :-)
Bien évidemment, certains seront nécessairement dans le vrai, c’est ce qu’on appellera avoir de la chance. Je rappelle que quand un macaque lance une pièce en l’air il a exactement la même chance que ses congénères macaques qu’elle retombe sur pile !
Si Tesla cracke le FSD sous 6 mois, la majorité aura probablement eu tout faux. Si en conséquence ils annoncent à horizon 2025 le lancement d’un service de robotaxi (ne serait-ce que sur une géographie initialement limitée), la majorité aura la aussi eu tout faux. Si la Fed arrête de monter ses taux (voire les descends), la majorité aura probablement eu tout faux aussi. Si Tesla arrive à fortement remonter ses marges au Q2 ou, plus probablement, au Q3 ou au Q4 2023 (parce que on a une embellie économique, ou autre), la majorité aura eu tout faux encore. Si la réception du Cybertruck au Q3 est inouïe, la majorité aura la aussi probablement eu tout faux. Si Tesla présente aussi plus rapidement que prévu son "Model 2", la majorité aura encore eu tout faux, etc.
Mais si au contraire la Chine s’aventurait à envahir Taiwan, si la récession annoncée était avérée mais encore plus terrible, et si le conflit ukraino-russe s’envenimait et s’étendait, des aléas incontrôlables, la majorité aura certainement eu raison !
Je ne dis pas que les événements ci-dessus (positifs comme négatifs) vont arriver, mais le fait est simplement qu’il peut s’en passer des choses dans les 6/12 mois qui influent fortement sur le « sentiment » boursier, qui de fait depuis jeudi est aujourd’hui négatif, après avoir été neutre pendant 2 mois (mi février - mi avril).
En vrai, le cours d’une action à court terme dépend des résultats et des évènements qui auront lieu demain, et à court terme (12 mois) ils relèvent donc juste de la boule de cristal.
La réalité est simple, il faut prendre toute projection court terme comme une parôle de Madame Irma, ni plus ni moins.
Alors qu’à long terme, la trajectoire dépend des avantages concurrentiels et de la dynamique des marchés, et ça on peut le prévoir avec beaucoup plus de certitude et de rigueur.
C’est pour cela que spéculer à court terme relève majoritairement juste du jeu de hasard et de la boule de cristal, alors que l’investissement long terme relève de l’analyse rigoureuse.
Ce qui m'intéresse, c'est pas le cours de Bourse, c'est l'entreprise, ses produits, ses technologies, ses usines et leur capacité, son parc de voitures, son réseau de recharge, les datas qu'elle collecte, son management et comment il exécute, in fine ses avantages concurrentiels. C'est essentiellement la où il ne faut pas se planter.
Je rappelle aussi au passage que je vois l’investissement sur Tesla (et sur toute autre entreprise de qualité dont la valeur va se développer fortement sur la durée) comme la construction/le développement d’un patrimoine : c’est sur le long terme, et quand l’action baisse à court terme, je suis donc heureux d’acheter en solde car je suis aujourd’hui en phase d’accumulation.
Dans cette optique, la volatilité n’est pas un risque mais une opportunité !
Dans mon wrap up des earnings d'hier, j'avais oublié de mettre une citation capitale de l'ami Elon :
"Because we're the only ones making cars that technically, we could sell for zero profit for now and then yield actually tremendous economics in the future through autonomy, no one else can do that. I'm not sure how many people will appreciate the profundity of what I've just said, but it is extremely significant".
Et Drew Baglino de compléter : "...and service, and charging, and insurance, and all of these other ongoing revenue streams that other companies don't have...".
La philosophie de Tesla est maintenant clairement posée : non seulement c'est le lowest cost producer, mais ils sont aussi tellement convaincus de la valeur de l'autonomie et des autres revenus potentiels dérivés de la flotte automobile (réseau de recharge, assurance, etc), qu'ils seront les seuls à pouvoir proposer, qu'ils sont relax avec des marges sacrifiées sur le hardware, et n'hésitent donc pas à casser les prix !
Si on en croit Elon, cette guerre des prix n'a pas pour vocation de délibérément "tuer" les concurrents, mais juste de maximiser la croissance des ventes et du parc : "Well, I mean, we're not trying to say, take pricing actions in order to be deliberately -- to deliberately undermine competitors or anything like that. We really don't think about competitors that much. We just look at, do people like our cars, how can we make the product better, can they afford our cars... ?".
Mais ceci dit, que la motivation 1ère soit ou ne soit pas de tuer les concurrents, le fait est là, il est avéré qu'un acteur important de cette industrie a les capacités et les avantages concurrentiels intrinsèques distinctifs pour mener un business model totalement différent et disruptif, n'hésitant plus à slasher ses marges sur le hardware, pour les compenser demain par les marges du software et des services.
Ca ne change pas seulement le profil financier de Tesla, ça risque fort aussi de changer toute la physionomie de l'industrie !
C'est en fait bien plus qu'une guerre des prix qu'a lancée Tesla, cela n'est que la partie visible de l'iceberg, c'est en fait une guerre de modèle économique !
Que les investisseurs, inquiets sur le court terme, ne comprenant et/ou n'adhérant pas au modèle, aient lourdement sanctionné l'action Tesla hier est une chose, mais moi je voudrais bien surtout être une petite souris pour assister aux Boards des acteurs traditionnels, car ils ont maintenant un challenge encore plus important qu'il y a quelques mois : il ne s'agit plus seulement de savoir concevoir et produire en masse efficacement et de façon rentable de belles voitures électriques, et c'est déja pas gagné, mais il faut aussi maintenant trouver la réponse au changement de modèle introduit par Tesla.
Bon courage !
Ca me rappelle assez fortement le modèle Amazon, certainement aussi le lowest cost producer en matière de distributeur, qui sacrifie ces marges sur son activité "commerce" (ils perdent même beaucoup d'argent la dessus) mais leverage sa base de clients et son trafic par notamment les commissions bien plus juteuses de la Place de Marché, ainsi qu'également, et de plus en plus, par de la Pub (40Mds$ cette année quand même, avec des marges supérieures à la place de marché, et un capex inférieur).
En face du modèle Tesla, on a des acteurs qui cherchent à maximiser leurs marges sur le hardware, gagnent aussi parfois leur vie avec le crédit consommateur pour acheter les voitures, et écoulent au passage via des distributeurs dont le modèle est surtout de vendre de l'entretien et des pièces détachées au prix fort.
On va maintenant assister au choc de 2 modèles totalement différents, et ça va être passionnant !
Stratégiquement et fondamentalement, je vois les choses comme cela : non seulement Tesla est le lowest cost producer de l'industrie, ce qui est déja un atout maître, mais il est également le seul à pouvoir potentiellement générer demain de confortables et juteux revenus annexes, par son avance en full self driving, par son réseau de recharge, par sa remontée de data qui lui permettent aussi de proposer de l'assurance, etc.
Un nouveau modèle totalement disruptif qui n'en est de fait qu'à son tout début et qui n'a surtout pas encore fait ses preuves, alors il n'est pas très étonnant que les investisseurs soient nerveux, qu'ils ne savent pas pleinement l'apprécier à ce stade, et/ou préfèrent aussi prudemment attendre que Tesla prouve qu'il sait bien le délivrer et l'exécuter. Et c'est tout aussi vrai qu'il y a des risques et des aléas, Elon a d'ailleurs maintes fois promis le FSD "pour la fin de l'année", et comme on l'a compris le FSD est maintenant totalement clé et central dans le modèle !
Ceci étant, si chaque année depuis 4 ou 5 ans Elon a promis, à tort jusqu'à présent, que le FSD serait très bientôt pleinement opérationnel, viendra certainement un jour prochain où ce sera bien le cas.
Et ce jour là...que je crois assez proche maintenant...2 ans au pire...
Sur le fond, quand on sait qu'une voiture individuelle reste à 95% du temps parkée, inutilisée, ne servant à rien, il me paraît assez clair et logique que le modèle de Tesla s'imposera à terme : le hardware aura de fait une valeur bien plus faible que des features d'autonomie et autres services appliqués à des flottes (on revient sur les robotaxis).
Le timeframe étant par contre une grande inconnue.
Pour l'heure, très concrètement, malgré des conditions économiques macro très défavorables, surtout pour des biens >40K$/€, malgré la forte baisse des prix de Tesla au cours de ces 3 derniers mois (10-25% tout de même), ça reste une société en très forte croissance, et avec une marge nette de 11%...
Vous en tirerez vous-mêmes les conclusions qui s'imposent !
Après, il faut aussi bien distinguer 2 choses, les avantages concurrentiels intrinsèques pérennes d'une part, qui sont ce qu'ils sont, et le business model d'autre part, qui peut très bien évoluer. Aujourd'hui, l'entreprise opte pour un business model qui lui semble pertinent (et en ligne avec sa mission) car il pense cracker le FSD qui changera alors totalement la donne.
Dans un worst case, on peut (on doit même) faire l'hypothèse qu'il ne crackeront pas le FSD, ou que celui-ci ne sera pas massivement autorisé (et Tesla n'a aucun grip sur ces aspects règlementaires), ou alors pas avant 15 ans. Dans ce cas, on peut aussi supposer que Tesla pourrait, très logiquement et de nouveau, changer son business model et choisir de maximiser ses marges avec le hardware, d'autant plus importantes qu'il est le lowest cost producer, avantage concurrentiel intrinsèque.
Dans ce worst case, à la louche, Tesla au début des années 2030 ce sera sans doute 12M de véhicules avec 9-10K$ de marge brute /unité (ou 20M avec 7-8K$ de marge ?), et probablement 130-150Mds$ de résultat net avec la division Energy (vs 300Mds$+) conduisant à une market cap autour des 3-4000Mds$ et donc un stock price autour des 1000$ (donc 1/2 du base case avec l'autonomie)...A la grosse louche, mais faudrait que j'affine...
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